Vampires

**Camarade Totoff** Jeu 8 Sep 2016 - 17:11

Me promenant innocemment dans le métro, j'ai eu un coup de sang en voyant l'affiche ci-dessous :

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Ce qui m'amène à me demander: mais qu'est-ce que les vampires ont fait pour mériter ça ? Et, en corrolaire, sait-on ce qu'est un vampire ?

J'ai l'impression que, de nos jours, il suffit d'affubler n'importe qui de canines proéminentes pour "faire" vampire.

Mon sang n'ayant fait qu'un tour, je me propose de tenter une définition (ce qui me fera les dents).

Un vampire, c'est un "revenant en corps" selon l'expression de Dom Augustin Calmet dans son Traité des apparitions (1751). Ce qui le différencie des "revenants en esprit" (les fantômes pour faire simple). Jusque là, tout le monde est d'accord.

Ensuite, pourquoi le vampire se nourrit-il exclusivement de sang ? Parce que le sang est symbole de la vie. Il me semble que la dimension métaphysique est plus importante que la biologie stricto sensu.

En outre, il ne faut pas oublier que le vampire est un mort (le premier titre de Dracula était d'ailleurs The Undead -Le Non-Mort plutôt que l'Immortel) et que, par conséquent, son corps n'a plus de fonction vitale : ni digestion, ni, forcément, d'activité sexuelle. Toute la tradition issue des oeuvres de Stocker et Le Fanu est claire : le vampire est une pulsion de mort, un destructeur ; en aucun cas un bâtisseur.

Maintenant, le vampire est un mythe éminemment plastique et donc sujet à réinterprétation. Mais, quand je vois des affiches de ce genre, j'ai le sang mauvais.

Bon, je l'avoue aussi, je suis quelque peu puriste.

**Philo** Ven 9 Sep 2016 - 11:49

Mais non...

**séribibi** Ven 9 Sep 2016 - 12:02

C'est loin d'être un mythe car j'ai bien quelques suceurs de sang parmi mon entourage, mais bon, on s'en accomode...

**Estuaire44** Ven 9 Sep 2016 - 13:43

Je suis assez indulgent envers Chica Vampiro, car c'est un programme vraiment pour la jeunesse préado, diffusé sur Gulli, avec pas mal d'humour bon enfant. très
Halloween vu par le Disney Channel comme ambiance.

**Camarade Totoff** Ven 9 Sep 2016 - 13:55

Estuaire44 a écrit:Je suis assez indulgent envers Chica Vampiro, car c'est un programme vraiment pour la jeunesse préado, diffusé sur Gulli, avec pas mal d'humour bon enfant. très
Halloween vu par le Disney Channel comme ambiance.

Soit, mais est-ce que le vampire, monstre par essence, est bien une figure à présenter aux enfants ? Même chez Scoubidou, c'est une créature maléfique !

**Dearesttara** Ven 9 Sep 2016 - 13:58

Toi, tu n'as pas vu quand tu étais petit Dracula, mort et heureux de l'être réalisé par Mel Brooks... Laughing

**Camarade Totoff** Ven 9 Sep 2016 - 14:12

Dearesttara a écrit:Toi, tu n'as pas vu quand tu étais petit Dracula, mort et heureux de l'être réalisé par Mel Brooks...

J'avoue que non. Tu me le conseilles ?

**Estuaire44** Ven 9 Sep 2016 - 14:22

Pour le décalé, je recommande Les Charlots contre Dracula, à peine moins immense que Les Charlots font l'Espagne.

**Dearesttara** Ven 9 Sep 2016 - 14:24

Camarade Totoff a écrit:J'avoue que non. Tu me le conseilles ?

J'avais bien aimé quand j'étais gamin. Maintenant, je ne sais pas s'il a bien vieilli. A l'époque, j'adorais beaucoup de comédies, or en les revoyant aujourd'hui, certaines sont quand même mal dégrossies (j'avais vu en boucle enfant les Marx au grand magasin, mais en le revoyant il y a quelques mois, je me suis ennuyé ferme). Donc, tu peux essayer, mais je ne garantis rien ! Dans le genre parodie horrifique, il paraît que Frankenstein Junior est meilleur, je ne l'ai pas vu par contre.

Sinon, oui, tu peux tenter les Charlots d'Estuaire, mais là, je ne jure vraiment vraiment de rien... Razz

**alexis06** Sam 10 Sep 2016 - 17:55

Toi, tu n'as pas vu quand tu étais petit Dracula, mort et heureux de l'être réalisé par Mel Brooks...

Un peu dans le même style mais plus ancien, il y a aussi l'excellent : Vampire vous avez dit Vampire avec le très très bon Roddy McDowall.

Mon film préféré sur les vampires restant à ce jour Vampires avec James Woods.

**séribibi** Dim 11 Sep 2016 - 22:29

"Du sang pour Dracula" montre un vampire mourant -fin d'une époque-, dupé par ses favorites dont il ne supporte pas leur sang de -fausses- vierges (il revomit tout aussitôt dans de pires souffrances qui soient). Il finira en compote par le servant des lieux (un gros château d'une famille d'aristocrates en réalité ruinée, mais qui trompe les apparences).
Le "Dracula" de Coppola se tient trop au mythe cinématographique, en résulte un film dâté aux effets ringards et appuyés avec un Keanu Reeves sous Zolpidem...
"Aux frontières de l'aube" de Kathlyn Bigelow était une relecture à l'époque assez originale mais il a pris un petit coup de vieux (notamment à cause de la musique de Tangerine Dreams totalement plombante).
"Entretien avec un vampire" adopte une idée intéressante : l'interview en flash backs. De nombreuses scènes baroques et belles parsèment le métrage.
"Twilight" n'est pas si catastrophique pour peu qu'on se mette en tête que c'est l'esprit romantique qui est mis en avant...Le 1er et les 2 derniers (4 et 5) sont plutôt sympas. Le 3 s'en tire avec les honneurs...Mais le 2 est à oublier !!
Dans le plus gothique tu as bien sûr les classiques avec Christopher Lee : "Le cauchemar de Dracula" ou "Dracula prince des ténèbres"... Mais aussi "Nosferatu".
Du plus commercial avec la saga "Underwold" qui possède 4 épisodes et qui mèle vampires et lycanthropes...Le 1er reste le meilleur.
Sinon il y a THE parodie avec "Le bal des vampires" de Roman Polanski...ou plus récemment un "Vampire vous avez dit vampire" à moitié convaincant.
En plus "vénère" et westernien, tu trouveras peut-être ton compte avec le "Vampires" de Carpenter (quoique ça ne soit -loin de là- pas son meilleur film). Plus déjanté encore, tu auras "Une nuit en enfer"...
Ah moins que tu ne succombes devant le très beau et poétique "Morse"... On retrouve d'ailleurs de cette poésie (mais avec le côté amateur qui pourra rebuter) chez Jean Rollin qui a mis en scènes de nombreux vampires.

**Camarade Totoff** Lun 12 Sep 2016 - 13:21

Merci pour tous ces avis ! Je tâcherai de combler un peu des énormes trous que comporte ma culture cinématographique.

Le meilleur vampire à ce jour demeure pour moi Christopher Lee dont j'ai adoré "Le Cauchemar de Dracula".

"Entretiens avec un vampire", je l'avais lu (les trois premiers romans des "Chroniques des Vampires" sont de toute beauté ; ça va moins bien après) et j'ai un soucis avec Tom Cruise mais je tâcherai de passer outre.

Sur "Twilight", je partage l'avis de Séribibi sur le 1er volet notamment parce qu'avec le soin que prend Catherine Hardwicke à filmer les paysages (l'Oregon je crois), elle crée une atmosphère sombre et romantique. Le 2 est niais, nous sommes d'accord et je me suis abstenus de voir la suite. Comme je suis un esprit taquin, j'ai pris l'habitude de dire "Il y a des vampires dans Twilight ?" pour dire que l'accent est nettement mis sur le côté fleur bleue que sur le fantastique.

"Underworld", je le classe dans les catastrophes. C'est du n'importe quoi avec beaucoup de fric et de la pyrotechnique comme scénario. Après avoir vu cette horreur, j'ai pris Kate Beckinsale en grippe...et elle a par la suite confirmée tout le mal que j'en pensais !

Pas d'accoord avec le "Dracula" de Coppola que je trouve bon justement parcequ'il s'en tient au roman. Keanu Reeves n'était peut-être pas le meilleur choix mais Gary Oldman et Wynona Ryder ont emporté ma conviction.

**Estuaire44** Mar 29 Nov 2016 - 16:05

Anne Rice développe un projet d'adaptation de ses Chroniques à la télévision, qui prendraient suite après le film avec Tom Cruise.

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Le très médiocre La Reine des damnés semble oublié, tant mieux, la douce et diaphane Akasha aura droit à une seconde chance.

J'adore les Vampires d'Anne Rice, qui, à mon avis, ont compté largement dans l'écriture d'Angel et de son Clan à la fois sanguinaire et pasionnément romantique, chez Joss Whedon (il y a une bonne part de l'aritocratie et du raffinement pervers de Lestat chez Angelus). J'ai également apprécié les Sorcières de Mayfair et mes bons amis du Talamasca. C'est une grande écrivaine, même si son univers se délaye un tantinet en s'étendant sans cesse. Mais adapter des romans au format télévisuel, c'est une autre affaire, il faudra voir. A suivre !

Bon, allez, je vais me taper une bonne tasse de Viandox chaud.

**Camarade Totoff** Mar 29 Nov 2016 - 19:46

Les premiers volumes des "Chroniques des vampires" sont en effet remarquables par leur esthétisme et la vision tourmentée et flamboyante des vampires. Les "nouvelles chroniques" sont par contre décevantes. La mythologie qu'elle a su développer ("La Grande Famille") est absolument remarquable. C'est une lecture indispensable qui relègue les faux suceurs de sang de T*** au rang de catastrophe industrielle.

Je pense qu'il y avait un côté humoristique à présenter Akasha comme "douce" !

Connais pas "Les sorcières de Mayfair". Encore une référence pour mes futures lectures.

**Estuaire44** Mar 29 Nov 2016 - 20:06

Ah, la Reine fait fondre pas mal de monde ! Laughing

La Saga des Sorcières raconte l'histoire de la famille Mayfair, comportant plusieurs sorcières. Les Mayfair réside dans la même Nouvelle Orléans que Lestat et croise les Vampires dans plusieurs romans (des crossovers en quelque sorte), ainsi que plusieurs autres entités surnaturelles. Cela pourrait ressembler à Charmed, mais cela reste du Anne Rice pur sucre. Le premier roman est Le Lien maléfique, Cela donne un ebonne idée de cette histoire s'étendant sur plusieurs générations. SI on aime les Chroniques, on aura de fortes chances d'apprécier la famille Mayfair ! hein

**Camarade Totoff** Ven 3 Fév 2017 - 13:18

Petite histoire littéraire du vampire

Chapitre I : Le Vampire (1819)

Tout d'abord, l'apparition du "vampire littéraire" procède de plusieurs sources mais, une des principales, c'est l'achèvement de la veine des romans "gothiques" (voir Maurice Lévy, Le roman "gothique" anglais, Bibliothèque de l'Evolution de l'Humanité. Pour lecteurs motivés) qui, durant les cinquante années précédentes ont abreuvé les lecteurs (et lectrices surtout) de moines concupiscents, de manoirs et d'abbayes en ruines, de fantômes et de demoiselles en détresse. Forcément, à un moment, le répétitif devient cliché.

Au XVIIIème siècle, la très paperassière administration des Habsbourg a produit nombre de rapports sur des situations locales étranges et, notamment, l'histoire d'Arnold Paole, soldat autrichien mort en 1727 en Serbie, et qui serait sorti de sa tombe après sa mort. C'est dans ce rapport de 1732 que le mot "vampire" est officialisé.

En 1816, le romantisme se lève en Europe et, sur les bords du Lac Léman, des Anglais en villégiature s'ennuient comme des rats morts à cause de la météo. Ils décident d'écrire des histoires effrayantes. Parmi eux, Mary Shelley, qui écrira Frankenstein en 1818, et John William Polidori.

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John William Polidori (1795-1821) a fait des études de médecine mais il est en Suisse comme secrétaire de Lord Byron. Lui aussi écrit et ce sera Le Vampire (1819). L'histoire est celle d'un certain Lord Ruthven (on note que le vampire est d'emblée associé à l'aristocratie) qui sème des cadavres derrière lui.

Si ce n'est pas exactement la première apparition du vampire en littérature, c'est le premier texte à en populariser le thème. Doté d'un ego assez fort, Polidori vit mal que son texte soit attribué à Byron (plus vendeur !) et, ayant contracté des dettes, il succombe à la "maladie du siècle" : il se suicide.

**Estuaire44** Ven 3 Fév 2017 - 14:09

Merci Camarade, c'est très instructif !

Pour l'anecdote, dans l'actu séries :
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**Estuaire44** Ven 7 Avr 2017 - 16:09

**séribibi** Ven 7 Avr 2017 - 19:24

Durendal qui s'est bien ridiculisé en disant que "Lucy" était un chef-d'oeuvre, que Independence Day 2 était le meilleur film de l'année 2016, et que Scorsese était un metteur en scène quelconque.
No comment.
Quand on voit comment il parle de Twilight (peu importe qu'on apprécie ou non la saga) en affichant un sérieux papal comme s'il faisait une thèse ou qu'il parlait d'un film aux prétentions incroyables, ça fait peur...
Estuaire : on a compris que tu détestais Twilight, ça fait des années que tu nous le répètes régulièrement. Razz

**Dearesttara** Ven 7 Avr 2017 - 20:03

Bien que je ne sois pas grand admirateur de Durendal (que je trouve trop prétentieux), il connaît généralement ses sujets, et son mix d'analyse et d'humour est une réussite. Après, il peut avoir des choix tranchés, allant à l'encontre de l'opinion générale (Pauline Kaël, l'une des plus grandes critiques américaines, s'en était fait une spécialité, même si cela virait souvent à la mauvaise foi)...
Quand il se plante, ben, il se plante pas à moitié, mais totalement, c'est tout. Mais ça marche aussi dans l'autre sens.

Je suis pour qu'on parle avec intelligence de chaque film, quel qu'il soit. Quand je fais un papier pour Marla's Movies, peu m'importe que j'aille voir un film d'auteur américain ou une grasse comédie française, j'aime y déployer la même rigueur, et c'est tout à fait possible.
Le secret tient peut-être dans le proverbe : parler d'un sujet sérieux sérieusement sans se prendre au sérieux.

**séribibi** Ven 7 Avr 2017 - 20:13

Ah mais il faut lui reconnaître ça : il parle très bien, il a une logique d'analyse intéressante et qu'il garde jusqu'à la fin (même si je ne suis presque jamais d'accord avec ce qu'il dit), et sait s'exprimer. Il aborde aussi beaucoup le côté technique, oui mais voilà, beaucoup trop...On a l'impression qu'à chaque fois il s'agit d'un glossaire technique et qu'il fait une analyse de chaque image pendant la projection du film (sur des choses dont souvent on se contrefout), à tel point qu'on se demande si, avec un tel décorticage, il arrive à apprécier le film pour ce qu'il est.
Après on a l'impression qu'il ne s'intéresse qu'aux films faits à partir des années 2000 et ça c'est assez réducteur pour un élève en cinéma (qu'il est, je crois).

**Dearesttara** Ven 7 Avr 2017 - 20:28

Pour les films après les années 2000, c'est malheureusement un choix un peu indispensable si on veut voir de la visibilité. Le grand public connaît surtout le cinéma contemporain (et américain), il va donc logiquement cibler. Oblikon, excellent blog de cinéma, a fait un récent classement des blogs cinéma français les plus lus du net. La liste est ici : [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]

Sans surprise, aucun blog parlant des films d'art et d'essai ou d'études approfondies sur le cinéma (comme l'ultra érudit et excellent[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]) ne s'y trouve. Même chose pour les blogs vidéo (ou "vlogs") cinéma : c'est le public qui fait sa loi. C'est triste, c'est l'air du temps, c'est dommage.

**séribibi** Ven 7 Avr 2017 - 20:34

Après, pour avoir lu certains de ses commentaires, je crois qu'il n'aime pas le cinéma d'avant 2000.

**Estuaire44** Ven 7 Avr 2017 - 23:03

A part celui de Maria, je ne connais quasiment aucun de ces blogs. Les Toiles héroïques, oui, mais c'est parce-qu’il parle aussi largement de séries télé.

**Dearesttara** Ven 7 Avr 2017 - 23:51

Les Toiles héroïques ont encore de beaux jours devant elles, le Marvel Cinematic Universe n'est pas près de se terminer. Oui, un sacré boulot qu'ils font !
A part le blog de Marla (avec un L hein

en référence à la Marla Singer de Fight Club), j'aime beaucoup celui du Bleu du Miroir, très prolifique, et aux papiers souvent intéressants.

**Estuaire44** Sam 8 Avr 2017 - 10:30

Ok, pas de référence à ceci, alors hein

**séribibi** Sam 8 Avr 2017 - 13:10

Parmi les séries qui traitent du vampirisme :
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**Estuaire44** Jeu 4 Mai 2017 - 16:42

Le projet d'Anne Rice se concrétise : Les Chroniques des Vampires vont être adaptées à la télévision. Louis, Armand, Lestat, Akasha... Autant de personnages inoubliables.
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Après La Tour Sombre, American Gods ou encore La Compagnie Noire, la télé tape dans le haut du panier en ce moment ! Shocked

**Philo** Dim 7 Mai 2017 - 20:44

Penny dreadful : Pas mal du tout, seulement finit en queue de poisson.

**Camarade Totoff** Mer 10 Mai 2017 - 14:17

Petite histoire littéraire du vampire

Chapitre II : Le Fanu et Stocker (1871-1897)

Tout au long du XIXè, de multiples récits mettent en scène le vampire sans faire preuve d'une inventivité folle (Gauthier, Dumas côté français) voire en tombant dans le complet contre-sens (Mérimée dans Lokis). En 1845, Alexis Tolstoï publie de son côté La Famille du vourdalak.

La fin du siècle est donc à la fois habitué à la figure du vampire littéraire mais pas tout à fait préparé au double coup de tonnerre qui survient.

En 1871, Joseph Sheridan Le Fanu (1814-1873) publie Carmilla.

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Dans cette histoire, plusieurs originalités. La première, le vampire est une femme. La seconde, elle regrette son état. Le choix de sa victime est, par contre classique, puisqu'il s'agit d'une jeune femme, Laura, mais, du coup, cela devient nettement plus sulfureux puisque la dimension de séduction du vampire demeure. Si le style aujourd'hui désuet de Le Fanu, très emphatique, pourrait laisser croire à un public non averti qu'il s'agit d'une amitié un peu passionnée entre Carmilla et Laura, les contemporains, eux, ne s'y sont pas laissé tromper. N'oublions pas que nous sommes en pleine période victorienne ; un ordre moral puritain est tombé sur l'Angleterre. Ecrire un roman abordant l'homosexualité féminine était donc une certaine attaque contre la société anglaise. Détail : Le Fanu est Irlandais. En tout cas, avec Carmilla, il est le premier à lier vampirisme et lesbianisme. Le cinéma ne l'oubliera pas.

Vingt-cinq plus tard, un autre Irlandais, Abraham "Bram" Stocker (1847-1912) publie la Bible du vampirisme, Dracula (1897).

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Le roman relance complètement le vampirisme littéraire. Mieux ! Il fige, il cristallise la figure du vampire au point que, même encore aujourd'hui, il est difficile de s'en défaire. Le roman demeure le maître-étalon du genre et le principal pourvoyeur du cinéma et de la télévision. L'explication tient à ce que l'auteur a réussi à synthétiser diverses sources tout en s'abreuvant à toute la tradition. Il use d'abord de la forme épistolaire, forme plutôt désuète mais qui a un avantage narratif : tous les personnages parlent de Dracula sauf le vampire lui-même ! Cette absence crée une attirance. Ensuite, Stocker récupère la légende noire d'un personnage historique, Vlad III (1431-1476), prince de Valachie (aujourd'hui province roumaine) et non de Transylvanie. De son vivant, celui-ci était surnommé "L'Empaleur" pour sa propention à user de ce supplice atroce. Une fois mort (assassiné), il fut présenté comme un monstre. Enfin, Stocker parvient par son talent à créer un personnage à la fois séduisant (il accueille avec courtoisie Jonathan Harker et saura séduire Lucy Westenra) et monstrueux. Cette perfection explique la force et la persistance de cette figure litléraire.

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