Série "Adam Adamant Lives !"

Dearesttara a écrit:En plus de la ressemblance de plus en plus systématique entre The Avengers et Adam (quelle autre série s'est autant appuyée sur une autre ?), j'avoue que la mention de Ridley Scott était si soudaine que j'ai eu du mal à y croire !

On est deux ! Je ne savais pas qu'il avait travaillé à la télévision. Par ailleurs, je ne suis pas surpris par le manque de consistance du méchant ; John Carson, que j'ai croisé plusieurs fois dans les productions Hammer, n'est pas, et de loin, le meilleur des acteurs.

The Village of Evil (1-15, *)
Date de diffusion : 06 octobre 1966
Auteur : Vince Powell et Harry Driver

Adam s'offre quelques jours de repos à la campagne en compagnie de Simms, avant d'être rejoint par Georgie. Un meurtre appelle son attention sur un secte satanique regroupant une large partie de la population d'un petit village isolé. Dirigé par le médecin local et la propriétaire de l'auberge, le culte célèbre des messes noires dans le moulin du hameau. Adam va y mettre un terme à sa manière,  tandis que Simms est chargé de veiller sur Georgie.

Un petit village où la population n'est pas ce qu'elle semble et dissimule une sinistre vérité, des héros logé dans une charmante auberge typique, un notable sinistre et violent : même s'il s'agit ici du meunier et non du forgeron, l'épisode du Chapeau Melon visé cette fois-ci est clairement The Town of no Return, un ressenti encore accentué par la propre présence de Juliet Harmer, qui y jouait une antagoniste. On reconnaîtra toutefois à The Village of Evil d'apporter un vrai changement d'atmosphère en substituant la sorcellerie à l'espionnite, même fantaisiste, des Avengers. Ce changement de tonalité, plus marqué que lors des opus précédents reste hélas l'un des rares atouts du récit, avec quelques jolis extérieurs dans la campagne anglaise, des vues elles-mêmes très à la Chapeau melon ! En effet l'ensemble manque singulièrement d'intensité, Adam se contentant de déambuler dans le village en collectant des indices lui tombant tout cuits dans la bouche.

Le scénario présente plusieurs trous massifs, comme l'absence de tout réel plan mis en œuvre par la secte qu'il s'agirait de contrecarrer. Elle est simplement là. La cause du meurtre initial ne se voit jamais explicitée le moins du monde, et le modus operandi ne s'en sort guère mieux. Hormis l'impressionnante meule du moulin demeure l'unique élément de décor quelque peu saillant, tandis que la fade mise en scène et l'interprétation échouent totalement à créer une atmosphère inquiétante, d'où un pénible contraste avec les dialogues surchargés d'Adam. Une originalité est apportée quand, pour la toute première fois, Simms parvient à empêcher Georgie de se mêler de l'affaire, mais cela passe par une telle succession de scènes peu pétillantes (jeu de fléchettes, de cartes, papotage, participation à une messe...) que cela s'assimile avant tout à du remplissage.



Les scènes en extérieur furent tournées dans le pittoresque village de Cobham, dans le Surrey. Il s'agit d'un site très ancien, figurant dans le Domesday Book de 1086. L'acteur Antonio Banderas y réside depuis 2020.

L'épisode Ticket to Terror (1-14) est le seul disparu de la saison 1. Adam y enquête sur la disparition de 400 passagers d'une du métro londonien, dont Simms fait partie. Il n'en reste plus que des squelettes, du moins en apparence. Les passagers sont en fait forcés de creuser un tunnel menant aux coffres de la Banque d'Angleterre.

D for Destruction (1-16, ****)
Date de diffusion : 13 octobre 1966
Auteur : Tony Williamson

Depuis 1895, Adam Adamant est le colonel d'un régiment de cavalerie, charge dont il n'a jamais été officiellement relevé. Une succession de mystérieux décès survenant dans son ancienne unité, il reprend du service à la demande du Général Mongerson, avec un rang surpassant celui de l'actuel colonel. Celui-ci a l'esprit dérangé et espère éviter la dissolution du régiment en exerçant un chantage nucléaire. Il projette de s'emparer de missiles atomiques et de bluffer en menaçant de cibler le 10, Downing Street. Mais le véritable cerveau est son sinistre sergent, aux visées bien plus crapuleuses.

Avec une relative originalité, Adam Adamant Lives ! boucle sa première saison en ne pompant pas un épisode de la saison 4 de Chapeau Melon, mais un de la saison 33 (on ne se refait pas). En l'occurrence Esprit de Corps, dont on retrouve l'environnement militaire, que les Avengers retrouveront dans The Morning After et Dirtier By The Dozen, couplé à un projet totalement, le bombardement nucléaire du 10, Downing Street se substituant ici à l'installation de Mrs Gale sur le Trône d'Angleterre. Cette inspiration d'une saison précédente déteint sans doute sur le récit car celui-ci ne présente pas la surchauffe parfois présente lors des opus précédents. On s'en tient à un thriller militaire de fort bonne facture, mais relativement classique en soi.Parfaitement maîtrises la tension et le suspense vont toujours croissants, jusqu'à un affrontement final plus spectaculaire qu'à l'accoutumée. Cela n’empêche pas l'humour d'être présent, par les dialogues ou l'uniforme ridiculement hors d'âge d'Adam, mais aussi par le succès canaille de Georgie auprès de la garnison, telle Polly dans la base polaire de The Tenth Planet.

Sauf que Georgiana ne demeure en rien passive, sauvant Adam après sa capture ou se muant en Pasionaria haranguant les soldats jusqu'à ce qu'ils assaillent les traîtres! Le tout se voit porté par la mise en scène une nouvelle fois imaginative de Moira Amstrong, qui excelle décidément à apporter toute une atmosphère aux scènes nocturnes. Les personnages se voient dépeints avec soin, en différenciant le colonel et l'abominable sergent, caricature inversée des valeurs militaires. L'attraction demeure toutefois la prestation d'un Patrick Troughton sur le point de prendre possession du TARDIS et qui apporte enfin une vraie saveur à un rôle d'autorité (et sans flûte, dieux du ciel, sans cette p... de flûte). Le rôle reste relativement bref, il s'agit du traditionnel appel à Adam, cette fois martial, mais il en fait un moment mémorable. Épisode solide et prenant de bout en bout, D for Destruction apporte un appréciable final à une saison souvent surprenante et audacieuse dans ses partis pris, faisant d'Adam Adamant une authentique curiosité au sein des séries d'aventure de l'époque.



Les scènes nocturnes se déroulant dans la garnison furent tournées dans la ville militaire d'Aldershot, située dans le Hampshire. Fondée en 1854, elle est depuis lors le siège central de l'armée d'Angleterre, contenant son grand quartier général et plusieurs unités de commandement, dont celle de la logistique. Ses effectifs culminent à 10 000 personnes. Ses installations apparaissent dans de nombreux films, dont Captain America : First Avenger.

Le Général Mongerson fut le tout dernier rôle tenu par Patrick Troughton avant qu'il ne prenne la relève de William Hartnell à bord du TARDIS. La première Régénération du Docteur survint le 29 octobre 1966, deux semaines après la diffusion de D for Destruction.

Quand le sergent ouvre la porte du bureau du colonel, on distingue un membre de l'équipe de tournage se retirer à toute vitesse du champ de vision.

Georgie achève la saison en ayant la surprise d'avoir le Premier ministre du Royaume-Uni au téléphone. Dépeint comme ayant avant tout le souci de préserver la population, au moment de la diffusion de l'épisode il s'agit d'Harold Wilson (1964-1970 puis 1974-1976). En dépit de difficultés économiques persistantes, cette figure historique du Parti travailliste connaît une forte popularité personnelle, encore rehaussée par la victoire au Mondial anglais de juillet 1966. En 1967, sa candidature à la CEE sera contrecarrée par le veto du Général.

L'épisode est le dernier de la saison 1. La saison 2 sera beaucoup plus rapidement traitée car seuls deux épisodes en sont parvenus jusqu'à nous ! D for Destruction fut lui-même un épisode longtemps  considéré comme perdu, avant qu'une copie n'en soit retrouvée de manière totalement fortuite dans les archives de la BBC, en 2003.

Black Echo (2-02, ****)
Date de diffusion : 07 janvier 1967
Auteur : Derek Ford & Donald Ford

La Banque d'Angleterre fait appel à Adam Damant quand  une dame très âgée affirme être la Duchesse Militza, aristocrate russe en exil. Elle a une fortune en or déposée dans les coffres de la banque et en exige restitution. Il est demandé à Adam, qui l'a jadis connue, de confirmer son identité. Mais un indice alerte Adam et Georgie : un livreur de mazout a été retrouvé errant totalement fou après avoir effectué une livraison au château de la Duchesse. Adam reconnaît en elle Louise, son ex-fiancée l'ayant naguère trahi pour The Face. Celui-ci s'zst effectivement éveillé d'un sommeil cryogénique a monté cette arnaque pour reconstituer son empire. Il s'échappe avec Ireyna, sa nouvelle favorite, après avoir causé assassiné la désormais inutile Louise. Celle-ci meurt dans les bras d'Adam.

L'épisode n'évite pas quelques biais scénaristiques embarrassants, comme le fait qu'il faille tout un artifice rocambolesque à Adam pour qu'il reconnaisse enfin Louise ou par le fait que le gang n'ait rien tenté pour retenir le livreur ayant si aisément pénétré dans l'antre de The Face (la porte d'entrée était restée ouverte...), ou que la police venue enquêter n'ait pas vu le sarcophage trônant en évidence dans la cave avant et après l'événement. Mais cette naïveté typique de l'époque s'accompagne d'une vraie habilité. Ainsi le récit débute-t-il très classiquement avec l'appel d'autorités au célèbre Adam Adamant, avant de se poursuivre de manière somme toute habituelle jusqu'à mi parcours. Cela ne fait qu'accentuer l'effet de surprise quand l'on comprend la total rupture de ton qu'il apporte, concluant l'arc de Louise et modifiant tout le paradigme d'une série où l'on ne reverra plus la récurrente séquence onirique des rêves d'Adam.

Ce vrai choc ne représente pas le seul intérêt de l'épisode, l'empathie entremêlée de nostalgie (pour une époque défunte autant que pour leur propre jeunesse) s'instaurant entre Louise et Adam apporte une vraie sensibilité aux dialogues. Gerald Harper s'extraie avec succès de son registre habituel et trouve une partenaire de choix en la personne de Gladys Cooper. D'ailleurs cette grande figure du théâtre anglais annonce de manière surprenante son rôle de Grande Duchesse Anna Sergeievna Ozerov dans L'Héritage Ozerov d'Amicalement vôtre. Judy Parfitt incarne la diabolique Ireyna avec son talent bien connu des amateurs des Avengers. Mais le clou du spectacle demeure bien l'apparition de The Face avec Ireyna, une scène très théâtralisée, gothique en diable, avec des dialogues mégalomanes absolument gouleyants. On est au spectacle lors de ce numéro évoquant effectivement le Maître chez Doctor Who (option classique), l'un des moments les plus marquants de la série. De quoi pardonner l'absence bien pratique de glace dans son sarcophage !



Les frères  Derek et Donald Ford formaient un duo d'auteurs spécialisés dans le thriller et l'horreur (The Black Torment, A Study in Terror), avant de faire carrière dans les films érotiques de Sexploitation durant les années 70. Quentin Tarantino s'est déclaré grand fan de leur film le plus connu, The Sexplorer (1975).

La production de la deuxième saison fut lancée dans la foulée de la première, son pilote sera diffusé à peine deux mois et demi après D for Destruction, le 31 décembre 1966. Coécrit par Tony Williamson et Brian Clemens, A Slight Case of Reincarnation mettait en scène les premiers signes du retour de The Face. La saison allait allait alterner les épisodes isolés et ceux où Adam affronte son ennemi juré.  

La décision d'installer un fil rouge fut prise tardivement et les frères Ford durent réécrire en urgence leur script en suivant les indications de la supervision des scénarios. Leur première version voyait la Duchesse être à la tête d'une secte d’adorateurs de Raspoutine, qui prévoyait de financer un coup d'état en URSS pour rétablir les Tsars. L'histoire prévoyait des éléments purement fantastiques, comme l'invocation de démons.

Mede Hall House, le manoir gothique de The Face, est en réalité Swakeleys House. Situé à l'ouest de Londres, l'édifice fut construit en 1638, comme résidence du Maire de la capitale. Après un long déclin, il a connu une importante restauration durant les années 80.

A Sinister Sort of Service (2-13, ***)
Date de diffusion : 25 mars 1967
Auteur : Tony Williamson  

Durant la fête organisée par Georgie pour son centième anniversaire, Adam reçoit la visite de sir Nigel Dee. Celui-ci lui demande d'intervenir pour mettre fin à une vague de hold-ups hyper efficaces touchant Londres. Adam découvre qu'une société de sécurité, Security Service, a mis au point un ordinateur révolutionnaire capable de prédire les actions des citoyens. Son dirigeant mégalomane s'en sert pour mettre au point des attaques infaillibles, mais n'est lui-même que l'homme de main de The Face, véritable inventeur de la machine infernale.

Situé à l'extrémité d'une saison 2 que l'on n'aura fait qu'entrapercevoir, ce final confirme un relatif atterrissage d'Adam Adamant dans les contrées du Formula Show. Certains rituels (la visite de l'envoyé de Whitehall, Adam refusant toute aide de Georgie, qui parvient à s'incruster, Adam proie de viles séductrices) occupent beaucoup de temps et apparaissent inchangés depuis le tout début de la série et surtout semblent peu vraisemblable. Adam devrait au moins se méfier a minima des jolis minois et intégrer que Georgiana se montre souvent d'une assistance précieuse. Évidemment les emprunts à Chapeau melon répondent toujours à l'appel également, avec cette fois The Big Thinker dans le viseur. On peut aussi regretter que la machine se montre inexplicablement inefficace contre Adam. Autant d'éléments qui viennent minorer la belle imagination dont la série continue à faire preuve par ailleurs.En effet Tony Williamson réussit un joli coup, car son idée coordinateur prédictif et servant à planifier des crimes  annonce avec beaucoup d'avance celle de l'excellent film Minority Report, de Steven Spielberg. Certes, la nouvelle de Dick remonte aux années 50... Mais ne chipotons pas.

Hélas, tout comme pour les War Machines du Docteur et son intuition de l'Internet, le sujet n'est que là que comme prétexte, on en revient vite à la figure classique du Maître Plan à contrecarrer. Les personnages secondaires se montrent par contrent très amusants et nous valent au moins un bon divertissement pour conclure la série. sir Nigel est toujours une aimable et sympathique nullité, tandis que The Face y va toujours à fond le guidon sur le registre de l'abominable vengeance. Surtout Georgie et Simms mènent une vraie enquête en commun, avec de pétillants dialogues mettant en valeur leurs amicales chamailleries. La fête d'anniversaire compose un moment particulièrement joyeux, où chaque membre du fin trio se montre à son meilleur niveau, une jolie manière de leur dire au revoir ! Mais Adam Adamant Lives ! ne serait pas Adam Adamant Lives ! sans ces moments de pure bizarrerie ayant pimenté son parcours. Le final se montre assez gratiné là-dessus, avec les membres de Security Services (SS...) grimés en Nazis et se saluant avec le salut hitlérien sans que cela ne trouble personne. Une série décidément étrange à ses heures mais si souvent amusante : so long Adam et Georgie !



David Garth reprend son rôle de sir Nigel Dee, déjà vu dans Death by Appointment Only, en saison  1. Il s'agit de l'unique fois où l'on revoit l'un des commanditaires d'Adam, la série ayant toujours préféré jouer la carte de la variété plutôt que d'instituer un vrai supérieur à Adam.  

Le réseau de communication de Security Service se nomme Channel D, un clin d’œil à The Man From UNCLE, où il en va de même pour le célèbre service pas si secret. " Open Channel D !" est d'ailleurs la catchphrase de cette série.

Le limerick imaginé par Simms pour l'anniversaire d'Adam a été écrit par Dick Vosburgh, comme tous les autres entendus au fil de la série. A la fois acteur et auteur de nombreux dialogues humoristiques pour la BBC radio et télévision, il fut aussi un collaborateur des Monty Pythons.

Adam reçoit un télégramme de la Reine à l'occasion de son centième anniversaire. La BBC transmit au préalable ce texte, lu par Georgie, au Palais de Buckingham, afin d'obtenir son visa.

L'épisode sera longtemps considéré comme perdu, avant qu'une copie n'en soit retrouvée lors d'un déménagement de locaux de la BBC, en 1988.

Williamson réutilisera l'idée de crimes conçus par ordinateur lors de l'épisode Deadly Line in Digits, de Jason King (1971)

L'épisode est le dernier de la série, mais sans qu'y survienne d'élément particulier, hormis le centième anniversaire d'Adam. Une saison 3 étant alors fortement envisagée, il n'a effectivement pas du tout été conçu comme un final. Les causes de cette annulation soudaine ne sont pas connues avec certitude, ont été évoquées une déception globale de Verity Lambert et Sydney Newman vis-à-vis de la saison 2, mais aussi l'absence de vente persistante à un diffuseur américain, ce qui constituait l'un des objectifs de la BBC.

Grand merci pour nous avoir fait découvrir une série dont le nom ne cesse de revenir dès qu'on s'intéresse aux années 60 mais sans jamais creuser plus loin. C'est donc un manque qui a été brillamment comblé. Merci encore !