Série "Doctor Who"

Dearesttara a écrit:Et le peuple goûte quand même ses paroles avec révérence.

Je n'ai pas cru voir un message parlant de "réserves" sur l'ère Moffat ?

Dernière étape du The Flux, The Vanquishers pousse hélas à son paroxysme la propension du serial à zapper frénétiquement d'une scène à l'autre en lieu et place d'une narration permettant de savourer une intrigue développée. On zappait déjà à travers la Terre, l'Espace et le Temps, voici que l'on zappe aussi d'un Docteur à l'autre. Un excuse bien pratique pour tenter de justifier un final bâclé, tassant une action correspondant, au moins, à trois épisodes normaux. Doctor Who se caricature avec ce Flux cosmique, dévastant tout un Univers pour finir dans le ventrou d'un gars, après avoir dévoré des myriades de Galaxie (gag) De plus, déjà présent auparavant,  l'effet d'accumulation joue à plein, j'avoue avoir saturé et mettre détaché de cette esbroufe à mi-chemin.

C'est d'autant plus vrai qu'à cette schématisation de l'action et des personnages s'ajoute de vraies maladresses. Le Sontaran trahissant Sontar pour des barres chocolatées est en contradiction totale de la psychologie de ce peuple. C'est aussi lourd que l'Ambassadeur soviétiques se pâmant pour les plaisirs du capitalisme dans Chapeau Melon, sans l'excuse de se situer dans les Sixties. Est-ce que le serpent immatériel ne pourrait pas se glisser à travers la porte et soulever le bête verrou censé emprisonner son alter ego ? Survendue avant son effondrement ridicule, la Division est encore mobilisée façon Amanda Waller dans Suicide Squad, mais cela ne prend plus. S'il faut reconnaître que le zapping s'attache à résoudre tant bien que mal le plus possibles d'intrigues en cours, il n'y parvient qu'en ayant recours à la figure de style éculée du Deus ex machina, en la personne du Temps.

De plus des pans entiers de l'histoire demeurent ignorés (attendez, la suite de Doctor Who prendra place dans un univers totalement démoli et dévasté, c'est ça l'idée?, la prochaine fois appelez plutôt Roboute Guilliman à la rescousse, conseil d'ami) ou remisés sous le tapis, avec cette solution remarquable de facilité et de décontraction : Thirteen refusant de découvrir ses souvenirs (pourquoi ? Mystère). Après nous avoir fait miroité un passé bouleversant toute l'Origin Story du Doc, Chibnall referme purement et simplement la boite à cigares, circulez il n'y plus rien à voir. Le Docteur a oublié, mais là c'est toute la mythologie de Chibnall qui devient très oubliable, en réalité. Les deux Big Bads ont un plan encore plus foireux que les Sontarans, un comble. Le parcours du grand Serpent, de dictateur galactique à tueur à gages, reste très flou.

Cet épisode final confirme malgré tout ce qui demeure peut-être la plus belle réussite de The Flux, le nouvel équipage du TARDIS a une toute autre consistance que précédemment ?. En témoignent l'indéniable émotion des retrouvailles entre le Docteur et Yaz (Mandip Gill s'affirme également avec énergie), ou lors de l'admission à bord définitive du sympathique et solide Dan. Jodie a ici un bel espace pour exprimer son talent, avec une Thirteen qui aura su profiter du serial pour gagner en dimension. Le trio fonctionne  du tonnerre, on lui souhaite bon voyage en 2022, d'autant qu'un final contre l'épatant Maître de la période semble se profiler (faute professionnelle sinon). Cela compense les adieux assez ridicules avec les Compagnons du jour, avec un humour complètement à contre temps (salut, désolé pour le génocide, amusez-vous bien !), on se croirait dans le MCU, ou alors assez faible pour Kate et Claire. Le scénario force trop manifestement pour faire de Jéricho la victime sacrificielle de rigueur, jurisprudence Anya, mais on a apprécié le personnage, un bel avenir l'attend sans doute dans le Whoniverse étendu. (**)


The Zapping, euh, The Flux, aura su renouer avec cette si particulière  saveur propre à Doctor Who, confirmant ainsi avec éclat un mouvement amorcé lors de la saison 12 (je n'aborderai plus la non-saison 11). Thirteen s'affirme enfin comme une Incarnation non réduite à une bonne copine et le TARDIS se voit enfin doté d'un équipage intéressant, tant mieux si celui-ci se voit réduit à trois personnes. Hélas le récit abuse d'un zapping sensationnaliste permanent, qui a fini par me lasser. Du Moffat peu inspiré, sans les coups de génie propre au Sphinx de la BBC. Au final on ne peut pas s’empêcher de se demander « tout ça pour ça ? ». Contrairement aux serials longue durée de la série classique, qui savaient conclure, il reste ici encore du pain sur la planche, avec un univers non restauré. Cela sera sans doute la tâche des épisodes spéciaux, d'autant que, de tous les grands ennemis du Docteur, le meilleur demeure le seul à ne pas s'être montré, mais il n'est pas adéquat d'avoir à attendre Octobre 2022 pour juger de toute l'entreprise. On apprécie néanmoins l'effort de Chibnall pour raviver la flamme de Doctor Who (***)

Vu le massacre de The Flux, vous ne craignez pas que le Maître soit également démoli par Chibnall ? Il faudrait peut-être mieux qu'il ne se montre pas !

Il est déjà apparu à plusieurs reprises sous la plume de Chibnall et cela s'est plutôt bien passé, à mon avis. Pas tout à fait ses meilleures interventions, mais toujours savoureuses et avec un interprète ayant parfaitement compris qu'il fallait le jouer de manière totalement désinhibée. J'en reprendrais bien encore un peu...

Il est en train de se passer pour Thasmin ce qu'il est advenu pour Supercorp ou Destiel, une partie particulièrement exaltée mais non négligeable, du public y croit dur comme fer et s'exprime via fan fictions, dessins, videos.... Quand la série (ou la période ici) s'achèvera sans que leur marotte soit devenue canon ce sera parce que les auteurs auront été lâches ou qu'ils se moquent du public. Alors que c'est purement du jus de méninges, il n'y a rien du tout dans Flux là dessus. Simplement l'attachement de Yaz à Thirteen s'exprime de manière plus forte que chez les autres Compagnons, mais c'est parce que Yaz et son interprètes sont davantage expressive, ce qui n'est pas bien difficile.

A ma connaissance ce n'a pas été exploité par Big Finish (mais le catalogue est vaste !) mais une histoire non canon a été mise en place via une une série de romans des années 90. La compagne du Docteur s'appelle Patience, la père de Susan est l'un de leur 13 enfants. il fait une carrière politique mais un conflit mortel l'oppose alors à Rassilon. Patience est  sauvée par le Docteur, ainsi que la mère de Susan, mais celle-ci meurt en couches. Patience vit désormais dans un univers parallèle, suite à des péripéties spatio-temporelles et à l'intervention d'une entité cosmique. Du coup le Doc est seul en charge de la petite Susan, il l'emmène avec lui dans son TARDIS, à la découverte de l'Univers... et de l'Angleterre.  

Malheureusement ce n'est pas canon, même si je trouve qu'il y a quelques convergences entre Patience et Rose (partir pour un univers parallèle afin d'éviter une effondrement global, vivre avec l'équivalent local du Docteur), en plus taillé pour une Time Lady et non une Humaine. Les productions Big Finish sont considérées comme semi-canon, car ces passionnés vérifient tout à la loupe pour éviter les divergences et parce qu'ils travaillent régulièrement avec des membres de l'équipe de la série. Les romans ou Comics, etc s'étant accumulés au fil des décennies ont une canonicité bien moindre, car cela part dans tous les sens, voire en intégrant parfois des personnages venus d'autres univers (Sherlock Holmes, les Grands Anciens...), ce serait trop fourre tout/


A propos de Big Finish l'enregistrement de The Year of Martha Jones est achevé, bien évidemment avec Freema. L'audio book  sur cette année où Martha arpenta le monde entier est désormais en vente.

Après le Flux, le Reflux ?

Les épisodes préférés de Jodie Whittaker :

http://braindamaged.fr/06/01/2022/doctor-who-jodie-whittaker-revele-son-episode-prefere-de-ses-saisons/

Vu Eve of the Daleks, et cet épisode autoproclamé « spécial » souffre du paradoxal choix de narrer ce qui est devenu l'un des plus grands lieux communs des séries de l'Imaginaire : la boucle temporelle. Un sentiment d'autant plus prégnant que Doctor Who y a déjà eu recours lors de Heaven Sent, et en se confrontant à la comparaison avec l'un des chefs-d’œuvre de Steven Moffat, notre ami Chibnall ne se rend pas service. Basiquement, l'histoire  se limite à la résolution de la boucle, dans la tradition la plus classique du genre. Certes Chibnall tente d'épicer son plat avec l'intervention des Daleks  et surtout le fait que la boucle n'est pas infinie et se rétrécit autour de minuit, ce qui suscite d'ailleurs un lien astucieux avec le Nouvel An.

Cette dramatisation ne compose cependant pas non plus une originalité, les Legends y ont notamment eu recours lors du formidable Here We Go Again, épisodes bien plus ambitieux que celui-ci (et avec de bonnes vannes sur ABBA). On peut aussi regretter que tout le monde se souvienne des itérations précédentes et non seulement un unique individu. Cela diminue l'impact de la boucle, cela finit par ressembler à un jeu de plate-formes où ou aurait droit à plusieurs vies. Chibnall reste aussi très flou sur ce qu'il surviendra quand minuit sera atteint (évidemment le Doc règle l'affaire in extremis), idem pour la situation d'après Flux. Pour rebooter le TARDIS, Thirteen choisit une superbe planète semblant intacte et aucun impact du drame n'est perceptible sur Terre, où en sommes-nous exactement ?

Après  l'épisode demeure prenant, la mécanique de la boucle reste prenante en soi et le boucles abrégées suscitent un suspense en fin de parcours. Le huis clos dramatise la situation d'autant que l'ensemble se voit filmé avec un joli sens des perspectives. Par contre enfiler des couloirs rectilignes rend encore plus risibles les performances de tir de Daleks supposés d'élite et encore pire que les tueurs du SPECTRE ou les Stormtroopers de l'Empire. L'épisode peut aussi sembler passablement bavard, mais cela se révèle une force, on sent la patte de l'auteur de Broadchurch dans les touchants dialogues du couple d'alliés du jour. Amour naissant, contexte social, écriture sensible, Chibnall est à son affaire, sans doute davantage que pour la SF et l'Aventure. Si la perspective aller découvrir le mystère de la Flor de Mar séduit, on reste déçu d'être privé de la traditionnelle scène d'adieux avec ce couple pour lequel, oui, j'ai éprouvé un petit coup de cœur.

Jodie est en grande forme et j'ai même trouvé  que, dans la belle scène où Thirteen avive le courage défaillant des Terriens, elle avait comme des accents à la  Tennant dans Voyage of the Damned. Le trio demeure sur la lancée de The Flux, mais j'ai trouvé que l'on nous sortait Thasmin du chapeau, brusquement et tardivement. Tant mieux pour ses fans, mais ça m'a laissé indifférent à deux encablures du port. A suivre tout de même. On retrouve l'amusement des Daleks, avec leurs dialogues barrés et leur esprit si subtil, de ce côté Eve of the Daleks est un bon cru. L'ensemble résulte malgré tout un peu juste pour un spécial Nouvel An, mais l'on n'a pas envie de s'acharner sur une époque qui s'éloigne déjà, d'autant que Chibnall sait une nouvelle fois ne pas revenir sur les travers passés. Et on avouera que le Corenne de RTD nous rend indulgent. (***)

A noter dans cette séquence In Memoriam, à 6'05'', la présence du très sympathique Harry "Aitch" Fielder. Il nous avait fait l'amitié de venir discuter sur ce forum, voici déjà plusieurs années, en évoquant plaisamment les souvenirs de sa carrière aux innombrables petit rôles d'extra, le plus souvent non crédités.