Série "Hercule Poirot"

J'ai hésité mais, finalement, plus lecteur que spectateur, je me suis remis à l'intégrale Agatha Christie publiée par le Masque. La dernière fois, cela m'avais pris quinze ans pour tout lire? J'espère faire mieux !

C'est une prise de risque que de choisir les années 70 car ce n'est pas du tout l'univers d'Agatha Christie. Le travail d'adaptation va devoir être encore plus minutieux mais puisque cette série a jusqu'à présent réussi à se réinventer, souhaitons-lui bonne chance.

Premières photos de l’appartement de l’inspecteur Max Beretta. Les décorateurs de la série ont encore fait du beau boulot ceux qui ont connu les 70's (comme peut en témoigner votre blanchissant serviteur) y reconnaîtront de nombreux éléments culturels.

A quoi bon créer une cuisine vu que les personnages de séries ne cuisinent presque pas ?

Estuaire44 a écrit:On cuisine souvent dans un commissariat.

Joli ! Belle réponse !

Business sur le Nil :

https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/roman/du-navire-sudan-a-l-hotel-old-cataract-un-voyage-en-egypte-sur-les-pas-d-agatha-christie_4272115.html#xtor=EPR-919-[NLculture]-20210126-[content2]

J'ai passé une très bonne soirée devant La Nuit qui ne finit pas, pilote des nouveaux associés contre le crime des petits meurtres. l'occasion de redécouvrir un Agatha Christie tardif, peut-être un tantinet méconnu car dépourvu d'un protagoniste récurrent comme Poirot ou Miss Marple. Si tout l'aspect gitan, sans doute assez daté, a disparu, l'adaptation sait préserver l'essence du roman : la personnalité particulièrement sombre et viciée du ou de la coupable. c'est d'ailleurs une constante de la série que de savoir associer bonne humeur ambiante et assassins bien glauques.

Comme promis par la production, les autres qualités des Petits Meurtres ont également été conservés : décors, costumes, voitures et localisations s'avèrent splendides. l'ambiance 70's se voit talentueusement reconstituée. Le côté surréaliste de la salle d'interrogatoires est magnifique. Bon l'hôtel hippie où réside Gréco relève clairement  du cliché, mais j'ai beaucoup ri. La tonalité féministe sait être bien présente, sans pour autant prendre trop de place au détriment de l'intrigue. Là aussi les auteurs savent jouer la carte de l'humour au lieu du déclamatoire ou du sentencieux.  Ayant connu ces années-là, je peux dire que, malheureusement, la série n'exagère rien.

Toujours porté par une parfaite interprétation (bravo au casting), le nouveau trio produit d'emblée des étincelles. Grand coup de cœur personnel pour Gréco, très Maigret au féminin, mais ses deux acolytes s'avèrent aussi amusants et perspicaces. Le personnages et leur relationnel sont exposés avec efficacité et rapidité, très à l'américaine. Pour une fois un pilote parvient à ne pas sacrifier l'intrigue du jour à l'exposition des personnages, quitte à judicieusement laisser des zones d'ombres  à révéler ultérieurement. c'est notamment le cas pour Gréco, dont on ne sait rien du parcours, ni comment il explique qu'elle puisse être  une femme aussi contemporaine dans un univers aussi 70's. La femme invisible de Beretta m'a aussi fait un peu penser à Columbo, si cela se trouve l'As du LAPD nous raconte des craques lui aussi.

J'ai quelques petites réserves concernant Rose. Même si j'ai adoré son humour, sa vivacité et son élégance très Courrèges, je ne suis pas persuadé de l'apport réel de Rose aux enquêtes à venir. l'intérêt professionnel me semble moins direct qu'avec une journaliste. Par ailleurs, ou ses dons de psychologue sont nuls et elle risque de demeurer un comic relief, ou ils sont avérés et alors Les Petits meurtres vont se rapprocher de la série policière de consultants, genre souvent intéressant, mais aussi particulièrement présent ces dernières années, d'où une relative perte de spécificité. Certes Poirot et Miss Marple avait recours à la psychologie pour résoudre les énigmes (bien davantage que Sherlock), mais sans le fatras freudien, l'hypnose, etc. Par ailleurs, en soi Le duo Gréco-Beretta pourrait aisément  fonctionner sur un modèle assez similaire à celui de la première saison. Maintenant j'espère être démenti par les prochains épisodes, dont Le Vallon, l'un de mes Agatha préférés. (****)

Très intéressant le documentaire sur les Petits Meurtres, en seconde partie de soirée. Outre l'aspect nostalgique, qui joue à plein, par l'exemple il dit beaucoup de choses sur l'écriture à la française d'une série, son côté plus artisanal, plus ouverte sur le tournage et les interprètes, et prenant davantage son temps qu'aux USA (bon, nous sommes ici dans une production de prestige). Le résultat reste sans doute plus aléatoire et davantage patrimonial, mais Si le ciel ne me tombe pas sur la tête, si la lune a comme un air de fête, si la neige ne fond pas au printemps, cela peut aussi donner de fort jolies choses. Il suffit d'avoir les moyens de ses ambitions, mais c'est hélas trop rarement le cas.

L'épisode d'hier, La Chambre noire, s'est révélé particulièrement inquiétant quant à l'avenir de la série. Celle-ci va désormais se baser sur des intrigues originales, qui ne seront plus des d'adaptations d'Agatha Christie et le contraste s'est révélé d'ores et déjà cruel avec Meurtres en solde, épisode de la saison 2  adaptant Le Noël d'Hercule Poirot et diffusé. L'intrigue y est autrement  plus dense dense, articulée et prenante. Elle se limite à une succession de meurtres sensationnalistes (déjà le côté le moins intéressant de Chapeau Melon) et se voit sacrifiée au drama interne de l'équipe. Ce dernier renoue aussi avec le sensationnalisme facile (la démission de la Commissaire, l'inspecteur sans cesse confronté à des jeunes femmes dévêtues, improbabilité risible de la rencontre à l'hôtel).

Rose se voit cantonnée à son jargon devenant répétitif à à des séances psy de ses compères qui ne font que souligner ce que le spectateur avait lui-même déjà compris. En termes de relationnel, il faut souvent mieux laisser se percevoir les choses plutôt que de les énoncer très scolairement. Les atouts de la série sont toujours là : époque plaisamment mythifiée, interprétation parfaite et seconds rôles aussi soignés que les premiers (bob toujours irrésistible). La top modèle a quelques dialogues bien affutés et se révèle plus intéressante qu'une simple silhouette.  Mais même un univers aussi pétillant ne saurait faire l'économie de véritables intrigues. (**)

La catastrophe :
https://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18696649.html