Saga "Star Trek"

En tout cas, voilà des gens qui réfléchissent à leur série et se penchent sérieusement sur elle. C'est méritant et respectueux je trouve.

Un Trekkie s'est infiltré dans l'armée française ! Alerte ! Aux armes !!

Vue  les cinq premiers épisodes de la S2 de Strange New Worlds (10 au total). Jusqu'ici la série a renoncé à la majeure partie de son plaisant jeu de références et d'imbrication avec TOS ; il n'y a qu'un seul épisode que l'on puisse relier à la série originelle et les seuls liens encore développés (notamment via Spock) ont été installés en S1. Sans doute le prix à payer pour la série dérivée trouve son autonomie, tout en conservant  une forme de narration par épisodes quasi isolés, très éloignée de la forme feuilletonnante de Discovery, même si les éléments de continuité demeurent un peu plus présents que dans TOS.

Globalement on assiste à une standardisation  de la série, devnue proche deen The Orville. Avec sans doute moins de virtuosité  qu'en S1, mais SNW demeure très agréable et distrayante à découvrir, visuellement parfaitement soignée (les effets spéciaux sont bien meilleurs que dans les productions Marvel actuelles). Nous nous sommes réellement attachés aux personnages, ce qui demeure essentiel pour Star Trek, on sait combien la franchise relève autant de la série familiale que de la SF.

The Broken Circle ***
L'épisode résout la première trame issue de la S1 (La'an). De manière certainement désirée il est absolument archétypal de Star Trek ( action 60's, diplomatie spatiale, jeu des compétences de l'équipage...). Un ressenti d'autant plus fort que son format trop court pour une histoire aussi ambitieuse fait que la narrations 'effectue comme en accéléré, jusqu'à l'épure. Comme une carte de visite ou une entrée pour les nouveaux venus Pourquoi pas, d'autant que l'intrigue parvient à nous surprendre de tamps à autres, comme avec le docteur et l'infirmière tabassant des Klingons tels des Astartes ou la nouvelle mécano d l'Enterprise, totalement hors normes.

Ad Astra Per Aspera *
Un épisode complet destiné à boucler la seconde histoire laissée ouverte par la S1 (Numéro Un), soit donc un cinquième de la S2 d'écoulé avant même que celle-ci ne débute vraiment. On ressent cela d'autant plus fortement que l'histoire, via le jugement du Second de Pike, revêt la forme d'un épisode purement judiciaire. Ce n'est pas mon genre d'histoire préférée dans Star Trek, en soi, d'abord, mais aussi parce que les bons sentiments animant l'Utopie ont tendance à y devenir déclamatoires. C'est exactement ce qui se déroule ici, avec toute une parabole théâtralisée à l'extrême en faveur de l'acceptation de l'autre. Discovery se situe déjà largement sur ce créneau, cela fait doublon.

Tomorrow and Tomorrow and Tomorrow ****
A l'inverse des judiciaires, les épisodes temporels nous ont régulièrement valu de grands moments TOS, au cinéma (IV, Retour sur Terre) comme à la télé ; On pense ici beaucoup à cet immense classique qu'est The City on the Edge of Forever, où Spock et Kirk s'élancèrent dans le passé pour pareillement sauver la Timeline menant à l'Utopie. On retrouve ici le même plaisir avec l'aventure de La'an et du Kirk alternatif (toujours très James T.  Kirk, un régal) : sacrifice, humour, romance, jeux chronologiques... Avec en prime la mobilisation de deux des meilleurs plus populaires ennemis de la Fédération. Le seul épisode vraiment miroir de TOS cette saison (jusqu'ici) et c'est mon préféré. Voilà.

Among the Lotus Eaters ***
Pike, La'an, et M'Benga s'aventurent sur un monde où l'on perd la mémoire chaque jour. Bonne aventure, un brin standard, qu'aurait  pu également connaître SG-1. On suite la découverte progressive avec grand intérêt  et Pike se retrouve au centre de l'action, pour la première fois cette saison. A moins que quelque chose m'ait échappé, l'effet est néanmoins en partie gâché par un biais scénaristique en fin de parcours, le récit glissant totalement sur les conditions de retour de l'équipe. Par ailleurs les personnages perdent plus ou moins vite la mémoire selon ce qui est pratique pour le scénariste, un classique. L'ensemble demeure néanmoins solide et prenant.

Charades ***
Suite à une péripétie, Spock devient humain, au moment où la cérémonie de fiançailles doit avoir lieu avec T'Pring et sa famille. L'épisode poursuit le prologue de la relation Spock-T'Pring entamé en S1. Il parvient, grâce à son humour, à se sortir du défi consistant à priver un personnages de ce qui fait son intérêt et sa popularité pour le rendre... quelconque. L'humour de vaudeville n'a rien d'original, mais l'interprétation y pallie largement. Ethan Peck est toujours parfait en Spock et le récit a la bonne idée de laisser toute sa place à Mia Kirshner, épatante Amanda. La liste des compétences de Chapel (clairement le personnage de TOS le plus rebooté) rivalise désormais avec celui d'Emma Peel, mais on aime bien ce côté Sixities.

Lost in Translation (**)

Uhura souffre d'hallucinations morbides alors que l'Enterprise s'apprête à lancer une nouvelle mine gazeuse de Deutérium. Heureusement le lieutenant Kirk vole à sa rescousse. Centré sur Uhura, l'épisode n'arrive jamais à se dépêtrer d'une difficulté consubstantielle : rebooter Uhura aussi amplement que Chapel (personnage relativement secondaire et éphémère de TOS) est impossible pour une star de la franchise. Uhura ne peut être que fidèle à l'opératrice radio de l'Enterprise, en avance sur son temps mais bien en retrait des standards de femme d'action contemporains. Pour la plonger dans l'aventure les auteurs ne trouvent ici pas d'autres ressource que, fondamentalement, la situer en Damsell in Distress, avec Kirk en sauveur. En 2023, difficile de broder toute un récit sur cette situation, d'où une recherche peu convaincante d'échappatoires classiques (multiplier les intrigues secondaires, les déambulations, les hallucinations et ressasser la situation).

Heureusement la résolution de l'énigme est astucieuse à défaut d'originale (en remplaçant la nébuleuse de Deutérium par un Soleil on retrouve le 42 de Dr Who). Surtout l'opus trouve son sauveur avec ce jeune Kirk que la série rend toujours irrésistible  et hilarant en le maintenant en héros 60's, même si davantage sensible sous l'apparence. On s'amuse beaucoup, d'autant que Paul Wesley reste épatant. En trois épisodes il a su rendre son Kirk indispensable à la série. L'épisode  a d'ailleurs la bonne idée de se conclure avec la première poignée de mains échangée avec M. Spock, avec une palpable émotion. Même dans ses opus mineurs SNW demeure un chant d'amour à TOS et on aime ça.

Those Old Scientists (***)

Les Enseignes Boimler et Mariner, de l’USS Cherritos, sont propulsés 120 ans dans le passé par un mystérieux Portail et rencontrent l’équipage de l’USS Enterprise… Le crossover avec Lower Decks, tant vanté par la promo de Paramount atteint une bonne partie de ses objectifs, avec une histoire rythmée, aux nombreuses péripéties en forme de gags et des rencontres pétillantes avec tout l’équipage de SNW. Lower Decks exporte son humour dans une série déjà divertissante et l'on ne s’ennuie jamais.  On apprécie également que ce soit les acteurs de voix du dessin-animé qui aient été retenus, même si bien plus âgés que leurs personnages, c’est élégant, conforme à l’esprit famille de Star Trek et leur enthousiasme fait plaisir à voir. Est-ce que, pour autant, l’épisode mérite tout à fait de devenir le mieux noté de SNW sur IMDB, avec un 9,2 ? Pas tout à fait. En effet il n’exprime pas entièrement son potentiel, apparaissant en particulier nettement moins riche que le Scoobynatural de SPN.

Celui-ci croisait deux univers similaires distincts, et organisait tout un dialogue entre des codes parfois diamétralement opposés. Ici les codes et les univers sont strictement les mêmes, la différence de période ne changeant concrètement rien à l’affaire (une Utopie est fixe par nature). La confrontation s’avère donc moins riche et ludique. C’est d’autant plus vrai que le jeu des références ici installé se retrouve déjà massivement dans Lower Decks et que le relationnel entre affection et exaspération de l’équipage de l’Enterprise envers les deux olibrius est en fait le même que celui des officiers du Cherritos. Décidément on reste en terrain (trop) connu. Contrairement à SPN, les personnages n’ont pas non plus conscience de la différence entre dessin animé et live action, ce qui nous prive encore d’un effet, hormis pour un tag final réellement astucieux et hilarant. Au total on s’amuse beaucoup, mais l’opus ne me semble pas tout à fait assez hors normes.

Under the Cloak of War (****)

L'Enterprise doit escorter un ancien général Klingon ayant rallié la Fédération, pour mener d'importantes négociations. Mais plusieurs membres de l'équipage ont participé à la terrible guerre contre l'Empire Klingon, dont le docteur M'Benga, qui reconnaît en lui un criminel de guerre. Épisode absolument stupéfiant que celui-ci Majoritairement composé des souvenirs du conflit du doc, on se dit tout d'abord qu'avec Star Trek, et en particulier le fondamentalement joyeux SNW, tout cela demeurer gentillet et propret. Nous ne nous aventurerons pas certes pas ici dans les ténèbres d'un lointain Futur où il n'y aurait que la Guerre. Mais penses-tu oui, macache ! Fatale erreur ! En termes de Military SF tout ce que l'épisode envoie comme peinture sans fards des horreurs de la guerre, physiques ou psychologiques, s'avère rigoureusement inédit.

Dans la franchise mais pas seulement : Farscape, Stargate ou BSG demeurent loin derrière ce réalisme d'une force rare. Tout le récit se montre ténébreux et sale, sans aucune concession, mais aussi terriblement intense. On se situe aux limites du grand public. Même la Fédération et ses idéaux en sortent abîmés, même si les Klingons reste pires, logiquement dans une série ayant TOS comme boussole. Le drame final achève de rendre prégnante la noirceur, tout en laissant le spectateur de son jugement sur l'action du Doc : Au total une charge d'une éloquence terrible contre la guerre, sans nier pour autant héroïsme bien réel des combattants. Oui, parce que, en sus de tout le reste, Chapel est bien entendu une héroïne de guerre, mais on en a pris notre parti.

Next stop : le Musical, de l'art des montagnes russes !

Subspace Rhapsody (****)
Une faille sub-spatiale génère des improbabilités faisant basculer l'Enterprise en mode comédie musicale : tout le monde s'exprime en chantant et révèle publiquement ses sentiments. Et le Chaos continue à s'accroître. Bon ne va pas épiloguer, le talent et l'engagement totale des interprètes font de ce musical l'un des pics de la saison. Si, inévitablement, on préfère certaines chansons à d'autres, globalement, on se régale. J'ai particulièrement apprécié l'ouverture et le grand final, qui compose un superbe hommage à l'univers Star Trek. Le faire se conclure par le célébrissime indicatif de TOS était idéal. On apprécie aussi qu'Uhura soit à la fête, cela rattrape la relative déception de « son » épisode cette saison. J'ai peut-être  moins aimé la chanson de La'an, mais bon.

Bon, on va malgré tout chipoter, hein. J'ai trouvé les chansons relevaient  de styles moins variés que lors de l'épisode musical de Buffy et du crossover de l'Arrowverse. par ailleurs le prétexte de l'épisode emprunte beaucoup à ceux -ci : la faille se substitue littéralement au Démon de Once More, et l'idée d'un univers régi par les règles de la Comédie Musicale (façon Broadway) était au cœur de Duet, qui allait d'ailleurs beaucoup plus loin que SNW là-dessus. Par ailleurs si les trois Musicals sont centrés sur les ships, ceux-ci connaissaient des évolutions chez Whedon et Berlanti, tandis qu'ici on ne fait essentiellement que ressasser ce que la saison avait déjà installe (hormis pour Kirk et La'an). Au crédit de Subspace Rhapsody on notera par contre qu'il aura osé faire chanter les Klingons en mode fun, là où le Trio manquait à l'appel chez Buffy.

Hegemony (***)
Les Gorns attaquent une colonie et des vaisseaux de la Fédération. L'Enterprise se lance dans une périlleuse mission pour sauver les survivants mais peut compter sur l'aide d'un ingénieur surdoué, le jeune Montgomery Scott. Malgré quelques scènes de dialogue pas toujours enthousiasmantes, le final de saison constitue un épisode souvent captivant du fait de  nombreuses péripéties agréablement 60's et d'un budget conséquent, notamment pour les scènes spatiales. En revers de la médaille, on pourra toutefois pointer une créativité moindre que lors de son équivalent de la saison 1. Ainsi celui-là installait toute une impressionnante épouvante autour de Gorns revisités avec talent, tandis que celui-ci se contente de capitaliser dessus. Les différents personnages se voient sollicités de manière judicieuse, à commence par le Capitaine Pike qui démontre derechef qu'il n'est pas seulement un sympatrique cuisinier.

On note cependant un grand écart dans le traitement des personnages féminins ; Là où la Capitaine du Coyuga, qui n'aura jusqu'ici été essentiellement perçue que comme le Love Interest de Pike, devient l'inévitable Damoiselle en Détresse, Chapel s'avère plus Chapel que jamais en survivant inexplicablement et sans dommage aucun à l'explosion du vaisseau. J'attends impatiemment l'épisode où nous révélera qu'elle vient de Krypton. Le scénario agrège astucieusement divers éléments installés par la saison, mais n'introduit comme nouveauté que l'arrivée de Scotty. Le personnage et ses gadgets se montre amusant (pour le coup vraiment 60's) mais tout le côté caricature écossaise (dont sa passion pour le whisky, en clair) a disparu, un humour trop daté ? Au total une saison 2 toujours épatante, on a déjà envie de retrouver l'équipage, mais peut-être u, peu moins over the top que la 1.

Quentin Tarantino renonce à réaliser Star Trek :

https://www.20minutes.fr/arts-stars/people/4067626-20231220-quentin-tarantino-abandonne-tournage-star-trek

Rumeurs  comme quoi le James T. Kirk de Paul Wesley serait nettement plus présent en saison 3 de SNW jusqu'à peut-être devenir régulier... Levée de boucliers chez ceux pour qui il n'y aura jamais qu'un seul Kirk... En train d'éplucher The Cage / The Menagerie pour démontrer que cette présence accrue supposerait une familiarité  avec Pike qui n'existerait pas dans le Canon...  Les tenants de la supposée hérésie contrattaquent après avoir déniché un dialogue de The Cage où Kirk appelle Pike par son prénom... Fatigue.  

Bien vu ! Entre pairs, oui, surtout quand ils ne sont pas en représentation devant l'équipage. Surtout que Kirk veut aussi manifester sa sympathie à un Pike très diminué. Cela se déroule même ainsi dans la Flotte impériale de Warhammer, alors pourquoi pas dans Starfleet où l'ambiance est autrement plus cool (on n'y abat pas à vue ceux qui paniquent, par exemple). Le problème est que Kirk est officier mais pas encore capitaine dans SNW, donc leur rapport est avant tout hiérarchique et la bascule est jugée trop marquée dans The Menagerie pour être crédible, du moins pour les fans purs et durs du Shat.

Du fait de cette histoire de rencontre lors de la promotion de Kirk, il y a tout un jeu dans SNW pour qu'ils se rencontrent, sinon jamais, du moins le moins possible. Encore en saison 2 l'essentiel des dialogues de Kirk est avec Number One ou La'an, la responsable de la sécurité avec laquelle il y a "quelque chose dans l'air". Dur de jongler, les Trekkies sont plus regardants que les Whovians question continuité, sans doute parce que les embrouilles temporelles y sont beaucoup plus rares.

Ma crainte est surtout une perte de saveur si Kirk devient régulier dans SNW;J'aime bien quand un personnage est à la fois excellent et avec des participations suffisamment espacées pour que ses apparitions créent ipso facto un épisode spécial : le Maître dans Dr Who, Tesla dans Sanctuary, Q dans TNG, Ethan dans Buffy, Aphrodite chez Xena, McKay dans Stargate SG-1, Krycek dans X-Files... SNW était parvenu à cet équilibre avec son Kirk, ce serait dommage de perdre cette spécificité.