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Série "La Roue du Temps"

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Message  Dearesttara Dim 12 Déc 2021 - 12:41

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Message  Camarade Totoff Lun 13 Déc 2021 - 13:26

Votre mission si vous l'acceptez : lire les 900 pages (environ) du tome 1 avant la prochaine réunion.

Après avoir entamé le roman, je relève le défi !

Souhaitez-moi bonne chance !
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Message  Dearesttara Lun 13 Déc 2021 - 13:51

Bon courage, Camarade ! On attend déjà ta review Very Happy
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Message  Estuaire44 Lun 13 Déc 2021 - 14:05

Bonne lecture et heureux voyage ! hi

Pour avoir un repère : le premier épisode de la série recouvrait les dix premiers chapitres, soit 200 pages en 50 minutes !
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Message  Dearesttara Lun 13 Déc 2021 - 14:08

D'ailleurs on sentait bien le côté assez précipité. De ce que j'ai entendu, jusqu'à l'épisode 3, on reste dans les 500 premières pages.
Curieux de voir comment Judkins a géré le départ de l'acteur jouant Mat après le tournage de l'épisode 6, ça veut dire 2 épisodes sans lui, avant son recast. Peut-être des storylines de Great Hunt et Dragon Reborn qui surviennent plus tôt ?
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Message  Estuaire44 Lun 13 Déc 2021 - 14:17

Peut-être que cela lui prendra deux épisodes pour être soigné à Tar Valon, ou alors il resterait comateux après avoir soufflé dans le Cor ? Il partirait alors pour Caemlyn en début de saison 2, après sa Réincarnation.
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Message  Dearesttara Dim 19 Déc 2021 - 23:19

Après un épisode 2 aussi médiocre que le 1er (c'est terrible, rien ne va, vraiment), l'épisode 3 a été le premier à vraiment me convaincre. Coïncidence ? C'est le premier à s'écarter des romans avec l'introduction d'une storyline originale avec une ravissante aubergiste, une rencontre avec Thom et une gestion d'El Professor, enfin de Logain différentes. Cependant ces changements ne trahissent en aucun cas l'esprit des livres. L'atmosphère de danger persiste, le côté "étranger, nous n'aimons pas les étrangers " des rieurs citadins, la force tranquille du trouvère, mais aussi les flirts amusants qui font souvent le sel des premiers volumes... tout est là, raconté d'une autre manière mais tout aussi convaincante, en prime quelques blagues homoérotiques assez désopilantes (on m'enlèvera pas de l'idée que Judkins s'amuse), mais qui ont le mérite de planter un univers où les gens se foutent bien de la sexualité de qui et qui. Ça reste léger, c'est cool.

J'ai moins accroché à Lan un peu trop supplanté par Nynaeve, mais cela permet à la dame de dégainer quelques punchlines bien senties. Bon, par contre la série continue de persister avec la femme de Perrin, c'était vraiment pas la peine. Après une première rotation grinçante, la Roue commence enfin à assembler ses fils.
Épisode 2 : **
Épisode 3 : ****
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Message  Estuaire44 Lun 20 Déc 2021 - 12:25

Je serai un peu moins dur concernant Shadow's Waiting. La série paie le prix d’un choix plutôt opéré lors du pilote : la représentation de la bataille du Champ d’Edmond. Le roman opère seulement par ouï-dire, ce qui rend l’inévitable baisse d’intensité subséquente nettement moins perceptible qu’ici, durant le long voyage de la Fraternité du Dragon vers Fondcombe (si j’ai bien tout compris). Oui, parce que l’inévitable contraction du récit au fil des chapitres rend encore plus évident la transposition opérée depuis le LOTR, mais là cela provient avant tout du roman, pour être honnête. Perso j’ai ai malgré tout aimé ce road movie, qui accorde la part belle aux comédiens, derechef l’un des grands atouts de WoT, et aux sentiments, sans rien limer des aspérités.

J’ai notamment apprécié la fierté ombrageuse qui naît chez Rand, le Dragon Réincarné affleure et le jeune comédien suit le mouvement de manière plutôt convaincante jusqu’ici. C’est une bonne nouvelle. On a droit à de jolis plans des paysages (très à la Peter Jackson, mais bon) et Shadar Logoth se révèle sinistre à souhait. Après on cède parfois à un certain sensationnalisme au profit de l’aspect visuel, comme lors de la mort du passeur du Bac (en réalité il reste bien entendu sur la terre ferme), mais cela ne m’a pas vraiment dérangé car je suis intimement persuadé que Moiraine Sedai serait bien restée pareillement impavide. Comme toujours, l’important reste de pas trahir les personnages.

Après, oui, l’épisode a des problèmes spécifiques. Le manque de moyens, dont on a bien compris qu’ils seraient conséquents mais pas colossaux (les Tolkiénistes sourient dans leur barbe, ils ont compris) font que l’insertion des personnages dans les bâtiments de Shadar Logoth résulte aventureuse et que les péripéties de la découverte de la Dague sont passées par pertes et profits. C’est dommage, mais, après tout, la Trilogie de Jackson a aussi ignoré les Êtres des Galgals. Par ailleurs, je trouve que Perrin Aybara demeure le personnage le plus foiré par la série, maintenant on lui trouve une explication à la Spiderman pour son Vif, il a visiblement été mordu par un loup radioactif et les autres le sentent bien. Vous ne passerez pas, les Disney Marvel. Si Elyas est du coup supprimé, ce serait vraiment dommage.

Mais le plus regrettable demeure la poursuite de la standardisation d’un récit toujours bien davantage manichéen que le roman. Rand qui déclare que le premier Dragon a détruit le monde alors que le souvent le sauvera, non et non ! Lews Therin Telamon a simultanément sauvé et détruit le monde, cela participe à son aura et projette une ombre sur le devenir de Rand, l’un des axes forts du Cycle. Même si par la suite on revient éventuellement sur cette déclaration, elle reste dommageable (et irritante). Idem pour la scène assez grotesque du bûcher, histoire d’avoir une ouverture forte, présentant les Enfants comme fondamentalement hostiles, alors qu’ils sont plutôt ambivalents et que, là aussi, l’un des enjeux du récit est de savoir s’ils se rallieront à Rand avant la Dernière Bataille. En plus, histoire de bien choquer, on brûle une Jaune, soit l’une des plus aimées des Aes Sedai, et l’Inquisiteur est caricatural au possible, on se croirait chez l’Ordo Hereticus de l’Inquisition Impériale de Sa Divine Majesté. (***)


Dernière édition par Estuaire44 le Lun 20 Déc 2021 - 16:16, édité 1 fois
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Message  Dearesttara Lun 20 Déc 2021 - 12:50

Très bien vu pour Rand, son côté lisse du 1er épisode était manifestement calculé, cela rend ses premiers basculements d'hubris d'autant plus éclatants. Je suis plus amateur de Perrin. Une fois compris sa backstory inutile, j'ai bien aimé retrouver le nounours sensible des romans (je crois que ça va bien cartonner avec Faile). Je ne sais pas si Elyas réapparaît après le tome 1, mais il faisait surtout figure de mentor éphémère. Que Perrin découvre de lui-même son don ne me semble pas irréaliste. De toute manière, même sous le tutélage d'Elyas, il a beaucoup de réticences à utiliser son pouvoir.

J'ai été aussi étonné de la méthode Léodagan par les Capes Blanches, mais il me semble que dès le tome 2, les Inquisiteurs aimaient bien passer à la question tout ce qui leur tombait sous la main. Vu qu'ils considèrent les Aes Sedai comme des Suppôts des Ténèbres, je ne serais pas étonné qu'ils en crament une, cela donne un côté "purification des possédés" qui va plutôt bien avec leur style fanatique. Maintenant, la comparaison avec les sorcières médiévales sur le bûcher me semble vraiment lourde, d'autant que si on se penche sur la question, les sorciers étaient aussi poursuivis en grand nombre par l'Inquisition, que personne n'attend. Et puis malgré leur côté fanatique religieux, les Capes Blanches ont en effet une plus grande ambivalence (Geofram Bornhald en est un bel exemple).
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Message  Estuaire44 Lun 20 Déc 2021 - 13:22

Elyas retrouve Perrin dans le Tome 8, Le Chemin des Dagues, sans entrer dans les détails il jouera un rôle important envers Perrin et Faile, par la suite il va rallier les meutes de loups pour qu'elles participent à la Dernière Bataille. j'ai bien peur que ce savoureux personnage ne soit ici remplacé par une Origin Story cliché au possible pour Perrin/Spidey.

Dans l'Oeil du Monde, on rencontre d'abord Geofram Bornhald, avec une découverte plus complète et équilibrée des Blancs manteaux, ici la première impression est désastreuse, ce sera compliqué de revenir là-dessus ! C'est à vérifier mais je ne crois pas qu-il y ait un seul bûcher de "sorcière" dans tout le Cycle littéraire. ce serait introduire des éléments culturels de notre monde dans un autre qui n'a pas du tout le même rapport aux Aes Sedai. Et puis la Tour ne laisserait jamais faire.
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Message  Estuaire44 Lun 20 Déc 2021 - 14:39

A propos de l’épisode 2

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Message  Estuaire44 Mar 21 Déc 2021 - 1:18

Conformément au roman, A Place of Safety installe dans la durée la scission en trois du groupe survenue à Shadar Logoth. La multiplicité des évènements en résultant assure une vraie densité au récit, d’autant que l’épisode sait gérer son tempo, nous ne sommes pas ici face au zapping effréné du Flux, même si tout se  succède plus rapidement que lors du précédent opus. Par contre la comparaison avec L'Œil du Monde trouve ici ses limites, tant les changements apportés au roman deviennent nombreux et conséquents, au moins comparables à ceux de GoT alors que l’on nous avait vendu une fidélité adamantine au Cycle. Visiblement cela passe crème auprès des fans français, sans doute ravis, et je les comprends, de découvrir leurs héros interprétés par un cast d’une indéniable qualité, dans une mise en scène soignée et avec malgré tout les grands fils de trame de l’histoire qui perdurent. Je le dis sans agressivité ni véhémence, si le Silmarillion passe par la même moulinette, cela ne sera pas la même chanson en ce qui me concerne. Pour la Roue, au lieu d’une moyenne, je vais vais désormais adopter la seule notation grand public, on ne va pas être plus royaliste que la Pierre de Tear.

Si, globalement, on ne s’ennuie pas durant l’épisode, sa division entraîne inévitablement des réussites diverses. Le moins convaincant aura été pour moi le fil Perrin/Egwene, la disparition, hélas confirmée d’Elyas, conduisant à un terrible appauvrissement du récit, dans sa dimension humaine comme dans la transmission d’informations sur la Voie de la Feuille. Même les Loups sont désormais tristement indifférenciés, quelle tristesse. Le pire reste que la coupe a seulement été opérée pour gagner du temps car remplacée par un simple séquençage basique des évènements, les deux protagonistes ne faisant que commenter l’action. Heureusement que les comédiens demeurent excellents, mais le sujet n’apparaît que survolé, en réalité, autant pour le Vif que pour les Tuatha'an.

On s’amuse bien davantage avec Mat et Rand, quitte à ce qu’ils se fassent clairement voler la vedette par une pétillante Amie du Ténébreux, avec une jeune actrice défendant sa partition avec énergie et panache, j’ai beaucoup aimé. Bon, cela tourne un peu au cartoon sur la fin, mais on espère que la donzelle n’aura pas à subir le courroux du Ténébreux où elle se trouve désormais, elle est bien plus enthousiasmante que le triste marchand du bouquin. Deux bémols, Thom, plus jeune et homme d’action que dans le roman, ne conserve plus que des vestiges de sa personnalité de trouvère, alors qu’elle habitait le personnage littéraire. Là aussi on simplifie et on standardise, mais, bon, je vais arrêter d’être le vieux con de service. Pas terroche la chanson, non plus, elle ne sera pas le Toss A Coin To Your Witcher de WoT. Par ailleurs je suis surpris de voir que la Dague n’a pas déjà entrepris de pervertir Gollum, euh, Mat. Celui-ci demeure simplement fidèle à sa personnalité dans la série. Cela viendra sans doute plus tard, mais c’est étrange (pas trace de Fain d’ailleurs). Sinon la présence d’un Aiel si loin de la Terre Triple ou de Tear n’a aucun sens, car... Aaaaahhhh, j’ai dit que j’arrêtais.

Je me suis vraiment régalé avec le retour de la Sagette, vrai moment épique, de mise en scène comme d’interprétation, Zoë Robins a la présence qui convient à la « tonique » Nynaeve, les Sept Tours ne vont pas rigoler tous les jours. Je pense que même pour le grand public il sera déjà perceptible qu’il y a un je ne sais quoi dans l’air entre Nynaeve et Lan, une figure de style classique mais qui s’avère ici déjà fort plaisante, sans rien ôter en intensité aux évènements. C’est un peu dommage que la série ne semble pas assumer que Nynaneve soit une pisteuse supérieurement douée, contrairement au roman, mais bon. Visuellement, tous les échanges dans la forêt sont tous magnifiques et les comédiens sont au top. Félicitations à Rosamund pour son rôle quasi muet, il s’agit d’un exercice de style toujours particulièrement difficile à jouer. Entendre Moiraine soupirer « Siuan » à bout de souffle reste très émouvant, et en plus c’est (quasi) canon. Allez, ok, c’est canon. Mine de rien, la série continue à soigner ses cliffhangers de fin d’épisode, on apprécie au passage que la vive amitié entre Moiraine et mon amie Liandrin soit déjà si palpable. Mais si toutes deux croient que la Torre de Papel a définitivement enclos El Profesor, elles se trompent ! (***)


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Message  Dearesttara Mar 21 Déc 2021 - 9:24

Très fan de tes analyses, Estuaire ! Pour Thom, il est certes plus jeune dans la série, mais il me semble qu'il est aussi un homme d'action enthousiaste et compétent dans les romans. On se souvient bien comme il sort du tome 1, comment il neutralise un assassin dans le tome 2, et comment il lutte vaillamment aux côtés de Perrin dans le 3 dans un sale état. Oui, le côté trouvère est pas très affirmé, mais il ne me semble pas voir d'exagération.

Pour le reste, un plaisir de te lire encore et encore !
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Message  Estuaire44 Mar 21 Déc 2021 - 10:57

Oui, Thom est un homme qui sait se battre, mais ce n’est pas de ceci dont il est question dans cet épisode. Ici il balance un poignard dans le dos d’une femme, certes pour la bonne cause, ce qui n’est pas vraiment la même chose que de combattre un Myrddraal. Surtout, des hommes qui savent se battre, il y en a plein partout dans les œuvres de Fantasy, assez logiquement dès lors que l’on voyage dans un monde dangereux. Ce n’est pas cela qui fonde la spécificité de Tom, mais bien qu’il soit un Ménestrel. Pour l’anecdote, c’est un plaisir supplémentaire pour l’amateur de Fantasy, car il s’agit d’une classe de personnage à part entière dans D&D, dont Thom constitue un parangon.

Or, hormis une chanson de moins d’une minute, tout cet aspect est systématiquement déconstruit dans l’épisode. Exit la jonglerie et l’art du conte, exit même la cape multicolore indissociable de Thom dans le Cycle ? Même cela lui est retiré. Que reste-t-il à la place? Un homme d’abord inquiétant, rencontré par les Héros dans une auberge et qui va prendre la relève d’une Magicienne désormais absente. En un mot, c’est Aragorn. C’est à dire que l’on déforme l’un des rares éléments du roman lui permettant de s’extirper de l’ombre du LOTR, pour au contraire en revenir tout droit à ce cadre si reconnaissable et si confortable pour le grand public. Cela s’appelle dénaturer un personnage et une œuvre.
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Message  Dearesttara Mar 21 Déc 2021 - 13:58

Épisode surtout de transition, The Dragon Reborn suspend essentiellement les intrigues en cours, du moins avant l'ouragan final. Il faut admettre qu'après la cavalcade certes imparfaite des 3 premiers épisodes, la chute du tempo s'avère brutale, et quelque peu ennuyeuse. Comme dans l'épisode précédent, un arc sur les trois est privilégié, mais l'arc privilégié prend pas mal de temps à décoller contrairement à la fine tavernière. En fait, Judkins ne sait pas trop quoi faire pour faire apparaître le worldbuilding autrement que par les dialogues. Là où cela passe dans un livre, surtout de la densité de The Eye of The World, l'épisode apparaît par trop statique. Même si pour être franc, la montagne d'informations des livres était de toute façon casse-gueule à retranscrire. Les zingaro sont sympas mais tout à expliquer leur mode de vie, les auteurs sucrent les passages les plus intéressants comme le flirt d'Egwene ou le débat moral avec Perrin. Bref, de l'exposition assez platoune. Mat le Taré commence à se réveiller, à la clé une scène authentiquement terrifiante, tandis que l'épisode, assez malignement, mixe la scène de lutte entre Tam et les Trollocs d'une part, et celle avec le Myrddraal avec Thom d'autre part. C'est habile sans être époustouflant. Par contre, on se dirige vers un Thom comme étant le grand sacrifié de la saison. C'est un choix explicable vu les contraintes de temps et de budget mais pas moins frustrant.

L'arc du camp des Aes Sedai se montre évidemment le plus intéressant. Certes, il est surtout utilisé pour perfuser du worldbuilding encore et encore, mais les auteurs ne misent pas tout sur le dialogue. On discerne assez vite le goût de la guerrière Ajah Vert pour les hommes, la misandrie totalement assumée de l'Ajah Rouge, le lien si fort et particulier entre les Champions et leurs Aes Sedai, le trouble entre Nynaeve et Lan. C'est avant tout un épisode d'acteurs où deux lions magnifiques s'affrontent au sens propre comme au figuré : la fielleuse Liandrin, incarnée avec une rouerie jouissive par Kate Fleetwood, et surtout le minéral Logain. Grande amélioration par rapport au livre, Logain joue ici un rôle-clé, et l'impact puissant du jeu d'Alvaro Morte saisit immédiatement, on y croit à fond à ce faux Dragon.

C'est surtout pour sa fantastique bataille de dernier acte que The Dragon Reborn propulse un souffle épique alors il faut bien le dire resté en sous-main. Inventée pour l'occasion, elle n'en demeure pas moins une chevauchée sauvage et sanglante où le savoir-faire de Wayne Yip (tiens, un réalisateur de Secret Diary) fait merveille, nonobstant des CGI encore une fois douteux. Là qu'importe, la violence et le drama éclatent, et l'on comprend sans problème que c'est à Dave Hill, ancien scénariste de Game of Thrones, qu'ait été dévolu d'écrire cette séquence-clé, riche en évènements et twists, où Logain et Nynaeve dominent les débats. C'est proprement exécuté. (***)
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Message  Camarade Totoff Mar 21 Déc 2021 - 15:02

Je vis un drame. Je VOUDRAIS lire vos critiques mais comme j'ai commencé à lire les romans, je ne peux pas sans risquer de découvrir la suite.

C'est injuste, c'est vraiment trop injuste... Sad
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Message  Dearesttara Mar 21 Déc 2021 - 15:19

Tu les découvriras plus tard. Dis-toi que les 4 premiers épisodes, de ce qu'on en a vu, en restent au tome 1 (avec déjà des différences originales). Quand tu auras fini le tome 1, tu pourras déjà commencer à regarder la série et nos critiques ! Very Happy
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Message  Estuaire44 Mar 21 Déc 2021 - 16:28

On verra en fin de saison où on en est, mine de rien on en arrive à la mi saison et le premier volume est loin d'être épuisé, en réalité. Mais je pense qu'une bonne partie du volet Caemlyn est mis à la poubelle, cela va accélérer les choses.


The Dragon Reborn confirme que, décidément, la série a bien largué les amarres et s’est presque totalement désolidarisée du Cycle. Cela vaut pour les évènements - toute la vaste séquence Aes  Sedai vs El Profesor est exogène- aussi bien que pour les personnages, avec notamment Nynaeve qui accède au Pouvoir Unique non plus quand elle est en colère mais quand elle est en proie à une vive émotion. En 2021, il est devenu inimaginable qu’une héroïne présente le moindre défaut qui soit, il est donc hors de question que l’une d’entre elles soit simplement irascible. Donc, une nouvelle fois, on standardise, on simplifie (adieu le tirage de couette, parti rejoindre la cape de Thom au rayon des accessoires indésirables), tandis que l’on coche les cases en coulisses.

La petite course à l’échalote de savoir qui des cinq Ta’veren est le Dragon résulte également totalement absente du roman, car pour le lecteur il est d’emblée parfaitement évident qu’il s’agit de Rand, puisque la majorité du bouquin est centré sur lui. Au passage comme on y aperçoit d’abord Logain à Caemlyn (avec une puissance savamment suggérée plutôt qu’exhibée) et que cette ville n’a quasiment pas été évoquée jusqu’ici, on peut raisonnablement se demander si le groupe va y passer. Si non, cela fera des économies et tous ceux qui ont décrété que la série était formidable et fidèle l’avaliseront comme ils ont avalisé le reste. Elayne et Morgase si vous nous lisez : on vous aime.

Bon, je ne ne vais pas m’appesantir sur une cause perdue et dont tout le monde se moque, d’autant que l’opus ne manque pas d’attraits par ailleurs. Ainsi il prend le temps d’approfondir et de compléter l’univers de la série, un élément toujours clef en Fantasy, notamment concernant les Ajahs, les Liges, les Rétameurs et la Voie de la Feuille, ah pardon, le « Paradigme » de la Feuille, trop stylée cette nouvelle traduction. L’épisode apparaît bourré d’infos à destination des non lecteurs. sur des notions jusque là simplement jetées en l’air. C’est bien, c’est même louable, on manifeste enfin du respect envers le Cycle. Les Tolkiénistes, avec leur fameuse introduction sur l’Herbe à Pipe et les Généalogies de la Comté, sauront apprécier l’effort, je pense.

Concernant le segment Perrin / Egwene, c’est simple, j’ai tout aimé. Egwene et le jeune Rétameur s’interrogeant sur leur avenir en contemplant les étoiles, ou Perrin retrouvant fugacement le sourire en œuvrant le métal forment autant d’émotions simples et universelles, qui parlent au cœur. Je l’ai déjà dit, je le redis parce qu’il le mérite : le jeune cast de la série est formidable. Tout est magnifiquement filmé, ce qui ne gâche rien. Allez Rand, il faut tous les sauver, ces Rétameurs.

Pour le segment Rand et (surtout) Mat, c’est plus mélangé. L’effet horrifique est réussi, mais au prix d’une improbable accélération de l’emprise de la Dague, on passe de tout à rien, là où le roman avait su être progressif. Le Sans-Âme est réussi mais les apparitions oniriques de Ba'alzamon demeurent minimalistes , sans même un dialogue, une question de budget ? Mais la scène magique quand ce bon vieux Thom indique être Ménestrel (ok, « Trouvère », zut). Et là cela en devient philosophique en Diable, les amis, car c’est strictement la seule fois où ce fait existe. Or l’existence précède-t-elle l’essence ? Thom est-il Ménestrel par le seul fait qu’il soit perçu comme tel par autrui ? Jean-Sol Partre n’est pas loin. Allez, salut Thom, à la revoyure. On te laisse causer avec ton pote, vous semblez avoir bien des choses à vous dire. Nous on va aller voir le Witcher, tu sais, la série avec un Ménestrel dedans.

Le gros morceau de l’opus demeure bien entendu le volet Aes Sedai vs El Profesor, qui, face à toutes ces femmes, paie enfin le prix pour Nairobi et Tokyo. Oui, oui, parfaitement, l’immanence du Multivers, tout ça. Avouons qu’Álvaro Morte apporte une présence démentielle à Logain et que, malgré toutes les réserves que suscite le récit, rien que pour lui cela valait le coup, en réalité. Ceci étant posé, on perçoit clairement la balade somme toute relativement paisible du trio vedette jusqu’à Caemlyn était inenvisageable pour la série, il faut le quota de la baston et des SFX. Alors, on triture, on refait le coup de la Bataille des Deux Rivières en montrant la guerre de Logain au Ghealdan, qui n’est qu’évoquée dans le roman. Mais cette fois cela se pratique en percutant les chronologies et en ventilant le récit principal façon puzzle. C’est disproportionné, l’écart avec le roman devient trop conséquent, l’Andor pourrait bien disparaît à l’horizon, soit tout un pan de l’univers de la Roue. On apprécie la bataille, la peinture du Lien, le portrait d’une Liandrin déjà très Liandrin (actrice épatante), la cristallisation entre Lan et Nynaeve, mais on sort ici du roman, en réalité, et cela entraînera sans doute des conséquences pour une bonne partie du reste de la saison. L'Œil du Monde se voile. (***)
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Message  Estuaire44 Mar 21 Déc 2021 - 18:22

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Message  Dearesttara Sam 1 Jan 2022 - 17:18

Inquiétant épisode que Blood Calls Blood. Je n'aurais jamais cru qu'une adaptation puisse réussir à tourner un chef-d'oeuvre de high fantasy en parodie d'elle-même. Mais la vérité est que à l'exception des dernières scènes, l'épisode frôle le nanar pur avec un systématisme qui laisse pantois, quand il ne s'enlise pas dans d'interminables dialogues.

Malgré la condensation accelerando imposée par le budget (on a compris que Caemlyn allait fusionner avec Tar Valon), ça cloche de tous les côtés. En se privant pour le moment de Ba'alzamon et de ses minions, Judkins n'a tout simplement aucun méchant à sa disposition à ce moment des livres. Il tourne donc les Capes Blanches en principaux antagonistes (bien triste simplification). Or, il faut admettre que Valda, dont le nom seul suffit à décrédibiliser toute aura aux yeux des français ayant vu d'antiques pubs comme moi, se montre surtout irritant. C'est quoi ce torture porn à la con ? Ce dilemme du prisonnier débile ? S'il est vraiment sûr de capturer une Aes Sedai, pourquoi laisser autant de champ libre à Egwene ? Quand c'était Perrin qui se faisait les Fils à la paluche et que c'était Moiraine qui dirigeait l'opération évasion, ça pulsait en diable. Là, tout est accéléré, massivement. Franchement, le moment où Perrin confesse avoir tué sa femme est tellement balourd que ça m'a automatiquement rappelé l'iconique scène de Jaguar Force (J'aurais voulu que ce soit moi pas èèèèèllle, je l'aimaiiiiiis). Je veux bien que la Roue tourne comme elle le veut, mais j'attendais plus du Jordan et moins du IFD.
D'ailleurs, l'épisode se fout royalement du show don't tell, et perfuse worldbuilding et backstory à coups de dialogues lourdingues que seul le jeu des comédiens rend tout juste supportable.

Mat continue de déconner certes, mais à part porter du fard et saisir les mains de ses partenaires de jeu, toute la storyline de la dague se voit traitée elle aussi en hyper-accéléré, on n'y croit pas tout simplement. Les retrouvailles avec Nynaeve sont elles aussi tellement hâtées qu'on soupçonne une erreur de montage avec sa scène précédente dans la Tour Blanche. Au moins Loial réussit-il relativement son entrée (sacré look !), mais ses répliques métaphysiques demeurent assez 1er degré, donc assez lourdes aussi, alors que Jordan arrivait à un équilibre fin entre observations fines et drôlerie.

La Tour Blanche demeure la plus intéressante storyline de l'épisode, mais elle est lestée par ce que je pense être la 1re vraie odieuse trahison de la série. Jordan a créé un monde égalitaire, penchant même vers le matriarcat (souveraines puissantes surclassant les souverains, dynastie matriarcale de Caemlyn, pouvoir des Aes Sedai exclusivement féminin), et voilà que pour tirer un lourd parallèle avec notre monde, on souligne la domination masculine des zhôôôômmes de ce monde, comme sur Terre. Un message social d'empouvoirement louable justifie-t-il un appauvrissement tel de l'univers de Jordan ? De plus, Judkins semble ici justifier la misandrie totale de l'Ajah Rouge, dans un raisonnement puéril et facepalmesque. Pauline Harmange likes this. Les machinations politiques des Ajahs sont en sourdine, mais elles devraient plus se développer dans l'épisode suivant. Morne panorama, tout juste redoré par Kate Fleetwood, décidément le casting parfait pour la fielleuse Liandrin, quel peps ! Rosamund Pike étincèle, c'est un pléonasme, mais qu'il est toujours bon de rappeler.

En vérité, l'unique bonne idée de l'épisode est dans sa peinture de la camaraderie masculine et du lien entre Aes Sedai et Champion. La série montre très bien ce lien au-delà de l'amitié, de l'amour, de la servitude volontaire, ce lien vraiment plus fort qu'un lien d'amants, qui trouvera un héritier réussi chez les Parabatai de Shadowhunters.
Dans un étonnant contrepoint, les relations empoisonnées entre Aes Sedai contrastent avec le franc soutien, la belle amitié sensible entre Champions. Le désarroi de Stepin touche au coeur, tout comme la coda, le seul moment où l'épisode palpite enfin. Lan s'y montre curieusement expressif mais à sa décharge, la situation me semble justifiée, jusqu'à troubler le stoïcisme olympien de Moiraine. Bon, la scène correspondante du livre était bien plus ambivalente, montrant une Moiraine assez manipulatrice envers un Lan vu comme une sorte de toutou à passer de maîtresse en maîtresse, mais la version édulcorée de la série, plus bouleversante, m'a saisi, je l'admets. Je ne sais pas si les liens entre Champions sont explorés après le 3e livre, mais ce focus était un bel effort pour Bored Calls Bored. (*)
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Message  Estuaire44 Mer 5 Jan 2022 - 10:32

Blood Calls Blood débute par un magistral « Un mois plus tard », la série ne pouvait pas signifier plus clairement que toute la marche vers Caemlyn en vérité ne l’intéressait pas, car pas assez spectaculaire à ses yeux (on l’avait déjà compris). Mais il ne s’agit que d’un hors d’œuvre, car voici que sous nous yeux, nos yeux écarquillés, apparaît non pas Caemlyn… Mais Tar Valon elle-même. Voilà, c’est assez comme si Peter Jackson s’était dit que Fondcombe et Elrond n’en jetaient pas assez à l’écran et qu’il fallait en venir directement à Galadriel. Cette fois la disjonction devient massive entre le Cycle et une série désormais totalement open bar. Outre la question du respect de l’œuvre, dont je sais qu’elle n’intéresse pas grand monde, en réalité, ce bouleversement entraîne déjà des scènes devenues absurdes.

Même loin d’Amadicia, une forte présence des Blancs Manteaux à Caemlyn était envisageable, dans les environs immédiats de Tar Valon, plus du tout. Un surcroît de grotesque se voit ajouté quand on nous montre Eamon Valda, le gars qui crame vives des Aes Sedai après leur avoir tranché les mains, opérer litéralement sous les fenêtres de la Tour, à proximité immédiate de Tar Valon. Même un non lecteur se rend bien compte que cela ne tourne pas rond. Toute la séquence d’interrogatoire en rajoute de nouveau des caisses sur le sadisme grotesque du personnage, mais aussi voit Egwene invoquer le Pouvoir Unique sans avoir reçu la moindre leçon de Moiraine jusqu’ici (pas mont en tout cas), ou Perrin devenir un quasi Loup Garou, un festival. parler d'un monde dominé par les hommes dans l'antre même de l'Ajah Rouge et alors que tant de sociétés y sont dominées par les femmes fait pâlement sourire. Qu'il est triste de voire une œuvre déformée pour simplement cocher une case de plus. Il y a bien le cas des Damanes, mais même les Seanchans sont dirigés par une Impératrice et le Corenne n'est pas une œuvre de bienfaisance.

Il y a de bonnes choses dans l’épisode, Tar Valon et la Tour sont superbes, de même que les statuettes des Réprouvés (on repère aisément Lanfear...), qui font comme un écho à la poupée ayant astucieusement introduite Birgitte.  Toute l'émotion autour du drame et du Lien entre Lige et Aes Sedai est exprimée avec force, mais le problème est que cela fait largement doublon avec l’opus précédent, alors même que les coupes opérées nous ont privé d’excellents personnages comme Min, Elyas, Bayle Domon… Du coup, difficile de ne pas se sentir floué par cette redite. Le vrai succès réside dans la réussite de Loial, notre ami Ogier, incarné avec entrain et sympathie avec un nouveau jeune comédien parfaitement choisi. On est un peu triste de le voir mis au service d’une facilité scénaristique (Nynaeve, the Return), mais il aura largement l’occasion de se rattraper dans les Voies.  Enfin, on suppose, car désormais tout peut arriver… ou ne pas arriver ! (**)
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Message  Dearesttara Mer 5 Jan 2022 - 14:27

Au sujet de la présence des Capes Blanches près de Tar Valon, il me semble que la fine équipe croise une troupe tout près de la cité au début du 3e tome, avec Nynaeve, Egwene et Elayne perdant légèrement patience (avec un 32354e coup de gueule de Verin en prime). Maintenant, vu les exactions commises par eux dans la série, ça paraît en effet peu probable ; même si on a pas lu les bouquins, ce n'est juste pas logique.
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Message  Estuaire44 Mer 5 Jan 2022 - 16:18

Ah oui, une simple patrouille avancée, dans le contexte de "guerre froide" des romans, oui, bien sûr. Ici on est dans Total War Inquisitor, avec Valda qui est installé à demeure et qui trie littéralement les gens entrant dans Tar Valon, bonjour la subtilité de l'adaptation. La pastille a du mal à passer.
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Message  Dearesttara Dim 9 Jan 2022 - 2:59

Brandon Sanderson lui-même a déclaré que cet épisode était le meilleur de la saison. On peut légitimement se demander combien il a été payé car The Flame of Tar Valon persiste dans son enchaînement de choix malencontreux et de statisme général, même si bonne nouvelle, quelques scènes attirent l'oeil, contrairement à la foirade générale de l'épisode précédent.

L'épisode part assez mal avec une séquence d'Origin Story de Siuan Sanche dont on se contrefout royalement. La dame en impose assez comme ça dans les romans, je n'ai pas l'impression que connaître son passé gratuitement, comme ça, serve à quelque chose. Fort heureusement, les directeurs de casting se sont surpassés une nouvelle fois, la toujours talentueuse Sophie Okonedo incarnant à merveille cette dualité d'hiératisme froid et de sensibilité réprimée par les devoirs de sa charge qui forment toute la complexité de la Chaire d'Amyrlin. Les scènes avec Moiraine fonctionnent à merveille.

Malheureusement, il faut déchanter par la cruelle gestion de la storyline de Mat. Déjà, la dague de Shadar Logoth, qui nous avait tenu en haleine pendant 2 volumes et demi, se voit ici promptement expédiée, neutralisant aussi bien l'aspect dangereux de la dague que menaçant de transformer Moiraine en pourvoyeuse de Ta gueule c'est magique. Surtout, on comprend bien que les producteurs ont dû gérer la terrible nouvelle de l'abandon de Barney Harris, parti sans même honorer la fin de son contrat. Mais n'aurait-il pas été plus simple que de le laisser marmonner des mots anciens entre deux farnientes plutôt que de lui faire prendre la porte d'une manière si cavalière ? D'autant que Jordan n'avait pas hésité à mettre Mat hors service pendant la plus grande partie de La Grande Quête. Un gâchis qui n'est même pas justifié pour un cliffhanger efficace tant l'ouverture des Chemins suffisait.

Beaucoup de bavardages, mais les promesses d'une Tour Blanche à la House of Cards qu'on aime tant dans les romans sont circonscrites à un échange impavide entre Moiraine et Liandrin. Le chantage de Moiraine ne fait sens que si on connaît la véritable allégance de Liandrin, mais pour les non-lecteurs, on a l'impression d'une nouvelle trahison de personnage. Cela m'étonne même que Moiraine ne se méfie pas. Alors, on essaye de tirer la carte de la modernité avec la canonisation d'un couple queer qui sauf erreur ne figure pas dans les livres. Pourquoi pas ? Les actrices sont parfaites, on arrive à y croire, mais on peut se demander si cette relation amoureuse ne se révèle pas moins riche que l'amitié magnifique dépeinte dans les livres. D'autant que cela permet surtout de perfuser des infos plus très fraîches dans des dialogues interminables, donne à la scène du jugement un cliché rebattu de ce genre d'histoires, tout en amoindrissant fortement l'effet de la sentence. Non, je suis sceptique. Je suis finalement plus ému par Moiraine activant et désactivant à volonté le lien avec Lan, où on retrouve l'ambivalence du lien Champion-Aes Sedai et la dépendance totale des premiers aux secondes. Henney a tout compris au personnage, il parvient toujours à exprimer avec presque rien tous les tourments de Lan. Je persiste à penser que c'est l'un des meilleurs atouts de cette adaptation de plus en plus décevante.

On ne va pas nier qu'il existe de bonnes scènes. La 1re scène à la Tour Blanche se montre jouissive en diable, entre le duel Logain-Siuan bien aigu et surtout une Liandrin parvenant à parer l'orage de la Gardienne des Sceaux en le renvoyant sur Moiraine avec une effronterie grand train. Kate Fleetwood prend un pied d'enfer à jouer cette Aes Sedai qu'on adore détester, et c'est communicatif à souhait. Il est troublant de voir pour la première fois Moiraine craquer l'armure, mais il faut dire que Rosamund Pike est une nouvelle fois divine, avec cette grande économie de moyens dont elle fait preuve pour décrire la moindre émotion. Un jeu particulier qu'adopte aussi Okonedo, avec sa justesse habituelle, y compris face aux punchlines de Nynaeve (qui doit absolument continuer à nous faire ses crises, on l'aime comme ça).

En fait, je me demande si cette adaptation n'est pas piégée dans une quadrature du cercle. Après le coup d'éclat de Game of Thrones, The Wheel of Time semble désespérément plus classique, parce que la saga l'est. Jordan n'est pas aussi audacieux ou innovant que Martin, ses qualités sont dans l'immensité de la saga et l'évolution parfois ténébreuse des persos, qu'on ne peut encore saisir au bout de seulement quelques épisodes, ou son style riche et dynamique, aux descriptions éblouissantes, qui évidemment ne passent pas à l'écran. Je pense que Judkins le sait, d'où sa volonté de s'éloigner assez profondément du matériel original. L'initiative est bonne je pense, mais maladroitement exécutée, les nouveautés se révélant au mieux décevantes au pire des trahisons. En fait, on retrouve dans cette série un style davantage proche de Sanderson que de Jordan, plus direct, vif, mais au moins Sanderson est un excellent conteur, qualité qui manque pour le moment à Judkins. (**)
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Message  Estuaire44 Mar 11 Jan 2022 - 10:10

The Flame of Tar Valon présente le paradoxe de camper un épisode particulièrement prenant, sans doute le meilleur de la saison jusqu’ici, tout en ne par venant pas à s’extraire des conséquences malheureuses de la distorsion apportée aux romans, toujours plus marquée. La série s’offre ici son épisode « Intrigues à Port-Réal » avec des rebondissements suffisamment rythmés pour réellement susciter l’intérêt. C’est d’autant plus vrai que l’ensemble bénéficie de beaux décors et costumes, même si en définitive seule une faible partie de la Tour nous est révélée, avec peu d’artefacts. Mais nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir (même s’il ne faut plus jurer de rien…). Le récit a surtout la bonne idée de laisser bride abattue à Rosamund Pike.

Celle-ci n’a jamais été aussi centrale dans un épisode et elle joue tout aussi admirablement les différentes partitions d’une Moiraine déchaînée, triomphant de tous les traquenards de la Tour tout en parvenant à (très) rapidement rassembler sa troupe, il est vrai bien aidée sur ce point par le scénariste. Elle a aussi droit à une partenaire de choix en la personne de Sophie Okonedo, d’autant que celle-ci retrouve en partie des intonations à la Liz 10 de Doctor Who. La relation entre les deux femmes, seulement fortement suggérée dans les romans (leur amitié particulière datant de leur noviciat commun), se voit ici montrée aussi expressément que possible. Pourquoi pas, d’autant que l’émotion est bien au rendez-vous. Bon, la vanne sur le « mets toi à genoux », on aurait pu s’en passer (oui, je suis en plein marathon Sex and the City).

Malheureusement, toute cette découverte de la Tour survient bien trop tôt, le roman proposait un panorama global de l’univers de la Roue et des forces en présence, ce qui permettait notamment de pleinement embrasser la singularité et la puissance du statut des Aes Sedai, même en déclin assez sans équivalent dans les Mondes de la Fantasy, bon, le Bene Gesserit en SF. Nous n’avons jamais vu les Aes Sedai en « conseillères » des Rois (désolé, Elaida), nous n’avons pas assez ressenti l’aura de l’Ordre. Je trouve que la série ne nous a pas assez fait rêver à Tar Valon avant que de nous la révéler, un gâchis que ne commet certes pas le Cycle (le Mont du Dragon est à part).

Et puis on trouve ce flot de n’importe quoi que charrie désormais WoT à chaque épisode. Lan a clairement l’occasion de remarquer le Héron sur l’épée de Rand, et cela ne suscite toujours pas la moindre interrogation de sa part. Il s’en cogne, les scénaristes aussi, pas mal de fans français itou, ok. L’entrée des Voies est, bon, basiquement une Stargate Fantasy, voilà. Cela en jette, mais je préférais l’ouvrage délicat du roman. Ouvrage délicat… et ouvrable par les Ogiers, pour qui les Voies furent construites. Ici, l'ouverture du dispositif (de la Porte des Étoiles)  nécessite l Pouvoir Unique, donc les Aes Sedai, c’est à dire l’exact opposé de ce que narrait Jordan : les Ogier ne peuvent pas voyager par eux-mêmes à travers les Voies. Mais qui s’en soucie ? On a une image spectaculaire de plus avec Moiraine, c’est bien tout ce qui compte. Je suis tombé de ma chaise en entendant que l’Oeil du Monde était la prison du Ténébreux en lieu et place du Shayol Ghul. Je dois vivre dans une version biscornue du Tel'aran'rhiod. (***)
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Message  Dearesttara Mer 12 Jan 2022 - 22:32

Après 2 épisodes assez contemplatifs, ça recommence à pulser avec The Dark Along The Ways. Je dédie cette critique aux valeureux scénaristes qui ont tout tenté pour nous convaincre que oui oui, c'est normal que Mat soit resté derrière à bronzer à Tar Valon. Soyons pas vaches, ils se sortent plutôt pas mal de l'évènement jamais agréable qu'est l'abandon d'un acteur. Ils parviennent même à en tirer une force lors de la grande scène de confrontation entre Rand et Egwene, habile. Bon, pour justifier tout ça, les effets de la dague deviennent bien plus forts que dans le roman ; après la conclusion assez précipitée de cet arc, cela ne manque pas de sel.
On peut regretter que le séjour dans Les Chemins demeure assez court, mais je comprends que Judkins l'ait raccourci, car si c'est un magnifique passage d'angoisse, il se passe, ben, rien à part l'attaque du Machin Shin en fin de parcours. La séquence fait le job, mais est assez tiède comparée aux hauteurs Kingiennes du livre. Min arrive enfin, mais dénuée du charme mystérieux de TEOTW. L'actrice ne m'a guère convaincu mais à sa décharge, elle reste cantonnée dans un rôle de prophétesse 1er degré monolithique. On espère que la dame fêlera l'armure dans les saisons suivantes, comme son alter ego livresque. Vu que je n'ai pour Elayne - pour le moment - qu'un désintérêt poli, je ne suis absolument pas pressé de la voir, et son absence de la saison me semble être une bonne nouvelle (oui, je suis méchant).

A l'appui de l'épisode, c'est qu'il est très shipper, bien plus explicitement que dans les romans, mais la gestion du relationnel et des couples demeure plutôt convaincante. Je suis partagé sur la tension sexuelle de malade entre la Sage-Dame et le roi du Malkier, où c'est tout de suite beaucoup plus prononcé que dans les livres, mais le jeu des comédiens et la mise en scène aiguisant patiemment l'attente m'ont totalement pris au jeu. Oui, voilà, Moonlighting, tout ça, j'aime la tension sexuelle, je suis faible, voilà. J'apprécie aussi que ces rapprochements plus explicites ne me semblent pas changer grand-chose à la distance qui sépare Nynaeve de Lan, enfin surtout Lan. Daniel Henney a une présence pas possible, je vais avoir du mal à imaginer un autre Lan dans la tête lors de la suite de ma lecture désormais.
Les auteurs prennent un risque en introduisant l'hypothèse d'un triangle amoureux parmi nos héros, mais le vidage de querelle, conséquence logique de leurs désaccords internes, se montre intense et révèle la fragilité soudaine d'amitiés que nous aimions depuis le début.
Le ship Rand-Egwene fonctionne toujours avec une nouvelle difficulté franchie héroïquement par le couple. Mine de rien, leurs aventures ont déjà commencé à les mûrir, c'est une bonne chose. Mais surtout, l'épisode ose enfin s'aventurer dans un portrait plus trouble de Moiraine.

Même si Moiraine n'a jamais été une lawful good, je suis content que la série réussisse à égaler voire dépasser son ambiguïté morale pourtant déjà bien établie dans les livres. On en avait déjà eu un aperçu avec l'infortuné batelier dans l'épisode 2, mais le quadruple gambit de Moiraine, absent de TEOTW si je me rappelle bien, saisit par son côté irrévocable. Bon, les auteurs se dépêchent immédiatement de parer le danger par un deus ex machina, mais l'effet demeure : Moiraine sera prête à tout pour arrêter le Ténébreux, et elle n'hésitera pas à faire des sacrifices s'il le faut. Rosamund Pike est évidemment à l'aise dans cette ambiguïté. L'épisode place enfin Rand sur orbite, on va voir ce que Josha Stradowski a dans le ventre, l'heure de gloire pour le comédien a sonné. (***)
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Message  Estuaire44 Jeu 13 Jan 2022 - 5:34

A ce point d’écart entre le Cycle et la série, la question pourrait légitimement se poser pour un lecteur passionné (et non mué en groupie) de savoir si cela vaut bien le coup de rester ou non. Bon, la réponse était déjà dans l’air, en réalité, mais The Dark Along the Ways constitue bel et bien l’épisode qui nous fait  rester, tant il voit la série tirer le meilleur parti des postulats qu’elle a mis en place. Déjà le récit s’avère une efficace voiture-balai, récupérant à peu près tout ce qu’il était encore possible de récupérer des livres. Quoique d’un impact visuel limité par un budget conséquent mais pas mirifique, les Voies servent de pertinent point de ralliement pour enfin parvenir au Shienar.

L’absence de Mat, outre le départ de l’acteur, se justifie par une scène très à la Moiraine Sedai. Très sympa de lui lâcher l'Ajah Rouge aux miches et non la Bleue, la Chance du Ténébreux sera nécessaire face à Liandrin… On va bien ici bien au-delà de l'aura scandaleuse de Mat et il reste paradoxal de se rabattre sur la Dague après avoir expédié le sujet aussi vite que possible (bonjour les petits matins blafards dans la Writers' Room), mais ce ne se serait pas fairplay d'en vouloir à la série. On sait combien l'écriture sérielle doit bien plus composer avec les aléas du réel que la littéraire. Quand au jeune acteur, on peut aussi comprendre son départ, incarner le boulet qu'est devenu ici Mat a dû aussi le lasser.    

On a plaisir à retrouver Fal Dara en temps et en heure, et à peu près telle qu’elle devait être, même si on rend le Seigneur Agelmar inutilement orgueilleux et qu’on lui invente une sœur pour bien montrer où réside la sagesse face à l'orgueil masculin. Bien sûr que dans sa situation on accepte toute aide de la Tour et sans rechigner. Fain revient à point nommé et on découvre enfin Min, assez différente de la littéraire (vieillie elle aussi, et plus dure), mais j’ai bien aimé cette solide version, comme toujours impeccablement interprétée même si centrée sur ses pouvoirs. Toute la séquence initiale sur le Mont du Dragon vaut par son spectaculaire combat et son apport valide à la mythologie, par l’émotion aussi que suscite aussi la formidable actrice jouant l'Aiel. WoT doit décidément beaucoup à sa distribution.

Pour le reste l’épisode sacrifie au rituel bien balisé de la veillée d’armes, pas fondamentalement original (GoT a pas mal donné en la matière, notamment pour la Longue Nuit), mais avec ici une vraie réussite. Les personnages se voient confrontés à leurs failles et à leurs doutes, avec une indéniable force dramatique. J’ai en particulier apprécié la romance Nynaeve & Lan. Certes on a droit au couplet sur le consentement et tout cela apparaît bien précipité par rapport aux livres. Mais avouons que le Cycle a bien fait durer les choses et qu’il est assez logique que tout ceci survienne dans cette possible ultime nuit. Et surtout c’est cohérent avec le récit de la série.

J'ai bien aimé qu'Egwene soit déjà l'incarnation de la Tour, là où Nynaeve sera toujours une rebelle. Tout sonne juste, hormis la jalousie soudaine de Rand envers Perrin, mais après tout il s’agit peut-être des prémices de cette folie avec laquelle il aura à se débattre. Car la série a effectivement la bonne idée de lever avant le final le "suspense" quant à l’identité du Dragon Réincarné, d’autant qu’il est astucieux de voir l’énigme résolue par Rand lui-même, avec un joli effet rétrospectif. Perrin est légèrement sacrifié, ce serait bien si la série se décidait à le faire vivre au-delà de son trauma. En avant donc pour la confrontation finale, avec les seuls Rand et Moiraine, donc (pour l’instant), mais là aussi la série assume ses choix. (***)


Les trépidantes aventures de Lan et Moiraine :

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Message  Estuaire44 Jeu 13 Jan 2022 - 6:03

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Message  Estuaire44 Mer 26 Jan 2022 - 23:37

The Eye of The World, ou comment une série ayant donné l'impression d'avoir enfin du vent dans les voiles se conclut par un naufrage en vue du port (oui, je parle comme le Siège de l'Amyrlin maintenant, ma critique, mon melon). Passons d'emblée sur la triste ironie involontaire consistant à opter pour reprendre le titre d'un roman que toute la saison a continuellement tripatouillé, caviardé et dénaturé, on va dire que c'est de la maladresse et pas de la forfanterie cynique. Bref. Le récit se divise en deux parties toutes deux pareillement ineptes, sans doute pour éviter toute jalousie.

La Bataille de la Passe, à peine évoquée en quelques lignes dans le bouquin, prend ici un espace énorme, assez logiquement du fait des possibilités visuelles qu'elle offre. Encore faut-il  avoir les moyens de ses ambitions. Même s'il ne s'agit pas du même type de récit et de Fantasy, on peut malgré tout comparer avec GoT concernant le spectaculaire des batailles et le résultat vraiment mal aux yeux. Il manque pas mal de caillasses à WoT (au moins 10 min du revenu journalier de Jeff Bezos) pour échapper à la Malédiction du Fond Vert. On reste très très loin de la Bataille des Bâtards ou de la Longue Nuit, ce chef d’œuvre aussi bien épique qu'horrifique.

Et puis, une nouvelle fois dans cette saison, le bruit des cases que l'on coche se fait entendre. Exit le Seigneur Agelmar, le voici bien récompensé d'avoir été un précieux et constant soutien du Dragon Réincarné tout au long du cycle. On le zigouille pour que la victoire soit le fait des seules femmes, avec des pouvoirs assez déments accordés à Amalisa, alors même qu'elle a été recalée à Tar Valon. De même Egwenne (sauf erreur) se voit dotée du don de résurrection, que personne n'a jamais eu dans le Cycle, hormis le Ténébreux lui-même (et encore, il s'agit plus de réincarnation). Pour mémoire, Amalisa ni n'est co-dirigeante ni dotée du Pouvoir Unique dans les romans. Bref, c'est une nouvelle fois open bar : effets spéciaux et air du temps en même temps, le rêve. Bien entendu Fain n'a rien à voir avec l'inquiétante loque imbibée de folie des romans et nous fait le coup de « je te raconte le Maître Plan et ensuite, juste je m'en vais, voilà. C'est très malin. ». Au passage il est bien possible qu'on nous ait tué Loial. Bref.

Dans l'autre volet, même topo. Évidemment on comprend que la série n'avait pas les moyens de représenter le Jardin ou le Géant Vert, avec ou sans maïs, éléments d'ailleurs promptement mis sous le tapis avec cette histoire de remplacement par le Shayol Ghul (rien qu'en tapant ces mots, je suis en colère). Mais, vraiment, ne pouvait-on pas faire mieux qu'un semi égout comme décor de la confrontation finale ? On apprécie aussi l'effacement du visage onirique du Ténébreux via une pirouette supposée humoristique, la série n' éprouve aucun souci pour rouler des mécaniques et s'affirmer crânement comme meilleure que le roman, chapeau bas. Bon, le titanesque combat final n'est pas non plus au programme, la caillasse, tout ça, mais, là aussi, ne pouvait pas trouver mieux pour le remplacer que l'ultra poncif « rejoins-moi et tous tes vœux seront exaucés ». Quel manque d'imagination.

On entend aussi la même musique que pour la bataille, car en définitive si Rand l'emporte, ce n'est pas pour ses qualités de guerrier ou de maîtrise du Pouvoir Unique, non, c'est parce qu'il a bien compris qu'il est rigoureusement impossible qu'une femme libre et forte comme Egwene préférât demeurer au foyer, plutôt qu'aller bosser. Il gagne car c'est un mâle déconstruit, le mec plus ultra. On a aussi Nynaeve qui indique avoir apposé une « marque » sur Moiraine et qui va montrer à Lan comment s'en servir. C'est quoi cette histoire d'une facilité total, elle lui transfère du Saidar ? La « magie » des hommes et celle des femmes sont de nature différente, à peu près tout l'univers est basé là-dessus, mais, bon, open bar. Il aurait été plus immédiat que Lan, dont le royaume est à côté et qui a sillonné la Désolation durant des années avec Moiraine, sache tout simplement où se trouve l'Oeil, on alors qu'il piste leur trace. Mais non, il faut que ce soit une femme qui règle ce problème là aussi.

Breeeeeef. Comme souvent à la fin des narrations médiocres, les auteurs placent un effet spécial massif, histoire de faire oublier les faiblesses et d'inciter le public à revenir. Le Corenne débute donc par un tsunami massif, qui va priver les Seanchans des ports et voies de communication leur permettant de débarquer puis de se déployer, tout ça pour, au mieux, détruire des troupes dont ils avaient de toutes manières largement les moyens de ventiler façon puzzle. Cela commence rudement fort, cette affaire. (*)
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Message  Dearesttara Sam 29 Jan 2022 - 0:10

C'est sanglant, Estuaire, mais pas tout à fait immérité. A mon sens, The Eye of the World est un finale de saison à la hauteur de ce qui a précédé : énormément de déviations des romans introduites par les auteurs, avec un ratio hélas très déséquilibré en faveur des errances.

J'ai apprécié quelques trouvailles, comme l'idée de se servir d'un sa'angreal pour démultiplier la puissance de Rand, c'est tout simple et ça évite le bug du premier roman où Rand déchaîne les enfers comme ça sans l'avoir demandé. Donner une sévère correction à Moiraine qui a traversé indemne les premiers livres tombe à point pour relativiser la toute-puissance de la dame. Alors que les livres nous rappellent souvent que le Pouvoir rend fou, ce sont surtout les infortunés hommes qui servent d'exemple et assez peu les femmes. Voir Amalisa succomber à l'ivresse de sa propre puissance, avec dommages collatéraux massifs, permet de rééquilibrer quelque peu la balance.

En vérité j'ai bien aimé l'épreuve de Rand, qui est une transposition assez maligne de la 2e épreuve d'Egwene face aux arches d'argent de Dragon Reborn, mais du point de vue de Rand. J'apprécie comment sa perception de la vérité est troublée tant qu'il ne pense qu'à lui. Ce n'est qu'en se rendant compte qu'il perd Egwene qu'il parvient à sortir de la diabolique illusion du Ténébreux. Là où le bât blesse, c'est que assez peu pour une confrontation finale. Au bout d'un moment, on veut des déflagrations et des mandales par paquets de cent, c'est de la high fantasy oui ou non ? Ça manque de sueur et de sang là. Comme d'habitude, Rosamund est stellaire, je suis amoureux de ses intonations de voix, où elle sait imprimer tellement de force et d'expression sans monter le son. The Eye of the World est un Rosamund Pike show, davantage que Josha Stradowski encore un peu juste en Rand. Mais maintenant que son perso a senti les ténèbres, l'acteur a toute lattitude pour troubler son jeu. Sa fuite en avant, transposition du début du 3e volume encore une fois, me paraît tomber à point, c'est même le cliffhanger le plus réussi de l'épisode.

Malheureusement, The Eye of the World charrie aussi bon nombre de ratages. Je suis content que la série ait engagé un constructeur de langues, mais remplacer le tonitruant prologue par de la discutaille pas très utile me paraît pas la meilleure introduction à Lews. J'aurai préféré à la rigueur qu'on s'en passe. Surtout, Judkins avait le choix entre deux voies. La première était de coller aux romans et de mettre toute la petite troupe dans la Flétrissure (moins Mat, mais bon, on ne peut pas leur reprocher de ce côté). Avec l'astuce du Sa'angreal, le showrunner avait les coudées franches pour transcrire le convaincant affrontement final. Le 2e choix était de tout changer et tenter de se mesurer à Jordan pour créer un climax différent et au moins aussi fort, c'est-à-dire prendre un risque inconsidéré, uniquement valable si Judkins avait un talent équivalent à celui de Jordan.
Et sans grande surprise, Judkins est en-dessous de tout. En plus d'une Moiraine réduite à l'état de témoin passif (pour le final, sérieusement ?), la Flétrissure est certes impressionnante visuellement, mais assez pauvre en menaces. En s'abstenant d'un affrontement physique avec le Ténébreux, le set-up débouche sur un payoff très faible. Le casting calamiteux de Fares Fares est un coup terrible. Dans le roman, c'est un être de ténèbres avec des yeux de flammes, dans la série, c'est un patron du CAC 40 issu des minorités, non mais stop, c'est quoi ce délire ? Le cliché de la tentation du Grand Gentil face au Grand Méchant n'est pas relevé par quoi que ce soit. Bref, une confrontation qui déçoit à peu près partout.

Alors que l'épisode se bat contre des longs dialogues intempestifs qui paralysent le rythme du final (Padan, s'il te plaît, ferme-là, juste), le front de l'Armée n'est pas plus convaincant. Il est vrai que tout est arrangé pour que les seules femmes triomphent. Jordan a beau avoir construit un monde où les femmes ont le pouvoir, les moments décisifs sont mixtes, à l'image des Aes Sedai et de leurs champions. Une belle perte de saveur à l'écran. Que 5 sorcières de force moyenne détruisent une armée de Trollocs et de Myrddraals à elles seules, quitte à en mourir, a comme des airs de Final Fantasy V (Galuf, on t'aime, à jamais dans nos coeurs) mais se fait surtout en dépit de toute crédibilité. J'espère vraiment qu'ils n'ont pas tué Loial parce que là, va y avoir des émeutes près de la Tour Blanche des scénaristes. Sinon, il a servi à quoi Perrin ? Toute la bataille crie le manque de budget, avec un Ciaran Donnelly bien obligé d'en recourir à une réalisation uniquement fonctionnelle. Je sens le mec frustré, je suis sûr qu'il avait en réserve des bons plans (le reflet de Rand en contre-plongée, tiens, ça c'est du plan qui sert à rien, mais c'est bô quoi). J'ai effectivement pensé à la Longue Nuit, mais Sapochnik avait du budget, lui.

Pire que décevant, on est à la limite du ringard, de la fantasy de dernier ordre, ce que La Roue du Temps n'est jamais au grand jamais. Merci quand même à Lorne Balfe pour la BO, je ne partais pas convaincu, mais son approche plus éthérée et intime m'a convaincu sur le long terme. Il se départ du modèle Djawadi et produit un son qui fonctionne bien, même si ça se fait au prix d'un manque de thèmes reconnaissables hors générique. (**)


Saison 1 (**) : La série prend le parti de s'écarter très tôt des romans, une initiative parfois performante - en gros, ça marche qu'avec Moiraine - mais le plus souvent manquée. La série subit une ringardisation systématique des meilleurs éléments du roman et une absence de souffle épique frustrante, due en grande partie au budget. Demeure un cast le plus souvent épatant, avec Rosamund Pike en majesté pure (comme d'habitude en fait).
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Message  Estuaire44 Sam 29 Jan 2022 - 1:17

Je pense que l'astuce du Sa'angreal de Moiraine ne pouvait pas fonctionner dans le roman : ces artefacts sont ou mâles ou femelles, du fait de la distinction entre Saidin et Saidar. Celui de Moiraine est évidemment féminin. En fait, Rand ne maîtrise pas encore le Saidin à ce moment là et, contrairement à ce qu'elle profère dans l'épisode, Moiraine ne peut pas le lui apprendre, car elle n'y a pas accès et en ignore tout. Les seuls qui auraient pu apprendre à Rand à se servir du Saidin et donc de l'artefact sont les Aes Sedai masculins, morts depuis des milliers d'années.

De fait, pour permettre à Rand de progresser sur la voie du Saidin, les romans feront appel à un Réprouvé masculin comme instructeur, pas à Moiraine. Dans la série, tout se passe comme si Moiraine offrait purement et simplement Callandor à Rand. Callandor est  masculin et dépourvu de tout obstacle à son usage destiné à empêcher de trop puiser dans le Pouvoir Unique. En fait durant toute la saison la distinction entre Saidin et Saidar a été constamment éludée, voire niée par moments, comme ici. Ou quand Moiraine déclare que le Dragon peut être un homme ou une femme. Open bar.
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