Série(s) "Arsène Lupin"

Maurice Leblanc réconcilie tout le monde en fait.

Les premières aventures d'Arsène Lupin (comme "L'évasion d'Arsène Lupin", la première nouvelle) sont plutôt lumineuses et non dénué d'espiègleries, notamment dans la manière avec laquelle Lupin se joue de l'inspecteur Ganimard. La tonalité s'assombrit avec la guerre de 14 et des romans comme "Les Dents du Tigre", "813" et aussi "L'île aux trente cercueils" sont violents et sinistres.

Il y a enfin une certaine sérénité dans les derniers: "La demoiselle aux yeux verts", "La Cagliostro se venge".

La matière est à disposition pour les scénaristes, qu'ils s'inspirent ou qu'ils adaptent.

Bande annonce officielle, la série en ligne le 08 janvier. Hum, j'espérais quelque chose d'un peu plus intimiste, à propos du regard d'un lecteur contemporain sur l’œuvre de Leblanc. Cela sera sans doute très efficace, mais telle que présentée ici, la série ressemble à une francisation maline de la Casa de Papel. Attention, je peux devenir très facilement nostalgique de Tokyo.

Le Lupin, dans l'ombre d'Arsène de Netflix (cinq premiers épisodes) partait avec le handicap de clairement se baser sur les romans, tout en devant être comparé à celui de l'ORTF, la version de Descrières ayant particulièrement charmé votre serviteur en ses vertes années. C'est injuste, mais la vie est injuste, ma pauvre Lucette. Malgré cela, la version Sy se laisse voir sans ennui, confirmant après ce Guilty pleasure total que fut Emily in Paris à quel point notre capitale représente un merveilleux décor. La réalisation abuse d'un montage trop haché afin de dynamiser l'action, mais sait tirer parti de sites superbes, comme le Louvre ou les fameux de toits de Paris. Il y a du budget, c'est manifeste. Utiliser une perspective indirecte  plutôt qu'une transposition dans l'époque contemporaine était un choix intéressant et qui présentait aussi l'avantage d'éviter une confrontation ipso facto avec le somptueux Sherlock de Moffat & Gatiss, ce qui aurait été suicidaire. En plus d'empécher les débats douteux autour d'Omar Sy.

Je trouve toutefois que le travail d'adaptation n'a pas été assez poussé. Les mécaniques de film de casse cherchent systématiquement à en mettre plein la vue, davantage par l'image  plus que par une intrigue ménageant finement ses rebondissements(tels les Missions Impossibles de Cruise, même si les déguisements ne sont pas high tech). La répétitive technique du flashback pour expliciter les exploits du héros lasse assez rapidement et cela a comme un coup de ces tristes émissions à base de révélation de tours de prestidigitation. Le plus notable reste que le récit met l'accent sur la soif de revanche sociale du protagoniste, ce qui est conforme aux romans, de manière bien plus prononcée que chez Descrières, où Arsène se montre davantage narcissique et préoccupé de sa gloriole. Les questions ethniques apportent aussi un éclairage contemporain bienvenu.

Mais c'est néanmoins là que la série va achopper, car la concrétisation de cette bonne idée d'adaptation ne convainc pas, malgré l'insertion de nombreuses références. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire, et la série rend les policiers trop systématiquement débiles genre Taxi pour ne pas entacher les triomphes de Lupin, là où Guerchard n'était jamais dépeint en idiot. Cette essentialisation de l'écriture concerne hélas une satire sociale en  gros sabots, les riches très très méchants, les pauvres très très gentils, avec des dialogues démonstratifs au possible, là où Descrières faisait son miel de tout un fastival de bons mots. On a confié l'adaptation à un Anglais et pourquoi pas, les Français adaptent bien Agatha Christie, et avec succès, et Lupin fut très populaire Outre Manche (d'où Herlock Sholmeès). mais on reste loin d'un Ken Loach autrement plus évocateur, âpre et dérangeant. Its a free world, son chef d’œuvre,  n'épargne pas les pauvres, ici on en reste à de l'imagerie d'Epinal. En fait cette série reste bien trop sagement familiale, là où l'anarchiste Lupin littéraire se montre révolutionnaire, sombre et dangereux (il faut le voir dans L'Île aux Trente cercueils pour le croire).

Ici le héros est dépouillé de tout inquiétante aura, afin de coller au registre et à la personnalité de Omar Sy, à peu près aux antipodes du héros de Maurice Leblanc. L'acteur reste dans sa zone de confort, il n'y est d'ailleurs pas mauvais mais que tout ceci demeure inoffensif. La série se montre beaucoup trop au service exclusif de sa star, sacrifiant ses personnages secondaire devenus de simples silhouettes tant tout est centré en permanence sur Sy. Dans ces conditions Nicole Garcia ne peut pas apporter grand chose au programme,là où Philippe Leroy-Beaulieu brillait avec Sylvie, clairement le plus intéressant personnage d'Emily in Paris. Et puis, bien sûr, nous sommes en 2021, donc Assane est sagement père de famille, terminé aussi bien le prédateur littéraire et son emprise sur les femmes (ça, ce n'est pas plus mal), mais aussi les conquêtes légères et jamais graveleuses du sémillant Gentleman Cambrioleur de l'ORTF, qui allaient si bien au brio de Descrières (Natacha...). Modernité. (***)

Le Figaro est sensiblement sur cette ligne avec un article intitulé "Omar Sy pose un lapin à Arsène Lupin". La journaliste Constance Jamet écrit que "Si l'action et les tours de passe-passe sont au rendez-vous, le panache est absent." ON apprend dans cet article que le scénariste George Kay a écrit son script sans avoir jamais lu l'œuvre de Maurice Leblanc !

La réalisation de Louis Leterrier est plutôt appréciée mais le tout ne convainc guère car, je cite "la série reste en surface" entre casse, huis clos pénitentiaire, kidnapping, thriller...Elle regrette notamment que "la pointe de danger, l'humour, la séduction insolente du gentleman cambrioleur (…) disparaît."

Conclusion: "un ersatz un peu fade"

Omar Sy aura sa saison 2.

Lupin II : la suite

https://www.20minutes.fr/arts-stars/serie/2961347-20210125-lupin-george-kay-indique-date-sortie-seconde-partie?xtor=EPR-212-[nl%20pop]---14926890007@2&utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=pop&_ope=eyJndWlkIjoiMGQ4OTU5OTcyMTM2YzNhNzQ1OThmZTU3YWU2YTJlYjQifQ%3D%3D

Connaissez-vous bien Arsène Lupin ?

https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/roman/quiz-omar-sy-vous-a-t-il-rendu-lupinologue-pour-le-savoir-faites-vite-ce-test-sur-arsene-lupin_4272143.html#xtor=EPR-919-[NLculture]-20210127-[content6]

Perso : 12/14. J'ai beaucoup lu Maurice Leblanc quand j'étais jeune. Je l'ai toujours bien aimé, même si la noirceur des dernies romans m'a un peu rebuté.

Voilà qui est clair ! J'aime bien aussi l'essorage des "Chroniques de Bridgerton" qui n'a pas l'air non plus d'être de la haute qualité !

Alors que la seconde partie de l'Arsène Lupin de Netflix se révèle aussi médiocre que la première, TMC a la bonne idée de diffuser ce soir celui de Descrières. C'est la première fois depuis très longtemps que je vois une série française des années 70 rediffusée en prime time. Trois classiques au programme : Le Bouchon de Cristal, Victor de la brigade Mondaine puis Arsène Lupin contre Herlock Sholmes.

Il est de toute façon très périphérique dans cette histoire si je me souviens bien (je l'ai vu il y a 25 ans !) et n'intervient qu'à la toute fin. Ne pas le faire intervenir ne serait pas scandaleux.

Certes, intervention brève et finale, mais que j'ai trouvé néanmoins marquante (notamment par le sort épouvantable qu'Arsène réserve au méchant de l'histoire), cela reste l'une de mes souvenirs forts du roman. je crains que le public ne souvienne désormais plus que des aspects légers et positifs du personnage, ce qui serait hémiplégique.

La saison 3 de "Lupin" arrive cet automne :

https://www.francetvinfo.fr/culture/series/omar-sy-reprend-son-role-de-lupin-dans-la-saison-3-sur-netflix-le-5-octobre_5783711.html#xtor=EPR-919-[NLculture]-20230421-[content9]