Série "Game of Thrones"

Vu Spoilers of War et il se confirme qu’il est plus malaisé de chroniquer un feuilleton qu’une série classique. Les épisodes de cette dernière constituent en effet bien davantage des individualités que dans le cadre de GoT, où j’ai déjà l’impression de pointer les mêmes faiblesses à chaque fois. De nouveau l’attention se concentre ici sur la méga baston du jour, tant les scènes de dialogues la précédant s’avèrent fades ou creuses. Tous ceux qui faisaient du langage une arme aussi effilée que l’acier valyrien on se retrouve donc logiquement avec des scènes brassant de l’air, ou jouant toute honte bue la carte du mélodrame. On assiste à une énième retrouvaille à Winterfell, le procédé est devenu si répétitif qu’il ne peut que s’émousser. De même l’entrainement à l’épée entre Arya et Brienne est un amas de poncifs, que les protagonistes soient féminins n’y change rien. On ne regarde pas GoT pour ça, de même pour les soliloques cryptiques du devin, ennuyeux à périr. La scène entre Cersei et le banquier résulte davantage relevée (Mark Gatiss impérial), mais ils ne font en définitive que rabâcher des éléments déjà connus, signe infaillible que le scénariste est en train de meubler.

Par contre la bataille entre Lions et Dragon tient toutes se promesses, tant elle s’avère somptueuses filmée et impeccablement narrée. Le réalisme se voit parfois sacrifié au profit de la progression dramatique mais peu importe. Certes la machine anti dragon de Qyburn est actionnée bien trop tardivement  et si Dany peut à volonté déplacer aussi aisément une telle masse d’armée, on se demande bien pourquoi le siège de PortRéal n’a pas encore débuté (au sein de la logistique médiévale tout cela n’a aucun sens, mais je ne vais pas me répéter). Le dragon de Dany se montre absolument terrifiant (plus encore que Smaug, ai-je trouvé) et les combats épiques abondent jusqu’à l’haletant final où Jaime se montre à son meilleur, en digne chevalier des contes et légendes. Ce triomphe de narration et de mise en scène tombe à pic pour nous rassurer sur le potentiel de la série en ce domaine, après une bataille navale foirée et deux affrontements terrestres trop expéditifs.

Quelques bonnes idées viennent encore relever le tout, comme la présence de Tyrion, inutile militairement mais précieuse dramatiquement, ou la roborative amitié virile entre Jaime et Bronn, que la série a eu visiblement l’excellente idée de faire revenir, contrairement aux livres jusqu’ici. Le voir avoir la même complicité entre les deux frères Lannister est réellement sympathique, de même que l’option de montrer les Lions en positon sympathique face à l’horreur dans laquelle s’acharne inutilement  Dany, même après une victoire assurée. Ce retournement de situation est agréablement surprenant, tout comme le fait que cet épisode sanglant entre tous ne voit en définitive la mort d’aucun personnage ! Jaime Lannister, l’un des protagonistes les plus riches et passionnants des livres comme de la série a visiblement encore une histoire à raconter, tant mieux !

Eastwatch, ou sans doute aucun l’épisode le plus faible de la saison à ce jour. Ne serait-ce que budgétairement, et pour éviter toute comparaison directe forcément risquée, on comprend que les auteurs n’aient cette fois inséré aucune bataille, après la spectaculaire débauche de moyens lors de l’opus précédent. Mais du coup, avec un épisode quasi exclusivement composé de scènes de dialogues, GoT montre vraiment la misère. La majeure partie du récit est dédié à des contorsions capillotractées au possible pour justifier que tous les bretteurs disponibles se retrouvent a bon endroit au bon moment pour accompagner Jon dans on expédition (l’épisode prochain on va se la jouer RPG, ADD nous voici).

Comme exemples bien foireux j’ai noté le plan de Tyrion hyper improbable et dangereux pour convaincre sa sœur de l’existence des Zombies, elle qui en a précisément un comme garde du corps depuis un bail (merci Qyburn). Idem pour le retour de Jorah, c’est bien simple entre chaque épisode il a franchi ou un continent ou un océan (de la Baie à Villevieille, puis à Peydredragon), c’est le Flash le gars. Et puis le triangle amoureux avec Jon et Dany, on s’en cogne, on ne regarde pas GoT pour ça.  Il aussi grand temps que Sam quitte la citadelle, car le procédé le voyant toujours tomber à pic sur le bouquin dont les gentils ont besoin devient ridicule à force de répétition (l’obsidienne, puis la guérison de Jorah, puis le secret de l’ascendance de Jon…) n’en jetez plus !

Il ne se passe toujours rien à Winterfell, devenu la Citadelle de l’Ennui, on en est à inventer une rivalité bidon entre les sœurs Stark, à laquelle personne ne peut croire, tandis que depuis cinq épisodes Baelish nous fait le catalogue des posture brevetées de félon, sans avancer d’un pouce. De toutes manières, la série s’est mise dans un cul de sac en déportant Jon à Peyredragon. Dans le Nord c’est réglé, le vainqueur c’est lui et les autres ne sont plus que périphériques dans la lutte dans le Trône de Fer. Winterfell ne sert plus qu’à meubler pour atteindre les 50 min réglementaires.

Au niveau des satisfaction, les retrouvailles entre Jaime et Tyrion tiennent globalement leurs promesses, mais la saison use et abuse du procédé visant à faire se retrouver des personnages longtemps séparés, tout ceci devient très prévisible. Par conte l’intrigue opère un rééquilibrage intéressant entre des Lannister désormais moins pervers (Jaime mais aussi une Cersei ne manquant pas de courage devant l’adversité) et une Daenerys toujours plus impérieuse et impitoyable, ne dissimulant plus son égo messianique. La scène où elle brûle vif  un père et un fils prisonniers de guerre et refusant de ployer le genou demeure la plus forte de l’opus, elle entrouvre tout une nouvelle perspective sur ce qui est réellement en train d’advenir à Westeros.

Beyond the Wall s'est révélé un épisode agréable à suivre, avant tout pour la mise en scène toujours somptueuse et spectaculaire. GoT sait pleinement épouser le souffle épique de la Fantasy, lors d'une bataille une nouvelle fois plus grande que la vie. Outre le combat des Magnificent Seven contre la horde du Night King le récit se montre agréable par les doubles lectures qu’il utilise. Ainsi on peut voir l’épisode comme un Walking Dead Alaska et la fameuse batte à fer barbelé fait piètre figure devant l’arsenal médiéval des héros. On peut aussi s’amuser à découvrir une nouvelle mission suicide après Rogue One et Suicide Squad, décidément cela devient un sous-genre.

Perso, mon passé de rôliste m’a fait considérer l’action comme une partie d’ADD, la série passant du Wargame inégal au JDR assumé. Une fois que l’on a cela en tête on s’amuse bien et on entend comme rouler les dés : l’épée flamboyante ++2 - mort vivant +4, la gestion des mouvements, l’erreur de n’avoir composé le groupe qu’avec des chevaliers et aucun lanceur de sortilèges (Mélisandre aurait été bath pour cramer du streum), etc. Bref, J’ai passé une bonne soirée revival de la grande époque on l’on s’amusait entre copains autour d’une table, de quelques feuilles de papier et d’une poignée de dés (bon d’accord, il y avait aussi du soda et des chips). C’était les 80’s, bien avant l’Internet et les jeux en réseau.

Par contre, ici comme ailleurs, l’épisode subit de plein fouet une erreur majeure commise par les auteurs de GoT : n’avoir pas assez intégré ce que signifiait la réduction de volume de la saison. Au lieu d’avoir épuré l’action en profondeur, ils se contentent de la tasser pour faire tenir 10 épisodes en 7, ce qui ne va pas sans dégâts. Ainsi la rapidité absurdement élevée des déplacements se propage, il faut ici simplement une poignée d’heures à un moineau pour aller d’au-delà du Mur jusqu’à Peyredragon (on a aussi récupéré les Parchemins de Téléportation dans ADD, ou quoi?), les dragons directement trouvent le groupe au sein de l’immensité du vrai Nord, etc. Le rythme démentiel des évènements conduit à introduire de trop nombreux twists ou scènes chocs au sein d’un épisode, jusqu’à saturation du spectateur, pour qui trop d’évènements tue l’évènement.

Ces scènes deviennent également souvent schématiques, de même que l’évolution psychologique des personnages. Le caractère force de la romance entre Jon et Dany la rabat ainsi au niveau d’un cliché, malgré une excellente interprétation. Le retour tant attendu de l’oncle se résume à une galipette… On pourrait multiplier les exemples. Cette réduction de voilure insuffisamment pensée se montre d’autant énervante que l’on conserve les scènes inutiles et absolument pas crédibles du risible drama de Winterfell. Les auteurs veulent tout conserver et refusent de faire des choix, ce qui est une faute chez un scénariste.

Au total la saison 7 aura terriblement perdu en crédibilité et en subtilité vis-à-vis des romans, mais aussi de ce que j'ai perçu des premières années de la série. Le final bénéficiera toutefois d’un format allongé, on peut donc espérer que la faiblesse structurelle de cette période de bourrage intense s’y fasse moins ressentir.

Oui, son titre vient d'être révélé : The Dragon and the Wolf, écrit par les deux showrunners, comme il se doit. Ce sera le plus long épisode de GoT à ce jour, avec 80 min au lieu de 50. J'espère que cela permettra de poser un peu l'histoire, pas seulement ajouter encore plus de baston. ceci dit il est très possible qu'il montre l'assaut du Mur par la horde du Night King, soit un évènement attendu depuis six ans par les spectateurs de l'histoire et depuis 20 ans par nous autres lecteurs des romans. Adonc, JE SUIS UN POIL IMPATIENT.

Record pour le final, qui m'a personnellement déçu car reprenant tous les défauts de la saison (je ne vais pas ressasser). Le pire reste la mort de grotesque de Littlefinger, repoussé artificiellement jusque là uniquement pour qu'il y ait un mort connu en fin de saison. Ce ne sont plus des ficelles, mais des câbles d'acier. Sans la richesse du support des romans, la série apparaît décidément en déclin.

http://www.ozap.com/actu/audiences-us-carton-historique-pour-le-final-de-game-of-thrones/535312

Game of Thrones sans dragons ? Impossible me direz-vous. Et pourtant...
http://braindamaged.fr/2017/08/26/game-of-thrones-george-r-r-martin-navait-pas-prevus-de-dragons-au-depart/

C'est confirmé pour le report  de Game of Thrones à 2019
https://culturebox.francetvinfo.fr/series-tv/pas-de-game-of-thrones-en-2018-267583#xtatc=INT-44

En fait, la vraie devise de la série devrait être "Tout vient à point à qui sait attendre" !