Saga "Poe par Corman"
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CHAPEAU MELON ET BOTTES DE CUIR - LE MONDE DES AVENGERS :: Les SÉRIES TÉLÉ, FILMS, ACTEURS, ACTRICES & autres Artistes :: Les Films
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Estuaire44- Empereur
- Date d'inscription : 10/04/2007
Re: Saga "Poe par Corman"
La tombe de Ligeia (The tomb of Ligeia, 1964)
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Résumé
Hanté par le souvenir de sa défunte épouse Ligeia, qui l’a assuré de son retour, Verden Fell retrouve un peu de joie de vivre quand il rencontre la belle lady Rowena. Mais il semblerait que Ligeia n’approuve pas ce remariage.
Critique
Absolument brillant, ce dernier film « Poe par Corman », entièrement tourné en Angleterre, et qui, cas unique dans la saga, jouit de beaux extérieurs est une quintessence de fantastique et d’horreur ; une brillante mise en image de Poe. Roger Corman qualifiera ce film de la plus grande et la plus excitante adaptation de Poe et il a mille fois raison.
Dès le départ, le spectateur n’est pas dans une situation normale. L’enterrement de Ligeia se déroule dans les ruines d’une abbaye (l’Angleterre en compte beaucoup depuis Henri VIII et elles ont largement inspiré le courant gothique, et la Hammer par la suite) et un prêtre fulmine contre la défunte qui « n’était pas chrétienne ». Ses derniers mots sont, en effet, hautement blasphématoires ! Roger Corman a choisi cette abbaye car il cherchait « une approche typiquement gothique ». Et, pour ajouter à l’atmosphère, lugubre d’entrée de jeu, un chat noir saute sur le cercueil ! Cet animal va jouer un rôle central dans ce qui suivra alors que c’est un ajout ! Mais il symbolise parfaitement les forces obscures.
Le film peut être vu comme un drame romantique, au sens littéraire du terme ; c’est-à-dire que l’issue fatale est prévisible d’entrée de jeu mais que les protagonistes vont s’échiner à combattre cette fatalitas. Et le spectateur y croira, et jusqu’au bout ! Ainsi, si Verden Fell est sinistre à souhait avec son costume et ses lunettes noires (notons qu’il n’aime pas la lumière du soleil rejoignant ainsi la longue cohorte des malades de Poe), il arrive pourtant à plaire à lady Rowena qui saisit le premier prétexte pour le revoir. Au moment où l’atmosphère allait devenir romantique, au sens sentimental du terme cette fois, le chat survient à nouveau ! Avec un redoutable sens du tempo, Roger Corman va ainsi lancer plusieurs séquences heureuses puis les briser consciencieusement. Elles seront d’ailleurs de plus en plus courtes et l’ombre de plus en plus pesante.
Comme dans La malédiction d’Arkham, le couple vedette envisagera de quitter le lieu malsain (maléfique ?) mais en sera empêché. Là encore, un dîner va se terminer en drame. Une innocente séance d’hypnotisme (qui renvoie, ainsi que la conversation sur Messmer, à L’Empire de la terreur) tourne au cauchemar quand Rowena se met à parler avec la voix et les mots de Ligeia ! La séquence onirique qui suit, et Corman est un maître dans le cauchemar à la Füssli (voir L’enterré vivant notamment), est assez dure par sa (fausse) lenteur alors que résonne les feulements du chat (toujours lui !).Ce film est une quintessence de "Poe par Corman" !
N’y tenant plus, le juriste Christopher (le jeune premier peu charismatique qui sert à faire tapisserie, confident de l’héroïne, pseudo-antagoniste de Vincent Price) ouvre la tombe de Ligeia. On laissera au spectateur curieux le soin de savoir ce qu’il y trouve. Cette profanation/exhumation lance en tout cas un final éprouvant ; sans doute un des plus durs et des plus cruels de Corman. Le fantastique toque à la porte ou est-ce la folie ? Les fleurs blanches sont-elles devenues rouges ? Rowena est-elle bien poursuivie par le chat noir et trouve-t-elle un escalier derrière un miroir ? (rien que ça, c’est puissant comme symbole). Est-on donc dans le rêve éveillé, le cauchemar partagé ? La vérité sort-t-elle de la bouche du domestique ? Elle expliquerait beaucoup de choses oui mais, à moins que Verden ne soit fou (il ne l’exclut pas lui-même), pas ce qui se relève. Comme souvent chez Poe, c’est le feu qui met fin au cauchemar (est-ce qu’il détruit ou est-ce qu’il purifie ? On a rarement autant de lumière que dans un incendie). Mais, finalement, qui ouvre les yeux ?
Le film compte quatre interprètes mais on ne s’attardera pas sur ceux du domestique et de Christopher car tout le drame se concentre sur le couple Vincent Price/Elizabeth Shepherd. L’un comme l’autre sont éblouissants. Vincent Price réussit à donner de la fragilité à Verden Fell qu’on a sincèrement envie de plaindre. A la différence d’un Roderick Usher qui se complaisait dans sa morbidité, Verden en a assez de sa morosité et Rowena lui apporte la chaleur qui lui manquait depuis la mort de Ligeia. Il conserve cependant sa capacité d’inquiéter et la possibilité qu’il soit fou taraude le spectateur rapidement et de plus en plus. Elizabeth Shepherd commence comme une jeune lady insouciante mais pas idiote (Jane Austen l’aurait adoré) et elle est très crédible dans son jeu de séduction car c’est bien la jeune femme qui fait le premier pas ! Par la suite, on craint pour sa santé mentale (devient-elle folle ou est-elle vraiment victime ? De quoi d’ailleurs ? De malveillance ou de maléfices ?) et pour sa vie également. Comment, en la voyant s’acharner à combattre l’ombre de Ligeia (sinon Ligeia elle-même) ne pas songer à Rebecca, cet autre fantôme qui refuse qu’on la remplace ?
Anecdotes :
Scénario : Robert Towne. C’est une adaptation quasi-littérale sauf en ce qui concerne le caractère de Verden qui, chez Poe, haïe sa seconde femme.
Dernière des huit adaptations de Poe par Corman.
Le tournage dura 25 jours au lieu des 15 prévus. Roger Corman attribuera cette différence à l’obsession des Anglais pour la pause-thé.
L'extérieur du bâtiment est un véritable bâtiment, il s'agit du prieuré de Castle Acre à Norfolk, au Royaume-Uni, qui est un monument du patrimoine national et est toujours ouvert au public. Les fausses parties du décor ajoutées juste pour le film incluent les pierres tombales vues parmi les ruines et la partie la plus haute de l'aile résidentielle (la partie qui prend feu en premier) qui n’existe pas dans la réalité.
Les titres proposés comprenaient « La maison du bout du monde » et « Le tombeau du chat ».
La séquence de rêve semble être tournée au ralenti, mais si vous regardez attentivement, vous verrez qu'elle a été filmée à vitesse normale, les acteurs se déplaçant simplement lentement. Corman a fait cela délibérément pour donner à la scène un air supplémentaire d'irréalité.
Elizabeth Shepherd/Rowena : actrice anglaise, vue à la télévision dans Emergency-Ward 10 (1960), Destination danger (1966), Crown Court (1983), Les aventures de Shirley Holmes (15 épisodes, 1997-1998), New York Unité spéciale (2009) ; au cinéma dans Commando de la mort (1970), Damien : la malédiction II (1978)
John Westbrook/Christopher Gough : acteur anglaise (1922-1989), vu au cinéma dans Les chemins de la haute ville (1958), Les clés de la citadelle (1962), Le seigneur des anneaux (voix, 1978), Les loups de haute mer (1980). il a participé au film Le masque de la mort rouge sans être crédité.
Oliver Johnston/Kenrick : acteur anglaise (1888-1966), vu au cinéma dans La vie d’une autre (1939), Un roi à New York (1957), La comtesse de Hong Kong (1967) ; à la télévision dans The Quatermass Experiment (1953), Destination danger (1966).
Hanté par le souvenir de sa défunte épouse Ligeia, qui l’a assuré de son retour, Verden Fell retrouve un peu de joie de vivre quand il rencontre la belle lady Rowena. Mais il semblerait que Ligeia n’approuve pas ce remariage.
Critique
Absolument brillant, ce dernier film « Poe par Corman », entièrement tourné en Angleterre, et qui, cas unique dans la saga, jouit de beaux extérieurs est une quintessence de fantastique et d’horreur ; une brillante mise en image de Poe. Roger Corman qualifiera ce film de la plus grande et la plus excitante adaptation de Poe et il a mille fois raison.
Dès le départ, le spectateur n’est pas dans une situation normale. L’enterrement de Ligeia se déroule dans les ruines d’une abbaye (l’Angleterre en compte beaucoup depuis Henri VIII et elles ont largement inspiré le courant gothique, et la Hammer par la suite) et un prêtre fulmine contre la défunte qui « n’était pas chrétienne ». Ses derniers mots sont, en effet, hautement blasphématoires ! Roger Corman a choisi cette abbaye car il cherchait « une approche typiquement gothique ». Et, pour ajouter à l’atmosphère, lugubre d’entrée de jeu, un chat noir saute sur le cercueil ! Cet animal va jouer un rôle central dans ce qui suivra alors que c’est un ajout ! Mais il symbolise parfaitement les forces obscures.
Le film peut être vu comme un drame romantique, au sens littéraire du terme ; c’est-à-dire que l’issue fatale est prévisible d’entrée de jeu mais que les protagonistes vont s’échiner à combattre cette fatalitas. Et le spectateur y croira, et jusqu’au bout ! Ainsi, si Verden Fell est sinistre à souhait avec son costume et ses lunettes noires (notons qu’il n’aime pas la lumière du soleil rejoignant ainsi la longue cohorte des malades de Poe), il arrive pourtant à plaire à lady Rowena qui saisit le premier prétexte pour le revoir. Au moment où l’atmosphère allait devenir romantique, au sens sentimental du terme cette fois, le chat survient à nouveau ! Avec un redoutable sens du tempo, Roger Corman va ainsi lancer plusieurs séquences heureuses puis les briser consciencieusement. Elles seront d’ailleurs de plus en plus courtes et l’ombre de plus en plus pesante.
Comme dans La malédiction d’Arkham, le couple vedette envisagera de quitter le lieu malsain (maléfique ?) mais en sera empêché. Là encore, un dîner va se terminer en drame. Une innocente séance d’hypnotisme (qui renvoie, ainsi que la conversation sur Messmer, à L’Empire de la terreur) tourne au cauchemar quand Rowena se met à parler avec la voix et les mots de Ligeia ! La séquence onirique qui suit, et Corman est un maître dans le cauchemar à la Füssli (voir L’enterré vivant notamment), est assez dure par sa (fausse) lenteur alors que résonne les feulements du chat (toujours lui !).Ce film est une quintessence de "Poe par Corman" !
N’y tenant plus, le juriste Christopher (le jeune premier peu charismatique qui sert à faire tapisserie, confident de l’héroïne, pseudo-antagoniste de Vincent Price) ouvre la tombe de Ligeia. On laissera au spectateur curieux le soin de savoir ce qu’il y trouve. Cette profanation/exhumation lance en tout cas un final éprouvant ; sans doute un des plus durs et des plus cruels de Corman. Le fantastique toque à la porte ou est-ce la folie ? Les fleurs blanches sont-elles devenues rouges ? Rowena est-elle bien poursuivie par le chat noir et trouve-t-elle un escalier derrière un miroir ? (rien que ça, c’est puissant comme symbole). Est-on donc dans le rêve éveillé, le cauchemar partagé ? La vérité sort-t-elle de la bouche du domestique ? Elle expliquerait beaucoup de choses oui mais, à moins que Verden ne soit fou (il ne l’exclut pas lui-même), pas ce qui se relève. Comme souvent chez Poe, c’est le feu qui met fin au cauchemar (est-ce qu’il détruit ou est-ce qu’il purifie ? On a rarement autant de lumière que dans un incendie). Mais, finalement, qui ouvre les yeux ?
Le film compte quatre interprètes mais on ne s’attardera pas sur ceux du domestique et de Christopher car tout le drame se concentre sur le couple Vincent Price/Elizabeth Shepherd. L’un comme l’autre sont éblouissants. Vincent Price réussit à donner de la fragilité à Verden Fell qu’on a sincèrement envie de plaindre. A la différence d’un Roderick Usher qui se complaisait dans sa morbidité, Verden en a assez de sa morosité et Rowena lui apporte la chaleur qui lui manquait depuis la mort de Ligeia. Il conserve cependant sa capacité d’inquiéter et la possibilité qu’il soit fou taraude le spectateur rapidement et de plus en plus. Elizabeth Shepherd commence comme une jeune lady insouciante mais pas idiote (Jane Austen l’aurait adoré) et elle est très crédible dans son jeu de séduction car c’est bien la jeune femme qui fait le premier pas ! Par la suite, on craint pour sa santé mentale (devient-elle folle ou est-elle vraiment victime ? De quoi d’ailleurs ? De malveillance ou de maléfices ?) et pour sa vie également. Comment, en la voyant s’acharner à combattre l’ombre de Ligeia (sinon Ligeia elle-même) ne pas songer à Rebecca, cet autre fantôme qui refuse qu’on la remplace ?
Anecdotes :
Scénario : Robert Towne. C’est une adaptation quasi-littérale sauf en ce qui concerne le caractère de Verden qui, chez Poe, haïe sa seconde femme.
Dernière des huit adaptations de Poe par Corman.
Le tournage dura 25 jours au lieu des 15 prévus. Roger Corman attribuera cette différence à l’obsession des Anglais pour la pause-thé.
L'extérieur du bâtiment est un véritable bâtiment, il s'agit du prieuré de Castle Acre à Norfolk, au Royaume-Uni, qui est un monument du patrimoine national et est toujours ouvert au public. Les fausses parties du décor ajoutées juste pour le film incluent les pierres tombales vues parmi les ruines et la partie la plus haute de l'aile résidentielle (la partie qui prend feu en premier) qui n’existe pas dans la réalité.
Les titres proposés comprenaient « La maison du bout du monde » et « Le tombeau du chat ».
La séquence de rêve semble être tournée au ralenti, mais si vous regardez attentivement, vous verrez qu'elle a été filmée à vitesse normale, les acteurs se déplaçant simplement lentement. Corman a fait cela délibérément pour donner à la scène un air supplémentaire d'irréalité.
Elizabeth Shepherd/Rowena : actrice anglaise, vue à la télévision dans Emergency-Ward 10 (1960), Destination danger (1966), Crown Court (1983), Les aventures de Shirley Holmes (15 épisodes, 1997-1998), New York Unité spéciale (2009) ; au cinéma dans Commando de la mort (1970), Damien : la malédiction II (1978)
John Westbrook/Christopher Gough : acteur anglaise (1922-1989), vu au cinéma dans Les chemins de la haute ville (1958), Les clés de la citadelle (1962), Le seigneur des anneaux (voix, 1978), Les loups de haute mer (1980). il a participé au film Le masque de la mort rouge sans être crédité.
Oliver Johnston/Kenrick : acteur anglaise (1888-1966), vu au cinéma dans La vie d’une autre (1939), Un roi à New York (1957), La comtesse de Hong Kong (1967) ; à la télévision dans The Quatermass Experiment (1953), Destination danger (1966).
Camarade Totoff- Prince(sse)
- Age : 44
Localisation : Vitry sur Seine
Date d'inscription : 26/02/2015
Estuaire44 aime ce message
Re: Saga "Poe par Corman"
Critique élogieuse de la série :
http://braindamaged.fr/12/10/2023/la-chute-de-la-maison-dusher-empire-macabre-pour-grand-hommage/
http://braindamaged.fr/12/10/2023/la-chute-de-la-maison-dusher-empire-macabre-pour-grand-hommage/
Camarade Totoff- Prince(sse)
- Age : 44
Localisation : Vitry sur Seine
Date d'inscription : 26/02/2015
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Estuaire44- Empereur
- Age : 55
Localisation : Villejuif (94)
Date d'inscription : 10/04/2007
Re: Saga "Poe par Corman"
Triste nouvelle du décès de Roger Corman, on avait fini par le croire immortel
https://www.20minutes.fr/arts-stars/cinema/4090627-20240512-realisateur-roger-corman-maitre-serie-b-mort-98-ans
https://www.20minutes.fr/arts-stars/cinema/4090627-20240512-realisateur-roger-corman-maitre-serie-b-mort-98-ans
Estuaire44- Empereur
- Age : 55
Localisation : Villejuif (94)
Date d'inscription : 10/04/2007
Dearesttara et Camarade Totoff aiment ce message
Re: Saga "Poe par Corman"
Il est encore capable de se relever de sa tombe ! Est-on sûr qu'on ne l'a pas enterré vivant ? J'imagine qu'on entendra des corbeaux chanter sur sa tombe.
Merci M. Corman, ce fut un plaisir court mais intense de connaître votre cinéma.
Merci M. Corman, ce fut un plaisir court mais intense de connaître votre cinéma.
Camarade Totoff- Prince(sse)
- Age : 44
Localisation : Vitry sur Seine
Date d'inscription : 26/02/2015
Estuaire44 aime ce message
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