Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Rétrospectivement, quand on connaît la vie d'Howard (les commentaires du traducteur sont très éclairants à cet égard), on comprend mieux les limites de son talent, malheureusement très apparentes. Ainsi, en constante précarité financière, il a dû se résoudre à n'écrire que des nouvelles ou à la rigueur des novellas sérialisées, les seules pouvant intéresser les pulps comme Weird Tales - qui ne payait pas toujours rubis sur l'ongle. L'Heure du Dragon est une exception, étant le seul roman Conan, mais là encore Howard ne faisait que répondre à une commande d'un éditeur anglais. Les codes demandés par Weird Tales (violence et filles dénudées) ont aussi contraint Howard à s'autocaricaturer dans certains cas.
Il en résulte que le Worldbuilding d'Howard demeure surtout du name-dropping, et des peuplades certes diverses et variées mais peu explorées en profondeur. Je pense cependant qu'il s'agit d'une décision consciente de sa part : même dans les 300 pages dans L'Heure du Dragon, tout est sacrifié à l'action. Je pense qu'Howard a privilégié plus que tout autre auteur de fantasy le rythme vif de péripéties et des exploits surhumains. On lui doit d'avoir basiquement créé la sword and sorcery mais on trouve chez Howard une défiance de la magie, systématiquement collée aux méchants, ce qui prive L'Âge Hyborien de tout système de magie ou de subtilité : l'épée doit fatalement écraser la magie. Pourtant, il anticipe déjà Tolkien car plaçant la cohérence au-dessus de tout, Howard a écrit plusieurs notes sur son univers, notamment un essai de 80 pages. L'exécution est au final défaillante, mais l'effort produit s'inscrit dans la même démarche que Tolkien, qui a lui aussi écrit une sorte d'essai avec le prologue du LOTR.
Cette hypertrophie de l'action amène Howard a schématiser au maximum ses personnages, souvent interchangeables (il réutilise même des noms !). Ce faisant apparaît sa pire faiblesse : un manque d'émotion dans ses récits, à déguster comme des blockbusters d'aventure brillants mais sans attachement émotionnel. Sur les 21 histoires, je n'ai discerné qu'un seul vrai moment d'émotion perso... Toutefois, le thème Barbarie vs. Civilisation et son héros loin d'être chevaleresque hissent Conan au sommet des pulps haut de gamme.
Tout d'abord, manque d'émotion ne veut pas dire manque de profondeur. Le discours d'Howard sur la Civilisation, chose ni bonne ni mauvaise, mais juste condamnée à la déliquescence et à être brisée par la barbarie (Au-delà de la rivière noire) ou à s'auto-détruire (Les Clous rouges) est la source d'une étonnante étude sur le comportement humain. Il est étonnant qu'Howard se montre d'un pessimisme effrayant sur l'humanité, qu'elle soit barbare ou civilisée, le ton se montre d'une noirceur souvent effroyable, notamment les dernières nouvelles. A ce titre, il se montre plus nihiliste et désespéré que les grands auteurs qui suivent. Dans la lettre, c'est du sword and sorcery violent et fun, dans l'esprit, il est thématiquement plus proche de la dark fantasy ou du grimdark. Il est dommage qu'Howard a les clichés de son époque : 95% des femmes sont des demoiselles en détresse, les relents racistes et antisémites pleuvent, et même certaines pointes de lesbophobie quoique plus dans ses lettres que ses fictions. Cela dit, il ne se montre guère plus tendre envers les hommes blancs, souvent décrits comme des envahisseurs sanguinaires et chargés de tous les pêchés du monde (Howard est horrifié par les Pictes sauvages mais semble appuyer leurs révoltes, d'une manière similaire aux indiens face aux colons américains, pas étonnant qu'il ait aussi écrit des westerns). Son tort est d'avoir exprimé des tropes puants prééxistants de races ou de genres pour les autres catégories d'humains.
Ensuite, Howard n'est peut-être pas le plus profond des auteurs, mais il est sans doute un de ceux ayant la meilleure technique. Dès la première nouvelle jusqu'à la dernière, Howard est un maître du rythme vif, du suspense, de l'action, et de la concision. Jamais un mot en trop, il sait planter un décor en 3 phrases là où d'autres mettent 6 pages (coucou Robert Jordan...), tire le meilleur de persos archétypaux et sait déchaîner violence et action avec un entrain permanent. Même dans les pires nouvelles, Howard ne nous ennuie jamais tout en sachant effrayer au détour d'un décor inquiétant ou d'une attaque surprise. J'ai lu les 21 histoires comme des pages-turner. Cela n'est pas dû qu'au format court : les novellas de 150 pages ou le roman de 300 sont aussi bourrés d'adrénaline que les histoires courtes. Je comprends sans peine qu'il ait été un favori des magazines tant il surclasse la concurrence en termes d'action enivrante. Allier l'action trépidante à la pénétrante évocation de chaque lieu... Même en 2022, je ne connais que peu d'auteurs pouvant rivaliser avec lui sur ce terrain. Surtout qu'Howard a un don pour le gore et les scènes de combat proprement renversants. Aucune bataille ne ressemble à une autre, et il peut aller très loin dans la boucherie (le Bassin de L'Homme Noir a une scène de massacre hallucinante d'hémoglobine).
Conan lui-même, avec sa stature invincible, sa vitalité surhumaine, ses exploits over-the-top est le prototype parfait des superhéros de comics (pas étonnant que Marvel l'ait repris) ; ses pouvoirs sont dans sa force et sa ruse, comme le sera un Batman dépourvu de pouvoirs magiques. J'ai très apprécié qu'Howard, sans porter de jugement explicite, nous montre un héros qui ne soit pas un chevalier blanc. Epicurien, capable de tuer sans justification, galant et forceur, courageux mais effrayé par le surnaturel, méprisant les faibles mais pouvant se laisser aller à les aider... Conan est rempli de contradictions qui l'humanisent. Sa manière de vivre au jour le jour est très bien rendue par ses différentes fonctions, qu'il prend sans aucune préférence (chef de bandits, roi, mercenaire sans le sou, tout lui va). Qu'Howard ait refusé la chronologie ne fait qu'accentuer ce parti pris d'un homme qui n'a pas d'autre but que de chercher dans la vie l'excitation et le danger qui manquent à ces couards de civilisés tout en rejetant le bain de sang primitif des barbares. Plus proche de ces derniers, Conan n'en est pas moins influencé par cette Civilisation qu'il méprise mais dont il goûte les fruits (du rhum, des femmes et d'la bière nom de dieu). Bref, un personnage plus complexe qu'il n'y paraît.
Au final, j'ai adoré suivre les aventures de Conan, malgré le côté inégal des nouvelles. (***)
Le Phénix sur l’épée : ****
La Fille du Géant du gel : ***
Le Dieu dans le sarcophage : *
La Tour de l’Éléphant : ***
La Citadelle écarlate : ****
La Reine de la Côte noire : ****
Le Colosse noir : **
Chimères de Fer dans la clarté lunaire : **
Xuthal la crépusculaire : ****
Le Bassin de l’homme noir : **
La Maison aux trois bandits : *
La Vallée des femmes perdues : **
Le Diable d’airain : **
Le Peuple du Cercle noir : ***
L'Heure du dragon : ****
Une sorcière viendra au monde : **
Les Dents de Gwahlur : ***
Au-delà de la Rivière noire : ****
Le Maraudeur noir : ***
Les Mangeurs d'hommes de Zamboula : ***
Les Clous rouges : ****
Top 5
1. La Citadelle écarlate : Howard au zénith de son talent de conteur. L'horreur Lovecraftienne des prisons de la Citadelle sont de la meilleure eau et la bataille finale tient la dragée haute à nombre de batailles de roman. Épique, foisonnant d'imagination, et en prime, le seul sorcier de la saga plus ambigu que la moyenne.
2. Au-delà de la Rivière Noire : La chute de la Civilisation trop fragilisée face à la puissance naturelle de la Barbarie. Sombre et tragique récit fait de morts injustes, à la terreur permanente, conclue par une surprenante note d'émotion et un constat glacial. Inoubliable.
3. Le Phénix sur l'épée : Première nouvelle de Conan, coup de maître. Après la théâtrale accroche, un récit bref, fort, violent, avec des manifestations de mélancolie qu'Howard ne reprendra plus par la suite. Déjà l'auteur commente amèrement ces civilisés jamais contents, décevants et vantards.
4. L'Heure du Dragon : L'occasion manquée de parler en profondeur de l'Âge Hyborien à l'occasion de ce tour du monde est largement compensée par une saga d'action à tout va. Conan est plus tabassé que jamais mais rend coup pour coup. Cavalcade de sang et d'horreur qui ne s'arrête jamais, un pulp énorme et survitaminé. De quoi regretter qu'il n'y ait pas eu d'autres romans.
5. Xuthal la Crépusculaire : Oui, c'est le brouillon des Clous Rouges, qui est le vrai chant du cygne d'Howard et techniquement supérieur (y compris le perso féminin). Mais l'ambiance de Xuthal, vachement plus prégnante et bizarre, m'a davantage conquis. Je ne suis pas objectif.
Dearesttara- Roi (Reine)
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Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Il y a quelques temps, je me suis lu l'intégrale Solomon Kane du même Howard et j'avais beaucoup aimé. La civilisation n'y est pas plus aimée (Kane est un puritain bon teint qui méprise tout artifice), les femmes non plus (elles sont pratiquement absentes). Je partage complètement vos avis sur le style. Je pense que ça pourrait te plaire.
Robert Howard était un ami de Lovecraft qui fut très abattu par le suicide d'Howard auquel il ne devait guère survivre. Lovecraft est un génie du fantastique mais un xénophobe raciste avéré.
Le Barbare a été repris tel quel (y compris physiquement) dans la parodie "Le Donjon de Naheulbeuck" avec son mot fétiche : "Baston !"
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Je ne vais pas me replonger dans Howard de suite, mais je me laisserais bien tenter par Solomon Kane en effet, d'autant que l'intégrale en 1 volume est aussi dispo chez Bragelonne.
Je suis en train de me faire Le Donjon et je suis complètement hilare, on voit en effet l'influence de Conan !
Pour la parodie de Pratchett, wiki m'apprend que Cohen le Barbare (si si) apparaît dans Le Huitième Sortilège, Les Tribulations d'un mage en Aurient, Le Dernier Héros, Va-t-en-guerre (caméo seulement) et la nouvelle Drame de Troll.
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Commençons par un détail amusant : l'histoire se déroulerait au Troisième Age (comme Tolkien).
Dans cet opus, Robert Jordan parle beaucoup d'amour. Min avoue qu'elle est amoureuse de Rand. Elayne l'avoue aussi et cela va générer un gag récurrent avec l'Aielle Aviendha qui va foudroyer Rand du regard parce qu'il n'aurait pas compris que la Fille-Héritière est faite pour lui et qu'il a interdiction de regarder une autre femme ! Rand n'est pas au claire sur ses sentiments puisque, quand il embrasse la seconde, il pense à la première ! Amour toujours avec Perrin (mon chouchou) qui, malgré moult vicissitudes et crises diverses, est de plus en amoureux de Faile, jusqu'à l'union matrimoniale. Un moment fort en émotion. Sans doute prude (Jordan est comme Terence Fisher : montrer du sang, pas de problème mais du sexe, pas question !), il ne nous laisse que suggérer la nuit de noce. Je passe sur Nynaeve et Lan parce que je n'arrive pas à y croire. Idiot sans doute mais ça me paraît toujours sorti de nulle part.
Cet opus me plaît parce que Rand s'affirme. Il tient tête à Moiraine ; laquelle le prend très mal mais n'a guère de prise sur le Dragon Réincarné sinon sa formidable intelligence qui lui permet de comprendre beaucoup de choses. Mais Rand refuse de lui faire confiance (alors qu'elle a veillé à éloigner de lui Thom qui le conseillait secrètement pour l'isoler) et a compris qu'il ne pouvait plus non plus accorder sa confiance à Egwene et il ne l'accordera pas plus aux Matriarches (de sacrés personnages là aussi !). Il garde ses idées pour lui et les mets progressivement en application sans consulter qui que ce soit ; ce qui met l'Aes Sedai en fureur (et moi en joie !). Portant, Rand regrette cette situation puisqu'il dit "J'aimerai tant pouvoir lui faire confiance". Oui, mais le culte du secret, le goût de la manipulation, l'habitude de commander ont érigé un mur entre Moiraine et Rand et c'est entièrement de la faute de l'Aes Sedai. Si elle apprenait l'humilité, elle aurait fait un brin de chemin vers lui.
Egwene prend de l'épaisseur comme Aes Sedai. Elle capitalise sur son expérience de Rêveuse et de nombreuses et importantes scènes se déroulent dans le Monde des Rêves (lecteur de Lovecraft, je garde cette dénomination plutôt que le terme de Jordan, désolé). Un Monde des Rêves dont la description est effroyable (très lovecraftien pour le coup. Jordan a-t-il lu le Solitaire de Providence ?). C'est une Aielle, Amys, qui va se charger de sa formation et ce ne sera pas de la tarte parce que la jeune femme a une tête dure comme du roc !
Ah ! Je crois que j'ai trouvé une utilité à Elayne : servir de tampon entre Nynaeve la Colère et Egwene l'Entêtée puis servir de voix de la Raison à Tanchico. J'avoue que ce n'est pas ce qu'il y a de plus fun.
Côté opposition(s), les Rejetés sont clairement dans le jeu maintenant et notamment Lanfear (elle aussi amoureuse de Rand, pauvre garçon !). Entrée en scène de Moghedien (à qui Nynaeve met une raclée !) et Asmodean, battu par Rand qui m'a surpris par son choix d'en faire son "professeur". Mais, c'est logique puisqu'il considère (à raison selon moi) les Aes Sedai comme des ennemies. J'imagine déjà la tête de Moiraine ! J'ai beaucoup apprécié tout le passage à Champ d'Emond d'abord parce qu'il met Perrin en valeur, parce qu'il part de Tear sans l'aval de Moiraine (et tout ce qui se fait contre ou sans elle me comble d'aise) et parce qu'on le voit prendre de l'assurance. Il arrive et reste humble mais, au final, toute la population le considère comme son "seigneur" après l'avoir désigné "général". Et il montre de vraies qualités de stratège. Son humilité foncière dût-t-elle en souffrir, Perrin a l'étoffe d'un chef. Mais c'est sans doute le seul des trois Taver'en à avoir gardé le plus intacte sa personnalité d'avant. Il a évolué mais ne s'est pas transformé. Jolie formule quand Faile l'aide à pleurer sa famille pour ne pas que "le chagrin s'infecte".
Le clou du roman, c'est bien sûr tout le passage à Rhuidean même si je l'ai trouvé tant qu'assez longuet. Je n'ai pas bien compris pourquoi Mat s'y rendait lui aussi et je regrette que Rand l'ai descendu de son arbre. Ce personnage m'énerve depuis le début et je n'arrive pas à lui trouver un intérêt ou une qualité. Je le mettrai dans le même sac que Moiraine et, hop ! au fond de la mer avec les artefacts récupérés au Palais de la Panarch à Tanchico !
Détail irritant : quand Rand et Mat vont à Rhuidean, ils sont vêtus mais Aviendha et Moiraine doivent s'y rendre nues. Pourquoi cette différence de traitement ? A croire que Jordan a un souci avec les femmes puisqu'il insiste tant qu'il peut sur le côté "déconcertant" de la présence de femmes guerrières chez les Aielles contrairement aux autres peuples. Pourtant, il dessinera joliment le portrait de femmes marins (mais demi-nues là aussi).
Surprise avec le coup d'Etat à la Tour Blanche contre Sichuan Sanche, déchue de son titre de Chaire d'Amyrlin. Surprise, oui et non à la réflexion car les divisions des Sœurs ont bien été exposées auparavant. Tar Valon me fait penser au Centre du Caméléon : un lieu où tout le monde s'aime et prépare la paix dans le monde ! (Ha ! Ha! Ha !).
Tout le final, haletant, du roman est fait de bataille, à Champ d'Emond, à Tanchico, à Alcair Dal (et Rhuidean) et c'est un régal.
Capitaine, mon capitaine, prêt à embarquer pour le cinquième voyage !
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Tous les fronts de l'action se montrent riches en explications de gravures, révélations et rencontres-choc, dans un continuum frénétique que même les descriptions interminables de l'auteur ne peuvent entamer (ce sera plus contestable ensuite). La rencontre enfin en bonne et due forme avec les Aiels nous vaut l'un des plus formidables propulsions de worldbuilding réussi, jusqu'à 2 chapitres entiers consacrés à leur backstory - prends ça Tolkien. En guide pince-sans-rire et souvent hilarant, Aviendha est un festival de badasserie obsessionnelle qui assume complètement la surchauffe. On est au spectacle pour ce périple initiatique en plein désert et son grandiose "triel" entre Rand, Asmodean et Lanfear, encore une sacrée valeur ajoutée pour La Roue du Temps tant la Rejetée se montre impayable d'effronterie et de létalité inquiétante (un mélange explosif). Les Rejetés en général montent en puissance avec des masterplans en préparation mais aussi déjà des perturbations car le Mal ne peut s'empêcher de trébucher sur ses propres pièges. C'est aux petits oignons. Jouissance aussi de voir Moiraine se faire joyeusement mettre sur la touche par un Rand qui commence à se mettre un petit peu en colère (début d'un long crescendo d'indépendance mais aussi de folie colérique à venir). Mais l'Aes Sedai n'a pas dit son dernier mot, ce serait mal la connaître.
Je me rappelle de ma stupeur devant le châtiment de Siuan Sanche (et de Leane), en vérité le 1er grand évènement de la saga à m'avoir totalement retourné, incrédule. Mon hypothèse est qu'il y aura désormais au moins un moment de ce genre par livre car je me suis pris dans la poire 2 retournements complètement dingues dans le volume suivant (teaaaaaaasing).
Je continue à défendre le facétieux Mat, toujours sur la brèche pour s'attirer n'importe quel ennui même quand il ne fait rien, quel pied. Par contre, oui, Elayne, on attend toujours qu'elle se greffe une personnalité, le temps devient long.
Pour la nudité, mon hypothèse est que le récit est raconté du point de vue des héros de Champ d'Emond, tous assez prudes. Voir des guerrières et des pirates à moitié nues permet de mesurer le fossé entre les traditions de nos jeunes adultes et celles beaucoup plus... body-positive on va dire d'autres peuplades (souvenir du bain mixte à la fin du 1er volume qui avait bien embarrassé Rand). Tout en rigolant bien sûr de leurs réactions étonnées.
Je te prépare le 5e tome, mais tu devras faire gaffe. Comme je te l'ai dit, un bon tiers des pages s'est décollé du livre. Bon courage !
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
D'ordinaire, si les hommes vont habillés à Rhuidean c'est parce qu'il ne peuvent pas canaliser ou alors ne le peuvent plus. Ou alors il ne vont plus nulle part... Les Sagettes y veillent avec autant de soin et de ferveur que l'Ajah Rouge ou l'Adepta Sororitas concernant les Sorciers Psykers, dans un univers voisin où il n'y a que la Guerre et où le Warp est comme une version dantesque et hallucinée du Pouvoir Unique. Mat est Ta'veren mais pas Aes Sedai et Rand... Celui-Qui-Vient-Avec-l'Aube n'est pas venu pour respecter les règles, mais pour les briser, les jeter à terre. Aller vêtu en Rhuidean est une proclamation.
Qui peut croire que ma Lanfear est Rejetée ? Réprouvée, oui, Rejetée, non. Cette traduction est un gag permanent.
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Je préfère "Matriarche" comme terme à "Sagette" qui, selon le Dictionnaire de l'Académie française, désigne soit une flèche (mais le terme était déjà considéré comme "vieilli" en 1935) soit une plante d'eau. Au moins, la notion de "sagesse", est certes implicite mais le mot sonne plus mélodieux à l'oreille.
Toujours selon ce Dictionnaire, "Réprouver", c'est "rejeter quelque chose" donc quelque soit le terme choisi, c'est similaire. Plus intéressant selon moi, l'Académie signale un sens théologique que je cite in extenso: "En parlant de Dieu qui condamne et exclut du nombre des élus celui qui s’est endurci dans le péché, a refusé le salut, s’est opposé à la loi divine. Dieu réprouva Saül pour sa désobéissance. (...). Lanfear entre bien, il me semble, dans le groupe des "endurcis dans le péché" (même s'il n'y a pas un Dieu, une Créatrice mais juste "La Lumière"). L'anglais fait-il une distinction entre "Rejetée" et "Réprouvée" ?
"Aviendha se prépare à devenir Sagette dans l'allégresse". Pourquoi est-ce que je soupçonne un grand sourire derrière cette phrase ?
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
J'opte pour le sens théologique, nos amis étant puisant même parmi les Aes Sedai, ils peuvent être considérés comme des "élus", avant leur exclusion. Dans ma vieille traduction, il était bel et bien question d'un Créateur, ayant créé le Monde mais aussi enfermé le Ténébreux dans sa prison située "en-dehors". Mais peut-être la nouvelle traduction préfère-t-elle parler de Lumière, je ne sais pas. La VO utilise le terme "Forsaken".
Je ne suis qu'Allégresse et Amour.
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Estuaire44 a écrit:Est-ce à dire que les Sagettes ne seraient pas des flèches ?
J'opte pour le sens théologique, nos amis étant puisant même parmi les Aes Sedai, ils peuvent être considérés comme des "élus", avant leur exclusion. Dans ma vieille traduction, il était bel et bien question d'un Créateur, ayant créé le Monde mais aussi enfermé le Ténébreux dans sa prison située "en-dehors". Mais peut-être la nouvelle traduction préfère-t-elle parler de Lumière, je ne sais pas. La VO utilise le terme "Forsaken".
Je ne suis qu'Allégresse et Amour.
Par prudence, j'éviterais de dire d'Amys et Cie qu'elles "ne seraient pas des flèches". Je tiens à la vie et à mon intégrité physique !
J'ai zappé cette mention d'un "Créateur". Les personnages ne cessent par contre d'invoquer la Lumière (en général pour jurer).
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Assez frustré par Oraisons, diptyque de l'autrice française Samantha Bailly qui signait à 21 ans ses deux premiers romans. Les excellents concepts au coeur de la suite ainsi qu'un brillant final se voient sabotés par de multiples défaillances.
La religion est un élément important de la fantasy, mais Bailly a l'idée intéressante d'une étude très critique sur cet élément ici colonne vertébrale du récit, à travers les dogmes, rituels, et détournements de la religion à des fins terrifiantes par les puissants. La virulence du ton fait penser au très antireligieux Philip Pullman, et la démonstration demeure forte, tandis que la découverte progressive d'un pouvoir profanatoire jusqu'à l'insoutenable se fait jour. Le worldbuilding est parcouru de quelques bonnes idées, notamment une Terre lointaine où hommes et lynx vivent dans une profonde union spirituelle, on a toutefois l'impression de suivre davantage un roman historique parsemé de fanatiques religieux et/ou patriotiques, de corporations diverses et variées, mais sur ce point, c'est très bien fait, on ne le niera pas.
Malheureusement, ces bonnes idées se voient diluées au cours d'un récit manquant singulièrement de souffle. Si je salue le style fluide et direct, sans descriptions superfétatoires, il faut reconnaître qu'on s'ennuie pas mal au cours de récits initiatiques fragmentés, aux péripéties déconnectées, aux arcs secondaires parfois faiblards (les persos secondaires n'ont aucun arc digne de ce nom). 1100 pages, c'est juste trop long, avec seulement deux fronts narratifs - correspondant aux deux héroïnes. Certaines péripéties demeurent trop génériques et ne sont pas relevées par quoi que ce soit (les forains locaux, la forêt sombre, la maison close, la pension d'élèves où on passe pas mal de temps en tome 1...). C'est dommage car d'autres lieux (la ville des femmes enceintes, le laboratoire infernal) et objets (le captieux Jeu des Quatre Vents) montrent une belle originalité.
Le plus grave défaut d'Oraisons est cependant son médiocre traitement des persos masculins. Plus je lis des autrices, plus le constat s'impose de lui-même : pour écrire des hommes, les autrices sont en général aussi nulles que les auteurs écrivant des femmes, juste pas de la même manière. Bien qu'elle évite les clichés de la romance avec une belle habileté, Bailly est incapable de créer un personnage masculin évoluant positivement sans l'aide d'une femme, soit l'inverse d'un vieux cliché sexiste, mais qui reste sexiste dans ce sens. Le clou est quand le seul perso masculin fondamentalement positif depuis le début ne l'est que grâce à une drogue mais heureusement que sa petite amie est là pour le rendre gentil... bref, facepalm. Le 2e défaut est que les seules antagonistes féminines ont droit à des excuses pour leurs actions, là où les méchants hommes n'en ont évidemment pas. La palme revenant à l'une d'entre elles que l'on dépouille de tout aura pour en fait en faire une pauvre victime de la violence des hommes. Je ne dis pas que ça arrive pas dans la réalité, mais le traitement est tellement différent et outrancier que cela ruine la fin de son arc. Gillian Flynn roule des yeux au loin. C'est bien dommage car évidemment, les persos féminins ont droit à d'excellents arcs, notamment la cheffe de la Résistance ou Aileen, pris longtemps dans un dilemme cruel : choisir entre une lâcheté qui préserve ou un courage synonyme de carnage. Noony cependant, demeure par trop invariante, alors qu'elle supporte 50% du récit. L'excuse du flat arc ne fonctionne pas car on sent bien que l'autrice tente de la faire évoluer, et sur ce point, on est à peine dans une demi-réussite.
Je dois reconnaître que le climax des 150 dernières pages est toutefois fantastique, où mort, sang et feu se déchaînent dans une furie de violence maîtrisée. Je suis surtout admiratif que Bailly renonce au happy end au profit d'une fin impitoyablement douce-amère, et même plus amère que douce. On ne ressort pas la joie au coeur d'Oraisons, mais secoué par un constat d'un triste réalisme. J'admire également que Bailly renonce à une morale où chacun reçoit son dû, des criminels haïssables s'en tirent à bon compte, certaines victimes ne sont pas vengées, et des innocents sont tués. Une stupéfiante maturité et un ton beaucoup plus électrique et serré qui tranche radicalement avec les 900 précédentes pages, freinées par leur mollesse.
Au final, j'ai lu le roman sans déplaisir, mais aussi sans beaucoup d'investissement. On sent cependant d'excellentes idées à l'oeuvre dans ce coup d'essai qui ne demandent qu'à fleurir ensuite. Dans la catégorie "riche potentiel prometteur", je conserve toutefois une pointe de préférence pour Derniers jours d'un monde oublié. (**)
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Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
Je peux fermer les yeux sur certains tropes propres au YA, le problème est que tout reste au niveau de la mer, tant du style lourd, redondant et répétitif, d'une intrigue restant au stade d'exposition durant plus de sa moitié avant de se mouvoir en roman d'apprentissage générique. Ce dernier point ne serait pas tant un problème si le manichéisme absolu rendait les personnages d'une platitude intégrale. Je lève parfois les yeux devant plusieurs figures de parangon : la meilleure amie est parfaite, le beau pirate est parfait (d'ailleurs, les pirates sont uniformément positifs dans ce roman et semblent aussi bien s'entendre avec le royaume, un vrai nonsens), le seul défaut de l'héroïne est sa faiblesse et sa "noirceur intérieure" (hum). Bon, je connais un peu la vie de Sarah et je sais bien que le roman est en réalité très autobiographique, lui servant aussi de thérapie. Mais à l'échelle d'une fiction, ces persos sont trop sous-développés. Le frère 100% méchant procure quelques frissons, mais son côté unidimensionnel manque de cachet et tout se résout un peu trop hâtivement. Côté worldbuilding, on en reste au minimum syndical. Quelques problèmes de mise en page ainsi qu'une péripétie jamais résolue témoigne de l'absence d'une relecture professionnelle. L'auto-édition a décidément bien des risques. J'accorde à Sarah que le volet romance reste implicite avec une assez touchante description de l'éveil à l'amour, sans oublier un cliffhanger efficace. Mais je ne serai décidément pas de la partie pour la suite de Sarendhel, qui me semble guère surnager plus qu'une fantasy générique de Wattpad. (*)
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Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
Que ce soit la Tour Blanche, Salidar, les Aiels, Rand, les Cairhiens, les Caemlyn... c'est bien simple aucun camp n'arrive à être d'accord avec lui-même, rendant la partie immanquablement fun et imprévisible. Gros coup de coeur pour l'arc des deux camps d'Aes Sedai qui se tirent entre les pattes à qui mieux mieux, avec des coups d'état continuels entre émissaires de la Tour Blanche. Remarquez, ce n'est guère mieux avec Salidar où non content de rebattre complètement les enjeux politiques, Jordan nous lâche deux fracassants twists successifs à propos de la Chaire d'Amyrlin, voire trois en comptant le diabolique tour d'Alanna (j'attends l'explication de gravures avec Elayne, je prépare déjà le popcorn). Les Aielles sont égales à elles-mêmes mais leur décalage complet avec les coutumes des Terres Mouillées n'en restent pas moins exquis, avec de nombreux moments d'humour à la clé, sans avoir besoin de trop solliciter Aviendha qui eut pu devenir un simple réservoir à bombes (quoiqu'on l'aime aussi comme ça). Cela n'empêche pas de multiples gueulantes entre Aiels, Promises et Matriarches, qui n'en restent pas à leurs poilantes joutes verbales mais en viennent aussi aux mains. Quelle tension ! Le respect absolu du ji'e'toh nous vaut par contre plusieurs moments croquants, notamment avec une Sulin rétrogradée mais décidée à servir au maximum son temporaire statut, on s'éclate. Ironiquement, le conflit le plus fort vient de Rand avec... Rand, puisque Lews Therin a définitivement décidé de s'incruster un max. Le duel de ces "esprits" promet beaucoup les amis et je suis même pas sûr que Rand en sorte gagnant. Au lieu de recourir à des descriptions éculées, cette simple idée permet à Jordan de traduire la folie progressive de Rand au cours du livre et des tomes à venir. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'on flippe bien. Après, Mazrim Tain a l'air de bien se porter, donc un espoir pour le Dragon Réincarné ?
Bien entendu, les joueurs continuent de se disputer, le duel à distance entre Rand et les Aes Sedai crépite tout le long tandis que les Aiels se chamaillent avec tout le monde, on les aime, qu'ils ne changent jamais.
Après son absence du tome 5, un vrai plaisir de retrouver Perrin. On le retrouve tel qu'en lui-même, mais avec une angoisse plus prononcée qui en fait le prix. C'est sans doute le meilleur personnage pour mesurer à quel point ce monde est devenu fou, entre un Rand qui part en vrille, des soldats têtus, des nobles en plein Grand Jeu... même le délire alla Maddie-David entre lui et Faile se teinte d'amertume quand la jalousie de cette dernière finit par empoisonner leur ménage. Je me dois de faire remarquer que basiquement, Faile bat froid son mec alors qu'il subit un harcèlement sexuel persistant de Berelain - super perso aussi efficace que stalkeuse-en-cheffe - et Perrin trouve encore le moyen de se penser fautif. Si ça c'est pas de l'emprise...
Je reste assez admiratif de voir des personnages certes forts mais aussi joyeusement imbuvables. C'est simple, dans La Roue du Temps, tous les mecs sont des crétins (sauf Ian et Rhuarc) et toutes les femmes sont des connasses (sauf Min). C'est ça aussi l'égalité. Félicitations au trio Elayne-Nynaeve-Egwene qui arrive à se montrer plus égoïstes et castratrices que jamais. Alors on les aime toujours, hein, ce sont de brillants persos qu'on va suivre jusqu'au bout mais je ne peux m'empêcher que Jordan pointe une certaine tendance du féminin à vouloir contrôler l'esprit des hommes - comme quoi La Roue du Temps est bien moins woke que ce qu'on croit - Entre Sevanna qui veut se venger de Rand, Perrin enroulé autour du petit doigt de Faile, le trio voulant contrôler Mat ou Elayne souhaitant que Rand soit son toutou... tiens, je tenais à féliciter Elayne qui franchit le 6e livre tout en demeurant rigoureusement plate et inutile, plus que 8 tomes pour battre le record, tu peux le faire Elayne. Bon, les mecs valent pas forcément mieux, mais Mat a au moins l'excuse de subir la loi de Murphy avec sa cavalcade d'emmerdes perpétuelles qui finissent par tourner au running gag (les retrouvailles polaires avec les trois femmes sont à hurler de rire). Par contre les mâchoires qui se referment sur Rand, je veux pas faire du victim-blaming mais comme à la fin des Feux du Ciel, il a agi en crétin, la sanction tombe immédiatement.
Ce délaissement de l'action pure aurait pu ennuyer, il se montre captivant par ses entrelacements de dissensions, désaccords, négociations à risque. Après 960 pages de luttes mentales, l'action explose soudain avec la bataille des Puits de Dumai, à ce jour le climax le plus mémorable de la saga. 25 pages ultra concentrées où tous les camps en présence se clashent dans un déluge infernal qui m'a laissé sur le cul. Je ne veux pas faire offense à Tolkien, mais même la bataille des Champs du Pelennor ne m'a pas paru aussi dingue que celle concluant Le Seigneur du Chaos, qui a aussi le mérite d'une scène de massacre impitoyablement gore que n'aurait pas désavoué G.R.R. Martin. Les cliffhangers finaux posent les bases, c'est carré, solide, épique, soufflant, j'ai pris un pied d'enfer avec ce volume très long, mais passionnant de bout en bout. (****)
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
De mémoire, je pense qu'il s'agit du dernier opus où la multiplicité des personnages et des ships, des intrigues et des sous-intrigues n'impacte pas vraiment le rythme de la narration. SI le final ne tend pas encore à se profiler , je trouve aussi que le roman est une frontière concernant l'émergence du Dragon réincarné : le monde commence à se polariser entre alliés et adversaires de Rand, ce qui ouvre la voie vers la Tar'mon Gaidon. Les premières soumissions d'Aes Sedai au Dragon en sont le symbole. Rand est un Héros à la démesure de sa saga, j'en garde in grand souvenir, même s'il apprend aussi à travers ses erreurs.
D'ailleurs bien d'accord sur le fait que la saga met en scène des protagonistes humains, avec leurs défauts, leurs erreurs et leurs mauvais jours, on est dans un intéressant juste milieu entre l'exaltation des personnages chez Tolkien, et une certaine complaisance dans le glauque chez Martin. Bon équilibre aussi concernant le féminisme, avec des figures fortes, aussi courageuses et intelligentes que les hommes mais comportant aussi des faiblesses humaines, loin des postures caricaturales de la série. Cela se retrouve d'ailleurs aussi chez les Réprouvé(e)s A propos de sujets d'actu, avec le recul le livre se montre très parlant concernant le réchauffement climatique !
D'accord aussi sur le spectaculaire final, la Roue du Temps tire aussi parti d'une magie plus orientée baston que chez Tolkien, façon wargames Fantasy. De fait ce final guerrier fait très Warhammer, ce qui est cohérent avec le titre du roman !
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Bien d'accord sur les forces en place qui se stabilisent (quoique je ne sais pas encore ce que pensent les Seanchaniens, on les a pas trop vus jusque-là). L'essentiel du lore et des peuples a achevé de se développer, cette impression d'avoir franchi une étape décisive compte beaucoup dans la valeur de ce volume. Evidemment, voir des persos aussi nuancés dans la saga et aussi peu développés dans la série (malgré les efforts de Rosamund Sedai) témoigne des corrections de trajectoire immenses qu'on attend en saison 2. Si je suis mauvaise langue, vu que je trouve Elayne est le plus pâle perso de la saga, je ne pense pas que ce personnage, au moins, sera raté.
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
En fait, ce tome appelle forcément la comparaison avec son correspondant SF : H2G2, puisque la démarche se révèle identique : univers en folie, sacrifice de l'histoire sur l'autel de l'exploration de l'univers, protagoniste incapable, humour tornade, créatures et péripéties plus ou moins débiles, absurde naissant des improbabilités (l'octarine remplaçant le générateur du Coeur en Or)... Tout dans la Huitième couleur crie une réécriture du Guide du Voyageur Galactique façon fantasy, mais la comparaison ne joue pas en faveur de Pratchett.
S'il réussit son humour à base de péripéties WTF, de remarques ironiques et de rencontres croquignolettes, l'auteur reste bloqué dans un entre-deux où il perd sur les deux tableaux. D'un côté, il renonce à tout scénario général au profit d'une suite de sketches, de l'autre, il aligne basiquement ce qui serait 4 épisodes de série, structurés et fermés, reliés par les deux mêmes héros relativement indépendants. Mais dans le premier cas, il ne compense pas avec un rythme vif, c'est même assez mollasson, dans le deuxième, il est plus préoccupé à construire ses petites histoires qu'à nous faire rire. Adams avait au moins assumé l'absence de tout semblant de structure pour privilégier un rythme burlesque rapide (ironiquement, le livre selon moi le plus faible d'H2G2, le 3e, est le seul à avoir un arc d'ensemble).
Surtout, immergé pour la première fois dans son monde, Pratchett ne sait pas encore maîtriser son cadre et se laisse emporter dans tous les sens. Si le running gag de Rincevent échappant à chaque fois à une mort certaine par une chance de fou fonctionne, difficile de ne pas voir plusieurs "ta gueule c'est magique" disséminés dans tous les coins, notamment le Bagage invulnérable et invincible tombant à point nommé chaque fois qu'il faut sauver notre duo. J'ai été pincé par le chambardement méta où Rincevent se retrouve momentanément sur Terre, le texte reste flou sur ce qu'il advient alors : Rincevent a-t-il remplacé son correspondant humain ? Partage-t-il son cerveau ? Sont-ils un ou deux dans l'avion ?... Le peu de temps accordé aux dieux rend l'intervention de la Dame comme relevant de la même facilité. Cela dit, Pratchett est parvenu à ne pas déflorer l'effet du huitième sortilège pour le moment, un petit suspense qui nous rend curieux, c'est certain.
Heureusement, Pratchett peut compter sur sa formidable imagination, un des points sur lesquels il se montre à la hauteur d'Adams. Après l'hilarant incipit, digne de celui célèbre d'H2G2, l'auteur perfuse un Disquemonde joyeusement hors de contrôle. Que ce soit une magie qui n'en fait qu'à sa tête, une faune et une flore sous acides, une esthétique très colorée, pop, des incongruités géographiques et surtout les persos. Tout le monde est si pénétré de sa propre vérité, de sa propre raison, que toute rencontre résulte dans des clashs burlesques au résultat imprévisible. Tout comme Arthur Dent, prendre un ahuri dépassé comme héros était le meilleur choix pour nous faire découvrir ce monde. Plusieurs de ses créations comme le fameux Bagage, le troll aquatique ou le maître ni mort ni vivant du Wyrmberg font galoper notre imagination comme jamais. On avouera un coup de coeur particulier A LA MORT QUI PARLE QU'EN CAPLOCKS PARCE QUE C'EST LA MORT, VOILÀ, condamné à voir Rincevent lui échapper encore et toujours grâce à un hasard qui doit bien rigoler dans son coin. Rincevent lui-même est parfait en zozo ballotté par les évènements mais le très unidimensionnel Deuxfleurs n'est clairement pas le compagnon rêvé, son flegme ravi devant l'inconnu finit par être répétitif. Je joue à Tales of Destiny en ce moment, du bon vieux JRPG rétro où on joue Stahn, un abruti au grand coeur mais quand même abruti, mais Stahn me fait rire par ses réflexions brillamment connes. Il manque à Deuxfleurs un moteur comique qui tienne la route. Quelques moments se montrent impressionnants de suspense comme la bataille dans l'auberge d'Ankh-Morpork ou le final à Krull (redoutable cliffhanger). Cette folie furieuse ne fait pas l'impasse sur certains moments de grâce comme le dragon superbe invoqué par le touriste, c'est là l'essence d'une fantasy pour une fois 1er degré qui déferle, un passage d'un merveilleux digne d'un conte de fées.
Au final, cette introduction m'a semblée plus prometteuse qu'aboutie. L'histoire et le rythme ne réussissent guère, partiellement sauvés par l'imaginarium cramé de l'auteur. Mais j'ai quand même envie de poursuivre l'aventure, voir ce que Pratchett nous réserve. (**)
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Je sollicite humblement l'emprunt de cette Huitième couleur avant de relire le Huitième sortilège ; histoire de comprendre un peu mieux.
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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