Romans de Fantasy
CHAPEAU MELON ET BOTTES DE CUIR - LE MONDE DES AVENGERS :: Le CAFÉ Avengers (Ouvert sous modération)
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Dearesttara- Roi (Reine)
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Camarade Totoff- Prince(sse)
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Le principal atout d'Une couronne d'épées est la conjonction du toujours si riche worldbuilding, du style luxuriant de l'auteur et du fait que l'immersion dans le monde ne peut que demeurer forte après 6 volumes gonflés à bloc. C'est comme si nous étions en plein milieu d'un rêve - et ce volume marque d'ailleurs le milieu de la saga, sans compter New Spring - Ce volume bénéficie du brio de ses prédécesseurs : plongés dans ce monde détaillé et turbulent, il est difficile de s'en extirper malgré tous les passages laborieux qui peuvent le minorer. Pourtant il faut admettre que dans le premier tiers, il ne se passe... rien. Rand pleure les tombés de Dumai, Rand se câline avec Min, les Aiels tirent la gueule, tandis que les quelques adversaires croisés n'ont rien d'éclatants (Colavaere est vite expédiée)... Bref, une promenade brillamment racontée mais assez vide. On remarque aussi que Jordan grapille des pages en répétant la bataille des Puits de Dumai mais du point de vue des Shaido... ce qui n'apporte strictement rien, un travers qu'on retrouvera apparemment dans Crossroads of Twilight mais en plus étendu (chouette...). Je pense que Jordan a surestimé le nombre de livres nécessaires à la Roue du Temps. Alors que la plupart des arcs se résolvaient à chaque volume, il trouve le moyen de ne toujours pas clore celui de la Coupe des Vents qui court déjà depuis 2 tomes. Beaucoup d'attente, de filatures, d'arcs avortés (tout le monde se fout de Carridin en fait ?). Tout cela me fait penser à ces séries brillantes, fins comprises, mais pêchant par excès de saisons.
Un autre problème est qu'après avoir suprêmement cassé les pieds à Rand, Lews n'intervient plus, ce qui mine le crescendo de folie de Rand, pourtant un des arcs majeurs de la saga. Les Aiels finissent par perdre leur pouvoir de fascination tandis que le foisonnement de personnages finit par fatiguer, Jordan reléguant en conséquence d'excellents atouts à l'arrière-plan (Thom, Birgitte, Perrin, Faile, la plupart des Rejetés...). Bon, les ajouts du jour restent croustillants comme Caraline et Cadsuane, la déesse du flegme. Et j'ai bien aimé voir le Dragon Réincarné s'énerver légèrement face aux Atha'an Miere qui n'en demandaient pas tant. Je demande dans les volumes suivants plus de détails sur le Peuple de la Mer, ainsi que les Séanchaniens ; connaissant le brio de Jordan pour les peuplades, je suis sûr qu'il les rendra intéressants. Une autre déception est la bataille finale : après 6 climax réussis, Jordan peine à se renouveler et la mortelle partie de cache-cache à Shadar Logoth ressemble trop à un mix peu discret de la Prise de Tear et de la bataille avec Asmodean téléportée à Rhuidean. Une conclusion décevante, rehaussée toutefois par le quatrain final, une sombre augure pour le Dragon Réincarné. Rand est toujours aussi magnétique même si sa volonté de préserver les femmes comme si elles valaient plus que les hommes - une erreur qui a coûté la vie à Moiraine - demeure un étonnant manque de réalisme.
La majeure partie du livre est toutefois consacrée à la Coupe des Vents et il faut reconnaître qu'on s'amuse bien dans cette ville aux habitants pittoresques où Jordan multiplie les révélations - la fameuse "Famille" d'Ebou Dar - et les twists fracassants (le retour de Lan est exquis). Les échanges hilarants entre les Aes Sedai femelles autoritaires et le mâle énervé qu'est Mat se montrent croquants à souhait. Et puis, il faut admettre il y a nombre de moments hautement satisfaisants comme Nynaeve et Elayne réduites à rabattre leur caquet devant Mat après lui avoir rendu la vie impossible (mais ne se privant pas de le pourfendre en marge), Nynaeve coincée entre sa misandrie naturelle et son amour (vache) pour Lan, le running gag de Mat dévoué au possible mais s'en prenant toujours plein le carafon. Elaida se prenant en pleine figure l'échec de Dumai et devenue marionnette de la perverse Alviarin promet des étincelles. Le sommet, et là, je ne l'ai pas vu venir, demeure la 1re scène intéressante pour Elayne... Oui, c'est arrivé, Elayne a enfin droit à une bonne scène, quand elle passe en mode Léodagan et renverse toute le hiérarchie des Aes Sedai d'Ebou Dar après qu'on l'ait traitée comme une domestique. C'est délicieux, drôle et exaltant. La voir d'ailleurs briser la glace face à Mat permet de la trouver plus sympathique que la gamine arrogante qu'elle est habituellement. Un espoir pour la suite ? Les méchants ont tendance à rester à l'arrière-plan mais Moghedien a droit à de bons moments comme sa salutation... enflammée à Nynaeve ou son calvaire à Shayol Ghul. J'aime bien que Le Ténébreux voit la pitié comme une abstraction, c'est pas original mais ça fait toujours son effet. La 1re conclusion de l'arc, avec l'irruption du Gholam - fantastique trouvaille de Jordan - et surtout l'invasion des Séanchaniens, permet une fin de fer et de feu et un redoutable cliffhanger où le ciel tombe - littéralement - sur la tête de Mat.
Malheureusement, cette réussite se voit entachée par la plus ignoble idée perpétrée par Jordan : le viol répété de Mat par Tylin, traité à la rigolade. S'axant sur l'ego cassé d'un coureur devenu gibier en ignorant son traumatisme, et faisant des femmes entourant Max un parterre de rigolardes face à ce qui lui arrive m'a tellement ulcéré que j'ai arrêté de lire Une couronne d'épées pendant 2 semaines. La misandrie de Nynaeve s'est-elle communiquée à Jordan ? Une telle insensibilité me déçoit de la part d'un auteur qui réussit généralement les jeux de pouvoir de la guerre des sexes de La Roue du Temps, une saga dans la saga. Ici, il succombe à un discours puant niant les hommes victimes. Une conséquence est que cela réduit fortement mon affection pour Elayne et Nynaeve, même si c'est moins de leur faute que celle de l'auteur. Ma plus grande consternation est de voir qu'une solide proportion du fandom persiste à ne pas voir le côté problématique de ces scènes, on est pas sortis du sable. J'espère vraiment que la série corrigera ça.
Volens nolens, Jordan continue de développer d'excellentes idées comme l'extension de l'influence des Asha'Man et les préparations de l'attaque sur Sammael, avec d'étonnants virages dramatiques comme l'attaque inattendue de Padan Fain (décidément un roué félon celui-là) mais aussi sentimentaux avec Min vue comme le dernier lien rattachant Rand à son humanité, après qu'il ait chassé Perrin. Leur lien est la grande force du front Rand. A côté de l'action et du monde en folie, Jordan sait rendre l'amour touchant et passionnant, sans doute le plus grand challenge pour un auteur, et la réussite demeure malgré le précédent comportement imbuvable de Faile. J'attends beaucoup du "quad" à venir entre Rand et ses girls, surtout avec Aviendha au milieu...
Au final, oui, le "slog" commence à se faire sentir, avec un ralentissement trop important de l'action, une foule ingérable de personnages et l'odieuse affaire Mat-Tylin, mais Une couronne d'épées se lit avec allant, avec un excellent dosage d'effets violents et de moments tendres. Je l'aime bien moi, ce monde chaotique (***).
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Le "slog" est un terme du fandom, Jordan n'a jamais vu les romans 7-10 comme un ventre mou (il a juste reconnu que Crossroads of Twilight n'a pas tourné comme il le souhaitait).
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Estuaire44- Empereur
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A force de vouloir détailler la moindre action, le moindre décor, le moindre courant de pensées, le moindre costume, ce roman, le plus court de la saga (sans compter le prequel) parvient à faire sentir le temps plus long que certains opus ayant 300 pages de plus. Au moins, il se passe plus de choses que dans le 7. Tiens par exemple, alors qu'Une Couronne d'épées voyait son 1er évènement intéressant arriver p. 250, il ne faut ici "que" attendre la p. 100 pour que ça décolle, avec l'activation tant attendue de La Coupe des Vents (mais bon, décrire dans le détail les écuries, les plaines, les vêtements de meufs a ses limites). Passe encore que Mat soit absent du tome, après tout Perrin et même Rand ont été absents chacun de (presque) tout un tome, mais je continue à penser que la quasi-absence des Rejetés depuis quelques tomes est dommageable. L'opposition principale finit par devenir désincarnée, Jordan misant tout sur les conflits internes. Ça avait marché dans Le Seigneur du Chaos mais depuis les lignes ont assez peu bougé.
L'arc d'Egwene est je trouve le plus intéressant, le dur apprentissage en accéléré de Chaire d'Amyrlin (dissidente) est très bien rendu par de redoutables complots au sein des rebelles de Salidar. Alors, oui, on est clairement pas dans les coups tordus mortels de ASOIAF, mais les intrigues politiques se révèlent suffisamment savoureuses. D'autant qu'Egwene nous surprend à plusieurs reprises par quelques coups de force qui achèvent de laisser la villageoise de Deux-Rivières derrière elle. La voir rabattre le caquet de Romanda et Lelaine est jouissif à souhait alors même que Jordan arrive à nous faire croire jusqu'au bout à un possible échec. J'attends l'explication de gravures avec Elaida, avec j'espère Siuan en place d'honneur, le champagne est au frais. J'admire surtout que Jordan soit parvenue à rendre Egwene plus dure et autoritaire sans recourir à des actions immorales mais juste en exploitant chaque centimètre carré du terrain qu'on lui laisse, elle n'est pas Rand (il faut dire qu'elle ne subit pas la souillure du saidin), un distinguo apprécié. On a beau détester Elaida, on ne peut s'empêcher de la prendre en pitié quand elle devient définitivement une marionnette dans les mains d'Alviarin, elle qui pensait qu'Egwene serait une dirigeante fantoche. L'ironie est terrible. D'ailleurs, chapeau aux scénaristes de la série qui en fait trouvent une source canon pour leur shipping de Siuan et Moiraine dans ce tome, quand une soeur parle des "Soeurs d'oreiller" (c'est joliment dit et c'est complètement normalisé). Après, c'était vraiment un des rares changements convaincants du show, grâce au duo Rosamund Pike-Sophie Okonedo, ébouriffant de charisme.
Les Seanchaniens se révèlent une durable opposition pendant que le monde, ravagé par des luttes intestines de tous côtés, sombre dans le chaos. Je trouve assez ironique que la fin de l'été maléfique ne change pas grand-chose aux nombreux problèmes des royaumes, mais du coup, je m'interroge sur l'utilité réelle de l'arc d'Ebou Dar qui a traversé 3 bons tomes. Mais les envahisseurs ont de quoi faire trembler. D'ailleurs, Jordan parvient à semer de bons twists comme l'apparition surprise de Liandrin (se peut-il que Suroth... ?) ou le destabilisant lien sul'dam-damane, apparemment bien plus qu'une relation de Maître-Esclave. En parlant de femmes qui canalisent, quel spectacle de voir une Tour Blanche plus désunie que jamais, avec des Ajah qui se tirent toutes dans les pattes pour notre plus grand plaisir. Dans le lointain, on entend les anciennes Chaires d'Amyrlin se taper longuement la tête contre les murs à l'unisson.
Encore une fois, l'arc d'Elayne est le moins intéressant, même si en fin de course, ça bouge et qu'elle trouve une bonne scène en chassant le Dragon Réincarné (off screen) parce que voilà, c'est la Reine, elle n'a pas besoin d'homme, elle est indépendante, elle a le droit de soupirer auprès d'un mec inaccessible et souffrir pour ça. Non, sérieusement, ça nous fait 2 bonnes scènes avec elle depuis qu'elle est apparue, j'avoue qu'à ce moment, une fréquence d'une bonne scène d'Elayne/livre, je prends. Par contre avant, Jordan répète ad nauseam les tensions entre Atha'an Miere, Famille, Tricoteuses et Aes Sedai... mais en en restant à un surplace perpétuel. Il est vraiment temps d'accélérer tout ça mais ce sera pas pour tout de suite. Allez, j'ai bien rigolé Nynaeve qui switche constamment de la configuration bougonne misandre à ingénue qui fait les yeux doux à son mec. Toutefois, il est clair que Jordan s'appuie un peu trop sur les ships, chaque perso monologuant régulièrement dans sa tête à propos de son mec/sa nana. Ça n'apporte pas grand-chose, on comprend qu'il le mentionne, mais ça devient invasif. Sinon, je reste stupéfié que le comportement de Faile soit normalisé parce que c'est comme ça que sont les femmes du Saldaea (et il paraît que Far Madding est pire). Je veux bien croire que ce sont des peuplades aux us différentes mais j'ai toujours du mal à trouver que ça justifie ce que Faile a fait subir à Perrin. Allez, ça permet un duo de buddy movie avec Elyas, qu'on est bien content de retrouver depuis le tome 1 tout de même, joli comeback.
L'arc Rand m'a laissé sur ma faim. D'un côté le crescendo de folie devient de plus en plus inquiétant, jusqu'à restreindre sa relation avec Min (et Lews est de retour, yeah !), mais de l'autre, Jordan montre ses limites militaires. Je suis désolé mais sur 25 pages à fond les manettes, il est en effet à l'aise, mais sur des centaines de pages de veillées d'armes, de camps, et même de combats à longue distance, toute la partie action est paradoxalement la plus soporifique. Finalement, c'est peut-être bien que ce soit Sanderson qui se soit occupé de Tarmon Gai'don.
Le plus grand intérêt du Chemin des dagues est sans doute ses twists réguliers, certains liés à la trame (hahaha) de l'histoire, le plus grand étant la stupéfiante désunion de la Tour Noire et la fin de Morr, vraiment pas de bonne augure pour Rand (la scène est à déchirer le coeur), mais j'apprécie aussi les twists du worldbuilding comme avec Callandor finalement peu fiable (Aïe), la maladie des Damane, les serments contradictoires possiblement fatals pour une Aes Sedai, ou les dangers d'un tissage incontrôlé qui nous vaut une stupéfiante scène de massacre. Je suis content qu'après une stabilisation dans le tome 6 que Jordan continue à explorer son lore pour en tirer des scènes captivantes. La Roue du Temps prolonge trop ses rotations mais le trajet demeure plaisant, surtout après les cliffhangers assassins qui concluent le volume, ça promet des ventilations façon puzzle *frotte les mains. (***)
Dearesttara- Roi (Reine)
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Estuaire44- Empereur
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Il faut dire qu'il n'était pas aisé de succéder à A Crown of Swords, où Jordan avait bouclé bon nombre des intrigues laissées ouvertes. De plus, ce livre a marqué la fin de la première moitié de la saga, ce qui en a faisait une charnière importante. A l'époque cela m'avait fait finir de lire ce livre sans trop percevoir ce qui pourrait se passer dans les tomes suivants. On savait évidemment que Perrin serait chargé de négocier avec la reine Alliandre du Ghealdan, qu'Elayne tenterait de s'asseoir sur le Trône du Lion d'Andor, qu'Egwene tenterait de reprendre Tar Valon et d'unifier les Aes Sedai (bon courage), et que Rand poursuivrait son préparatifs de l'Ultime Bataille. Mais je n'avais aucune idée de comment l'histoire se déroulerait concrètement.
Et, à tort ou à raison, je pense que cela est arrivé à Jordan lui-même lorsqu'il a commencé à écrire The Path of Daggers, un livre qui se concentre plus que tout sur la réorganisation du récit et la préparation des personnages pour ce qui deviendrait la seconde moitié de la saga. Cela signifie que nous avons bien un livre où peu ou rien ne se passe vraiment, mais parce que malheureusement il a fallu ordonner le récit et planter les graines de ce que seraient les prochaines intrigues. Malgré cela, et sa courte durée (formant de loin le roman le plus court de la saga), certains personnages comme Mat n'apparaissent pas, ce qui signifie que toute son intrigue doit attendre un livre de plus.
Là où les complots d'Ebou Dar continuent, c'est avec les Aes Sedai, parmi lesquelless nous avons Elayne et Nynaeve. Cette intrigue progresse jusqu'à ce qu'elles finissent (enfin) par utiliser la Coupe des Vents pour mettre fin à la sécheresse et à la chaleur torride qui sévissaient dans la région. Cependant, des choses intéressantes se produisent ici, d'abord nous pouvons voir comment le résultat de l'utilisation de l'artefact a non seulement mis fin à la chaleur, mais a également laissé un hiver tout aussi puissant le faisant passer d'un extrême à l'autre. J'aime cette idée qu'un objet miraculeux, soit l'un des marronniers absolus de la Fantasy , n'aient pas que des conséquences positives, ce n'est pas si fréquent concernant l'objet d'une quête. A côté de cela, toujours beaucoup de dialogues à Ebou Dar, on n'avance pas beaucoup et le voyage d'Eayne ne bouleverse pas en jeux, c'est utilitaire, là aussi
Cela devient davantage consistant chez Rand, avec l'intrigue pour tenter d'obtenir un véritable contrôle politique d'Illian après la bataille avec Sammael et la prise du pouvoir après la fin du livre précédent. Ceci est extrêmement important car si nous regardons la carte de ce monde, Illian est de l'autre côté de la baie à partir d'Ebou Dar, c'est donc la prochaine grande ville qui se trouve sur le chemin de la force d'invasion seanchan. À cela s'ajoute le problème que de nombreuses troupes de Sammael se sont retrouvées sans direction claire et pourraient devenir criminelles, donc des enjeux aussi variés qu'importants pour le Dragon réincarné. Là aussi on sème pour le futur.
Se plus, l'intrigue de Rand ne se limite pas à cela. Nous le voyons vraiment comme un seigneur de guerre et comment il doit commencer à manœuvrer le réseau politique qu'il a mis à essayer de coordonner tous les groupes de personnes qui lui ont prêté allégeance. Cela ne va certes pas à un rythme trépidant et l'Opposition n'est sans doute pas assez sollicitée pour pimenter les débats, mais malgré tout s'ouvre ici le chemin conduisant à la Bataille. La volonté du Dragon commence à faire se mouvoir le Monde.
Mais ce n'est pas gagné car d'un côté se trouvent les Ashamans, les Aiels et surtout les Aielles, mais aussi les conflits entre les royaumes conquis, qui ont leurs propres problèmes et parmi lesquels .Rand ne peut se permettre d'avoir de favori. Politiquement c'est intéressant de voir comment un empire composite et hétérogène, aux peuples de cultures antagonistes, est impulsé avec difficulté, même avec une grande puissance, contrairement à une cité ou état-nation. Historiquement ce ne sont pas les exemples qui manquent. Et cela laisse un bel espace à Min, un personnage décidément formidable.
L'intrigue qui, selon moi, aurait dû avoir plus de poids dans ce livre est celle de Perrin. Incarnation de la Loyauté envers son suzerain, Maître de la Forge, Ami des Loups... mais à qui les deux louves ne font pas de quartier. C'est assez amusant de le voir lui aussi commencer à vraiment mettre en œuvre ses compétences en leadership, mais pour empêcher Berelain et Faile de finir par s'entre-tuer pour lui. (bon, cela paraîtra machiste aujourd'hui, mais bon). Si là aussi cette intrigue n'avance pas beaucoup, outre le cliffhanger sur laquelle elle débouche c'est ici qu'apparaissent de nombreux personnages intéressants. D'une part, nous aurons le retour du toujours excellent Elyas, une fois de plus un guide pour Perrin.
Mais nous auvonss également Morgase de la MaisonTrakand rejoignant Perrin avec d'autres survivants de l'attaque Seanchan contre la Forteresse de la Lumière. La chose intéressante à propos de Morgase est qu'elle déteste que Perrin voyage avec les drapeaux de l'Aigle Rouge de Manetheren (puisque cette région appartient au royaume d'Andor. Ce qui est astucieux, car cela conduit à un possible conflit entre le groupe de Perrin et le groupe d'Elayne s'ils prennent le contrôle d'Andor. Sans même nécessiter les Réprouvés, on nous installe un possible conflit à venir. La croisée des Fils de la Trame deviennent parfois des nœuds.
L'autre grande intrigue de ce livre est celle d'Egwene, qui continue d'avancer vers la frontière d'Andor en route vers Tar Valon. Ici, les conflits entre Egwene et Tour commencent à apparaître de plus en plus forts. Avec une Assemblée qui refuse d'être aux ordres d'un bien jeune Siège de l'Amyrlin et une Egwene refuse obstinément de devenir une marionnette. Cette intrigue commence lentement mais commence à devenir intéressante quand on voit comment Egwene parvient, avec l'aide de Siuan Sanche, Sheriam Bayanar et Gareth Bryne, pour finir de mettre la pression sur le Hall et le faire respecter comme Amyrlin. Ici aussi tout prend du tmeps mais c'est parce que rien n'est simple, jamais. Et dans le fond, tant mieux.
Egwene parvient à avancer son Grand Dessein, la préparation d'une armée royale pour envahir Tar Valon et reprendre la Tour Blanche. Bien que je pense que Jordan a commencé à accorder de moins en moins d'importance aux intrigues de Tar Valon, de par l'élévation du Dragon, la multiplication, des autres histoires et l'absence de Moiraine, l'affirmation d'Egwene demeure cruciale. On perçoit clairement que son importance est appelée à encore s’accroître, elle.
Comme dans tous les livres de la saga, The Path of Daggers a quelques petites intrigues axées sur des personnages secondaires, avançant des histoires qui deviendront importantes plus tard. Le conflit entre Greandal et Mogedhien), tandis que nous voyons comment Seaine Herimon et Pevara Tazanovni commencent à faire leur propre enquête pour trouver l'Ajah noire, Elaida, El Profesor, etc.
Le huitième tome de La Roue du Temps est un livre lent, où il ne se passe pas grand chose, mais où chaque petit élément bouge met en place la moitié suivante de la saga. Pas le plus flamboyant des romans ni le plus captiva,t, mais utile et donnant envie de voir où tout cela conduit. La Roue continue de tourner et l'Auteur s'en sert pour tisser les fils conduisant à d'excellentes intrigues à l'avenir.
Estuaire44- Empereur
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Par contre, j'ai cru lire que Moiraine avait une sœur ? Je ne me souviens pas qu'elle apparaisse dans les romans (on en a assez d'une...je ne sais même plus son nom de famille ! ah ! si ! Suffisante !)
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
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Re: Romans de Fantasy
Pour commencer, il faut se farcir une introduction de 80 pages ! On notera aussi que, comme le Ténébreux modifie le climat en le rendant plus chaud, lutter contre lui revient à lutter contre le réchauffement climatique ! Cela va revenir sous la forme d'un arc mineur, le ter'angreal d'Ebou Dar.
Globalement, il y a fort peu d'humour hormis les métaphores poissonnières de Siuan.
Le monde de Robert Jordan est un monde désespéré, dépourvu de confiance, de sincérité. "Ais-je le choix ?" se demande Rand quand il utilise les siens (Mat envoyé au casse-pipe à Salidar ou quand il laisse faire le massacre des Shaido par Taim lors de la bataille qui clôture ce volume). Les complots sont légions (y compris au sein des Capes Blanches contre leur propre Seigneur Général qui a ses petits secrets lui aussi), des Rejetés entre eux ou des Aes Sedai contre Rand (que ce soit de Tar Valon - qui manquent de réussir - ou de Salidar, ou encore Alanna). Les personnes ne se font pas confiance et cela commence déjà avec cette ridicule guerre des sexes, qui a pu être amusante au départ, mais qui, par son systématisme et sa permanence tend à devenir une croyance ou pire un préjugé. Comment, de ce fait, imaginer qu'un couple puisse seulement exister ? celui de Perrin (enfin, il est de retour, 1ère apparition en page 49) se défait sous l'effet d'une jalousie aussi imbécile que puissante. Rand se tient, lui, aussi loin que possible des femmes qui lui plaisent pour leur propre sécurité (et Min peut témoigner que ce n'est pas une vue de l'esprit). Egwene a, brièvement, plus de chance mais quel avenir pour sa relation ?
Les Aes Sedai ne sortent pas grandis non plus de cet opus. Elles "découvriront l'humilité le jour où les vaches auront des ailes" pense Nynaeve (p.234) qui, pourtant, sera promue au rang de Soeur (tout comme Elayne, objet de convoitise pour le Trône du Lion mais peu active par elle-même). Toujours aussi aveugles, elles décrètent que les hommes sachant canaliser doivent être liés car "ils sont trop importants pour rester libres" (p.299). La liberté individuelle, la liberté de pensée, le libre-arbitre ; que de notions sans valeur pour les Je-Sais-Tout ! Aucun de ces personnages (Mat, Nynaeve, Elayne, Egwene) ne considèrent les autres comme responsable. Il faut toujours les "guider" ou les "aider".
Concernant Rand, il est intéressant de constater qu'il met en application les conseils de Moiraine et cela sans être "guidé" ("téléguidé" serait plus juste) par une Aes Sedai. Un homme sachant canaliser prenant de bonnes décisions sans elles ? Inimaginable pour les sorcières d'où qu'elles soient ! Certes, il est aussi écrit que "Rand al'Thor semait la pagaille dans le monde, et le plus souvent sans le vouloir" (p. 408). Mais, pas fou (pas encore, et avec Lews Therin dans sa tête, il prend une pente dangereuse), il considère désormais Egwene comme une adversaire et, vu que celle-ci, après avoir essayé de le manipuler, devient, par surprise (on se croirait à un congrès de la CGT) Chaire d'Amyrlin de Salidar, ça ne risque pas de s'arranger ! Et Mat ne l'aidera pas, lui qui ne parvient pas à prendre la chose au sérieux mais qui intrigue ces magiciennes en résistant à leurs tours ! Exploit des Aes Sedai ; elles arrivent à me donner un peu de sympathie pour Mat ! Egwene manipule ce dernier pour qu'il aille à Ebou Dar ("Manipuler un ami lui serrait le coeur" mais "Mat méritait son sort"). Un membre de l'Académie française avait dit à l'Express que la courtoisie est la forme suprême de l'hypocrisie. Une bonne définition applicable ici et aux Aes Sedai en particulier.
Un élément inattendu survient lorsque Nynaeve, la guérisseuse professionnelle, guérit Logain soit le reconnecte au Pouvoir ! Et elle opère la même manœuvre avec Siuan et Leane ! Voilà qui ouvre des perspectives narratives intéressantes.
Le vrai moment palpitant survient p. 795 quand Perrin opère réellement son retour dans le récit. La rencontre avec ses beaux-parents n'apporte pas grand chose mais ne se passe pas si mal. Il jouera un rôle décisif dans le final en se lançant à la recherche de Rand, capturé par les sorcières de Tar Valon.
Le final est un de mes préférés quand les Aes Sedai de Salidar doivent se soumettre au Dragon Réincarné et lui prêter serment ! Voilà un événement qui va faire du bruit et provoquer de nombreuses déflagrations ! (***)
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Je note que tu utilises la tournure des Capes Blanches : les "Sorcières" de Tar Valon. Je ne peux pas dire que je te donne spécialement tort, je reste stupéfié que Jordan ait pu décrire un consortium féminin aussi peu sympathique. Dans mon souvenir, les Bene Gesserit de Dune, à laquelle on pense beaucoup, ne sont pas aussi tordues.
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
L'auteur prend un risque en changeant son fusil d'épaule. Malgré son importance, par ailleurs confirmée en fin de parcours, Lyra passe d'héroïne à adjuvante devant le vrai héros de ce tome : Will. Je suis très admiratif du portrait qu'en fait Pullman, un guerrier dans un corps de garçon, forgé dans le feu de l'épreuve, la solitude et la violence, piégé dans sa propre performance de garçon fort qui ne peut prendre de temps pour lui car devenu subitement unique rempart d'abord pour Lyra et Pantalaimon puis ensuite, basiquement, tout le monde. Mais derrière la façade crâne, Will souffre de ne pouvoir recevoir ce qu'il ne fait que donner en permanence : sa protection, son appui, son soutien, jusqu'à des tentations de sacrifice. Après être passée par une période de parangon un peu dommageable, Lyra retrouve son portrait nuancé de ses tous débuts, généreuse mais pétrie d'erreurs. Avec une diabolique habileté, Pullman multiplie les antagonistes (sir Charles est une belle enflure), développe encore plus l'âme damnée de Mme Coulter, et anticipe même sur Les Détraqueurs de Potter avec les Spectres infernaux. Même si je préfère l'écriture souvent plus viscérale de Rowling quand elle évoque ces pures horreurs, le talent de Pullman fait qu'on ne peut résister à ce sentiment d'abjection terrifiante dès que Les Spectres apparaissent. Comme pour le 1er tome, l'auteur choisit un worldbuilding pas trop étendu mais en explore chaque centimètre carré, où les extensions clés relancent une intrigue pourtant déjà rapide, comme le couteau subtil du titre original, la faussement tranquille Cittàgazze ou les apparitions littérales des anges. Bon, Pullman en reste à son efficacité coutumière et privilégie l'intrigue et les personnages à tout le reste, mais on ne va pas s'en plaindre, on est dedans. D'autant qu'il ne se prive pas de flagrants délires où on se rend compte que le but de nos héros sera de tuer littéralement Dieu. Dans le lointain, Chuck regarde l'Æsahættr avec suspicion.
Car oui, difficile de décoller les rétines de la cavalcade d'évènements. De plus, alors que Northern Lights se concentrait avant tout sur Lyra, The Subtle Knife se divise en plusieurs arcs, rejoignant l'amplitude typique de la fantasy, d'où une accélération encore plus fulgurante du tempo, semée d'explosions de violence continuelles. Mais je ne m'attendais pas aux 60 dernières pages où la pure furie de carnage et de morts/aspirations d'âmes injustes nous assomme continuellement. Je ne pensais pas que Pullman pourrait reproduire la tragédie concluant le tome 1, mais il l'élève ici à la puissance 10 tout en ayant soigneusement tout préparé. Franchement, s'il survit à cette aventure, je demande à ce que Will consulte un psychiatre pour son PTSD, c'est pas humain de faire subir ça à un gamin, on se croirait à Westeros. Bon, je suis encore sous le choc de ce final couleur rouge sang et noir putréfié. Je ne pensais pas dire ça un jour, mais je crois que retourner à La Roue du Temps va être une détente en comparaison. (****)
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Je me souviens que je l'avais beaucoup aimé et que les Spectres m'avaient inquiété mais je me rend compte que je n'avais pas perçu la profondeur de l'œuvre. Damned, il va falloir que je reprenne tout !
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Ce différentiel est principalement dû au cadre du récit. Le monde de Lyra combinait une Histoire alternative intrigante à de multiples thèmes surnaturels, dont les démons eux-mêmes. Le monde de Will, composé d'adultes bien intentionnés ou dangereux, d'enfants violents et de beaucoup trop de responsabilités pour son âge, reste tout simplement trop normal à mon goût. Il expulse le lecteur hors d'une excellente histoire fantastique, tout en rendant, par contraste, le monde de Lyra davantage irréel. Or, pour qu'un roman de Fantasy fonctionne, il faut que l'irréel y devienne le réel.
Au grand soulagement du lecteur, cela s'améliore considérablement une fois que Lyra s'implique, dans le monde supposé normal et commence à faire bouger les choses. Cittàgazze, bon c'est du déjà-vu (on en revient au Sanctuaire de l'Age de Cristal), un monde fragmentaire et vide, qui n'a guère d'attrait jusqu'à ce que paraisse le fameux couteau (sans doute à l'origine de l'Ecole du Haut Couteau de Cuisine). Soit un artefact astucieux, dont le pouvoir le plus notable reste de nous faire enfin renouer avec l'inventivité du premier roman. Mais on a alors dépassé une bonne moitié de l'ouvrage.
Will en tant que personnage privé serait admirable, enfant intelligent et assumant de lourdes responsabilités pour son âge. est une autre plainte. Sa maturité se voit dépeinte avec talent par Pullman. Malheureusement, en tant que protagoniste d'un roman d'aventures, il s'avère nettement audacieux, admirable ou passionnant que Lyra, et je me souviens avoir poussé un soupir de soulagement chaque fois que Lyra s'est impliquée et a fait avancer les choses à un rythme plus rapide. Je n'échangeai pas mon bidon de Lyra contre deux bidons de Will (vanne 80's).
Ce n'est que dans la dernière du livre, lorsque l'intrigue entourant le père de Will devient plus substantielle, que le Haut Couteau de Cuisine entre dans l'histoire et que la normalité l se voit enfin ébranlée et surtout que, dès lors, The Subtle Knife peut enfin rivaliser avec l'excitation de The Golden Compass. Il y a des moments forts (les expériences sur la matière noire, l e cruel destin du père de Will). Pourtant, on sort du livre avec le sentiment que, pour l'essentiel, il se résume à la rencontre des deux protagonistes et à la révélation du Couteau.
La mythologie chrétienne inversée controversée de Pullman, la guerre qui se profile à l'horizon et et Lord Asriel ambitieux jusqu'à devenir comme une figure du Paradis perdu de Milton sont également présents, mais avec des effets seulement secondaires sur l'intrigue jusqu'ici. Sans doute Pullman a-t-il usé à dessein de la rupture de ton etd e point de vue pour ne pas lasser son lectorat, mais le résultat ne n'a pas vraiment convaincu. Le talent littéraire reste là, c'est loin d'être un mauvais livre, mais il m'aura moins séduit que le premier volet.
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Je pense que j'ai été plus indulgent parce que malgré la relative déperdition d'éléments fantasy, j'ai trouvé que l'intensité et le rythme dramatique demeuraient très élevés, il m'était très difficile de décoller les yeux du livre tant tout s'enchaînait avec vivacité. La rencontre entre Lyra et Will intervient d'ailleurs rapidement, dès le chapitre 3, et j'ai bien apprécié de voir comment leur fraternisation parfois mouvementée se mettait en place (avec notamment la scène émouvante du daemon de Lyra touchant littéralement Will pour le consoler, brisant le tabou ultime du monde de Lyra). Il est vrai qu'on passe de la fantasy au fantastique, d'une manière relative. Mais là Pullman ne se contredit pas, il a toujours récusé la qualification fantasy et préfère parler de "réalisme austère" (si, si). Il a peut-être voulu créer une histoire traversant différents genres.
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
« Gilman n’aurait peut-être pas dû travailler avec autant d’acharnement. Le
calcul non euclidien et la physique quantique suffisent à vous retourner
n’importe quel cerveau ; ajoutez à cela un goût prononcé pour le folklore et
le désir de mettre au jour l’étrange arrière-plan de réalité
multidimensionnelle dissimulée derrière la nôtre, auquel font sinistrement
allusion les contes gothiques et les histoires délirantes chuchotées au coin du
feu, et vous comprendrez qu’il est difficile d’échapper au surmenage
intellectuel1. »
H. P. Lovecraft, La Maison de la sorcière (1933)
passant de celui de journaliste amateur et de pulp writer à celui d’écrivain canonique, ce
qu’illustre la publication récente de son oeuvre dans la prestigieuse collection Library of
America et en France, une nouvelle intégrale de l’oeuvre aux éditions Mnemos (novembre
2021). L’oeuvre de Lovecraft oscille entre littérature mainstream et culture populaire,
empruntant à divers genres (fantasy, fantastique, horreur, SF), ce qui explique aussi sa
popularité actuelle. L’écrivain est devenu l’une des icônes de la culture contemporaine. Son
oeuvre suscite depuis quelques décennies de nombreuses réécritures littéraires (sérieuses ou
parodiques), mais inspire aussi des musiciens et des artistes. Les adaptations de toutes sortes ne
manquent pas qu’il s’agisse du cinéma (Roger Corman, Stuart Gordon, John Carpenter,
jusqu’au projet, abandonné, d’adaptation des Montagnes hallucinées par Guillermo Del Toro)
ou de formes plus éloignées comme les jeux vidéo ou les jeux de rôles. Ont fleuri aussi nombre
d’ouvrages illustrés (en France Philippe Druillet, Jean-Michel Nicollet, Nicolas Fructus,
François Baranger, etc.) et de romans graphiques (Richard Corben, Alberto Breccia, Alan
Moore, etc.). Des exégèses récentes ont révélé l’impact de l’imaginaire lovecraftien sur le
discours scientifique et la philosophie (Graham Harman, Timothy Morton). Les nouvelles
traductions en France (David Camus, François Bon, etc.) ont permis de redécouvrir l’oeuvre et
d’en faire mieux ressortir la richesse et la complexité.
Lovecraft manifeste une grande curiosité intellectuelle. En particulier, il fait preuve d'un
intérêt constant pour les sciences et le discours scientifique en général, et tout particulièrement
pour l’astronomie, qu’il pratique en amateur. L'époque où il vivait a connu des bouleversements
dans plusieurs domaines scientifiques, qui ont contribué à faire reculer les limites du savoir
mais également à remettre en cause des certitudes solidement établies. Ce questionnement
1 H. P. Lovecraft, La Maison de la sorcière, (paru en 1933), in Le Cycle de Providence (Intégrale tome 4),
Mnemos, traduit par David Camus, 2021.
empirique du monde, mais également de l'origine de l’humanité, avait été amorcé au XIXe siècle
par les travaux de physiciens, de mathématiciens tels que Gauss et Riemann et de biologistes
tels que Darwin, qui ont eu un impact considérable sur la science mais également sur la
littérature et la société. Au début du XXe siècle, alors que la controverse autour de la théorie de
l’évolution n'est pas éteinte, ce sont d'autres certitudes qui sont mises en cause, avec les travaux
de Max Planck, Niels Bohr, Heisenberg et Einstein (souvent cité par Lovecraft). L'intérêt de
l’écrivain pour cette évolution des savoirs sert aussi des fins littéraires. On trouve dans son
oeuvre des références multiples au contexte scientifique de son époque et nombre de ses
personnages sont des hommes de science.
On pourra examiner quelles images et représentations des sciences apparaissent dans
l'oeuvre et pourquoi Lovecraft insiste-t-il sur cet aspect du savoir contemporain, en tenant un
discours souvent ambivalent sur la science, source de savoir, mais aussi de danger potentiel
pour l’homme et son avenir. Une mise en garde s’exprime au début de L’Appel de Cthulhu paru
en 1928 où l’effroyable viendrait d’une connaissance totale. L’interdisciplinarité serait la perte
de l’humanité :
« Les sciences, chacune tendue vers son propre objectif, nous ont jusqu’à
présent relativement épargnés ; mais un jour viendra où le rapprochement de
toutes ces connaissances éparses nous ouvrira des perspectives si terrifiantes
sur la réalité et la place effroyable que nous y occupons, que cette révélation
nous rendra fous ou nous fera fuir la lumière mortelle pour nous réfugier
dans la paix et la sécurité d’un nouvel âge de ténèbres2. »
HP Lovecraft, L’Appel de Cthulhu (1928).
Les disciplines dont on retrouve des données, des concepts, une mise en scène dans l’oeuvre
de Lovecraft sont les suivantes : la paléontologie, la géologie, l’archéologie, la biologie
(biodiversité, écologie, éthologie), la neurologie, la psychologie, l’astronomie, l’astrophysique,
la physique des particules, l’ethnologie/l’anthropologie, la linguistique, l’histoire (dont
l’histoire des sciences, l’histoire des religions et mythes), la philosophie des sciences, la
littérature, l’économie…
En retour, Lovecraft semble rencontrer un écho très favorable chez un certain nombre de
scientifiques. En 2019, une équipe de recherche découvre un fossile d’une espèce sous-marine
aux quarante tentacules qui n’est pas sans rappeler Cthulhu… Cet échinorderme, âgé de 430
millions d'années et découvert à Herefordshire (ouest de l’Angleterre) a été nommé Sollasina
cthulhu par les scientifiques3 . Il ne s’agit pas d’un exemple isolé. Ces liens d’influence
2 Extrait de Les Montagnes hallucinées et autres récits d’exploration (Intégrale tome 2), H. P. Lovecraft,
traduit par David Camus, éditions Mnemos, 2021.
3 « Le fossile d'un ancêtre des concombres de mer a été baptisé Cthulhu », article de Lucile Rabiet, paru
dans Sciences et avenir, le 12 avril 2019, consulté le 20 avril 2022,
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cthulhu_132885
interpellent. Comment les scientifiques sont-ils influencés par les textes lovecraftiens dans
l’approche de leurs objets de recherche ? Ces écrits ont-ils pu jouer un rôle dans des choix de
carrière (consciemment ou inconsciemment) ? Quelles sont les convergences entre leurs
perceptions des phénomènes observés et les thèmes récurrents de l’oeuvre de Lovecraft ?
Il existe peu de travaux sur la relation entre l’oeuvre de Lovecraft et l’imaginaire
scientifique. Ce colloque vise à combler un manque et à proposer trois axes de réflexion : l’un
portant sur l’utilisation par Lovecraft de concepts scientifiques et son discours sur la science,
le second sur le regard porté par les scientifiques et les philosophes des sciences sur l’oeuvre de
Lovecraft, le troisième concernant la manière dont les artistes (dessinateurs, cinéastes, créateurs
de jeux vidéos, jeux de plateau…) se sont appropriés l’imaginaire lovecraftien et ses éléments
empruntés à la recherche scientifique pour créer des paysages, des mondes de science-fiction à
l’instar de H.R. Giger, Philippe Druillet, Jean-Michel Nicollet, Nicolas Fructus, François
Baranger, Gou Tanabe, Alex Nikolavitch…
L’oeuvre de Lovecraft permet ces croisements arts et sciences où l’interprétation des
oeuvres se nourrit nécessairement des savoirs scientifiques et littéraires de l’artiste créateur.
Ainsi, une résidence est envisagée dans le cadre du colloque par le Lieu multiple (pôle arts et
sciences, création numérique) de l’Espace Mendès France et la Maison des étudiants de
l’Université de Poitiers. Cette résidence pourrait prendre la forme d’une lecture musicale de
l’oeuvre de Lovecraft ainsi que d’une résidence de dessin.
Les propositions de communication pourront relever de plusieurs champs disciplinaires et
porter sur les sujets suivants (liste indicative) :
• Les références scientifiques dans l’oeuvre et leur exploitation littéraire
• L’appréhension par les personnages ou la voix narrative du savoir scientifique
• Les personnages de savants et d’intellectuels
• L’ésotérisme et l’occultisme et autres pseudo-sciences dans l’oeuvre
• L’influence de Lovecraft sur la communauté scientifique et sur les concepts qu’elle
développe
• La science contemporaine et les concepts lovecraftiens
• La philosophie contemporaine et la pensée de Lovecraft
• La représentation des sciences dans l’illustration, le cinéma et la bande dessinée
Ouvrages
GUILLAUD Lauric, Lovecraft : une approche généalogique. De l’horreur au sacré, Paris, L’oeil du
sphynx, 2017.
HOUELLEBECQ Michel, H. P. Lovecraft. Contre le monde, contre la vie, Paris, Editions du Rocher,
1991.
JOSHI S. T., Lovecraft, Je suis Providence, Chambéry, ActuSF, 2019.
LEVY Maurice, Lovecraft ou du fantastique, Paris, Union Générale d’Editions, 1972.
LOVECRAFT H. P., édition intégrale des oeuvres en 7 tomes, Editions Mnemos, 2022.
MELLIER Denis, L’Écriture de l’excès, Paris, Honoré Champion, 1999. Chapitre consacré à H. P.
Lovecraft.
MENEGALDO Gilles (éds.), H.P. Lovecraft, Fantastique, mythe et modernité, Paris, Éditions Dervy,
2002.
GELLY Christophe, MENEGALDO Gilles (éd.), Lovecraft au prisme de l’image, Cadillon, Le Visage
Vert, 2017.
TRUCHAUD François (éd.), Lovecraft, Cahiers de L’Herne, n° 12, Paris, Éditions de L’Herne, 1969.
VINCENT Jérôme (éd), Lovecraft au coeur du cauchemar, Chambéry, ActuSF, 2017.
Le colloque se déroulerait le jeudi 14 et vendredi 15 mars 2024 à Poitiers.
En amont des deux journées, est prévue une résidence artistique avec un dessinateur et
une classe d’un établissement scolaire de Grand Poitiers pour appréhender l’oeuvre et
l’imaginaire de Lovecraft et réfléchir aux liens entre sciences et science-fiction. Par ailleurs,
la Maison des étudiants de l’Université de Poitiers sera partenaire de l’événement pour
proposer un événement (exposition, table-ronde…) auprès du public étudiant.
Les deux journées d’échanges auront lieu sur deux sites, celui de l’Université de
Poitiers et l’Espace Mendès France (Centre de culture scientifique). Plusieurs temps seront
pensés pour évoquer l’oeuvre de Lovecraft ainsi que les sciences auprès d’un public varié. Par
ailleurs, une conférence grand public aura lieu le jeudi 14 mars à l’Espace Mendès France. Le
Lieu multiple (pôle arts et sciences, création numérique) proposera une sortie de résidence
d’une lecture musicale de Lovecraft par un comédien et une chanteuse et musicienne afin de
clore les deux journées d’échanges.
et l’Espace Mendès France (CCSTI, Poitiers), pôle sciences et société et le Lieu multiple.
Comité d’organisation : Jean-Renaud Boisserie (Palevoprim, CNRS, Université de
Poitiers), Gilles Menegaldo (Forellis, Université de Poitiers), Héloïse Morel (Espace Mendès
France) et Patrick Tréguer (Lieu multiple, Espace Mendès France)
Comité scientifique : Jean-Renaud Boisserie (Palevoprim, CNRS, Université de
Poitiers), Roland Lehoucq (Commissariat à l’énergie atomique) , Denis Mellier (Forellis,
Université de Poitiers), Gilles Menegaldo (Forellis, Université de Poitiers) et Héloïse Morel
(Espace Mendès France)
Merci d’envoyer un abstract de 300 mots ainsi qu’une dizaine de lignes de biographie et
bibliographie aux organisateurs avant le 1er novembre 2023 :
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Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
J'avais trouvé déjà suspect que l'intrigue de la Coupe des Vents s'étendait sur plusieurs tomes quand jusque-là, tous les arcs de Jordan trouvaient leur conclusion dans le même volume. Mais dans Le Coeur de l'Hiver, Jordan suspend plusieurs importantes intrigues en cours : l'enlèvement de Faile, l'assaut imminent d'Egwene, la division de La Tour Blanche, les avancées des Séanchaniens... mais moins à cause de cette énorme quantité de matériel narratif que par sa manie de décrire chaque intéraction, chaque dialogue, chaque action parmi ses personnages, y compris et surtout les plus anodines. En conséquence, l'enfilade de dialogues, d'actes avortés, de pensées ruminées, qui restreignait déjà les tomes 7 et 8, devient ici carrément envahissante. Beaucoup de bruit pour pas grand-chose, le rythme de la saga s'assagit au-delà de ce qui est nécessaire. Jordan se regarde beaucoup trop écrire, il sait que son style brillant, ses descriptions imaginatives et sa maîtrise du worldbuilding nous tiennent dans sa main, mais la représentation s'éternise et l'ennui guette, à tel point que le tome suivant sera consacré à boucler les intrigues en suspens et se déroulera en même temps que celui-là.
Question subsidiaire : Martin est-il tombé dans un travers similaire ? Westeros est-il devenu trop grand pour gérer la plupart des intrigues ? Car il me semble que A Feast for Crows et Dance with Dragons se déroulent simultanément ?
La gestion à long terme de Jordan montre ses défaillances, les Rejetés/Réprouvés se contentant sagement de rester dans leur coin avant de se précipiter dans le final. J'essaye de me rappeler mais la dernière fois que quelqu'un parmi les Rejetés avait tenté vraiment un plan d'attaque fort et in fine impactant, c'était Lanfear à la fin des Feux du Ciel (Les Torrents de Feu de Moghedien ayant été un pétard mouillé, moins quelques victimes civiles), ça commence à dater. Il y a certes la manipulation d'Hanlon mais il faut attendre qu'elle porte ses fruits. La multiplication épuisante des personnages, la plupart inutiles mais quand même décrits avec un soin maniaque du détail, assourdit encore le tempo.
Périodiquement, de nouvelles idées relancent la saga presque toujours avec réussite. Mais j'ai été assez frustré avec Far Madding. Un endroit où personne ne peut canaliser, pourquoi pas ? Cela pouvait promettre un excellent jeu de contraintes pour la partie d'échecs. Mais l'auteur n'en tire pas grand-chose, la ville et ses représentantes restant assez désincarnée tandis que les péripéties de Rand se suivent à un rythme saccadé, allant de l'étirement en longueur (ruminations dans les auberges) au rushage précipité sans équilibre (l'attaque soudaine du repaire des Asha'Man rénégats). Cadsuane me paraît un personnage en bois, son seul trait de caractère étant qu'elle soumet tout le monde à son autorité, Rand compris, mais elle ne va pas plus loin qu'un portrait de force de la nature un poil irritante.
Le front le plus important reste bien entendu Mat Cauthon, et parce qu'Ebou Dar demeure une cité passionnante, on se laisse entraîner, mais on n'achète toujours pas la romantisation des viols de Tylin sur Mat ; voir un immense auteur déchoir au niveau des pires romances Wattpad est dur à avaler (Mat qui dit 1er degré que Tylin lui manquera, j'ai failli jeter le bouquin de dégoût). Malgré la longueur excessive de sa storyline (beaucoup d'allers venues stériles), on apprécie les comeback de Domon et Egeanin et le suspens très bien géré de la tentative d'évasion, souvent très ingénieuse et pas sans humour comme un lieu de rendez-vous prenant des allures de quai de gare à heures pleines. Pourtant, nous nous voyons quand même privés du climax, le livre s'arrêtant quand Mat sort des écuries, Catharsitus interruptus.
Malgré cet acharnement du détail superfétatoire sur la vue d'ensemble, on apprécie quelques excellentes scènes comme la cérémonie Aielle entre Aviendha et Elayne (magnifiques images), les retrouvailles teasées depuis 3-4 tomes entre Rand et ses girls. J'ai très aimé le sous-texte joliment égrillard derrière la pudeur du style (la réaction de Birgitte qui choisit de se saouler est juste hilarante) et cette nouvelle empathie qui semble fendre l'armure d'Elayne et d'Aviendha. On aime aussi la loi de Murphy s'abattant sur Mat comme à chaque fois qu'il tente d'agir, sans doute le running gag le plus drôle et aussi de suspens de la saga. Voir son super masterplan réduit à néant par les egos continuels des femmes autour de lui est à se tordre. En pic, le twist de Tuon qui part très bien pour ne pas arranger les affaires de Mat, je suis complètement fan de sa réaction complètement blasée, du genre "au point où j'en suis...". Elayne gagne ses galons de reine, elle reste trop terne à mon sens mais quel progrès depuis la Mary Sue de l'héritière de Morgase. Et bien sûr le badass climax qui renverse complètement le plateau du jeu de la saga avec l'épique purification du saidin dans une immense bataille de feu. Remarques secondaires : Moghedien reste Moghedien (une belle opportuniste trouillarde) je n'ai pas vu venir le twist de Dashiva, et je commence à me poser des questions sur Verin, infiltrée de l'Ajah Noir mais continuant d'aider Rand, Jordan nous prépare-t-il une nouvelle surprise ? Malgré ma sévérité, je reconnais à Jordan de toujours distiller ses renversements de worldbuilding sans en abuser. Cela se produit rarement et toujours avec un effet garanti. En passant, avec le saidin purifié, l'Ajah Rouge ne va-t-il pas être réduit du chômage ? (Une perspective alléchante pour le moins)
Sacrifiant persos et intrigues à un blabla continuel, Le Coeur de l'hiver est bien le premier tome de la saga que j'ai lu sans déplaisir mais sans passion non plus. Quelques scènes jouissives ne cachent pas une certaine lassitude dans une action globalement immobilisée. Apparemment, le tome suivant devrait faire pire. Joie. (**)
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
Merci pour la critique et globalement bien d’accord avec le constat d’un ralentissement dommageable et d’une multiplication de sous-intrigues pas forcément passionnantes. L’impression aussi d’une saga devenue trop vaste pour son bien. Je me souviens que l’arc de Rand m’avait particulièrement déçu à l’époque, en rajoutant un site de plus à l’univers au moment où l’on aurait préféré une avancée plus notable de l’action. On a presque l’impression que Jordan l’occupe (et nous fait patienter) en attendant que ses alliés l’ait rejoint. Il aurait été moins frustrant de le mettre hors champ ou quasi, comme Egwene. Le meilleur reste l’arc de Mat, amusant et sachant être bouclé dans le cadre du roman au lieu encore s’effilocher, comme c’est devenu l’habitude de Jordan (toujours pas bouclé pour Perrin et sa douce). Le final manque aussi d’éclat.
Pas souvenir d'un ralentissement équivalent dans GoT, même si la disparition de Tywin a été dommageable à son intérêt global (avis personnel), tout comme l'a été, à mon avis, celle de Moiraine pour la Roue.
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Déjà très fan du Disque-Monde, je n'ai évidemment pas changé d'avis. Et la définition de cette fameuse "huitième couleur" est savoureuse.
Les aventures de Rincevent (la magie des noms !) et de Deuxfleurs (idem) m'a beaucoup amusé et le roman se lit très bien, très vite. Chose rare, il est divisée en parties alors que les romans suivants seront d'un seul bloc (les suivants moins Le Huitième sortilège que je dois relire). Le bémol avait été évoqué : il n'y a pas réellement d'intrigue mais une suite de scènes reliées hâtivement entre elles. Le plus beau restant qu'il en sort quand même quelque chose.
On découvre ainsi le Disque-Monde et son Bord. Tout ce passage, avec le personnage du "troll marin" (une trouvaille !) est fabuleux, "magique" et plein de rythme. J'ai apprécié aussi le passage du Wymberg avec ses dragons qui n'existent que parce qu'on les invoque (autre trouvaille !), sa population qui marche au plafond, son ancien souverain qui est un mort-vivant qui a bien fichu la panade chez les siens. Liessa est le seul personnage féminin du récit mais disons qu'elle marque. Sans oublier Hrun l'aventurier, belle caricature de ce type de personnage.
Si Rincevent m'amuse avec sa malchance chevillée au corps, le type arrive à poser plusieurs lapins à la Mort elle-même et refuse de se faire embarquer par un "simple" démon ! Par contre, Deuxfleurs m'a vite agacé avec son perpétuel air ravi, son inconscience, son égoïsme pour tout dire. Par contre, le Bagage (et "l'animosité" entre lui et Rincevent) et l'appareil-photo fonctionnant avec son démon familier sont de belles idées.
L'écriture de Terry Pratchett (et sa traduction française par Patrick Couton) est un régal avec ses digressions et ses commentaires qui apportent beaucoup d'humour. Parfois, le commentaire est supérieur même à l'action décrite. On sent que Pratchett s'amuse alors et lâche la bride à son imagination. Il abandonne une intrigue qui, de toute évidence, ne l'intéresse guère, pour nous donner la substantifique moelle du roman : le Disque-Monde lui-même. Pourquoi écrire une histoire quand il suffit de celle du Disque-Monde ? Ceci dit, au-delà de ce qui est très agréable pour une découverte, l'avenir montrera qu'il faut une action construite pour canaliser la magie de l'Imaginaire.
(***)
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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Date d'inscription : 08/02/2010
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Re: Romans de Fantasy
Les premiers volumes des Annales posent le décor avec brio, et si d'autres davantage ambitieux suivront, ils m'ont suffit pour éprouver un coup de cœur jamais démenti par la suite.
Estuaire44- Empereur
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Date d'inscription : 10/04/2007
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Re: Romans de Fantasy
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Je suis rassuré : je pourrai voir mon dealer et recevoir ma dose de Robert Jordan. Snif !
A propos du titre, on en découvre l'explication...page 755 soit le dernière ! (oui, je zappe le glossaire).
Dans cet opus, on a une Tour Blanche qui vacille sur son sommet. Elaida a beau prophétiser sa victoire, on a plutôt l'impression qu'elle est soutenue comme la corde soutient le pendu. Avec Alviarin, la soeur noire aux manettes, l'antre des Aes Sedai est plus que jamais fragilisé. Une seule solution, préconisée par Léodagan donc c'est du sérieux : on crâme tout !
Les Fils de la Lumière ne vont pas mieux puisque Pedron Niall se fait assassiner (trop de subtilité et ainsi que le disait De Gaulle: "La vieillesse est un naufrage"). Que le tueur se fasse lui-même assassiner dans la foulée est assez...cocasse dirons-nous. En tout cas, cette milice vacille aussi. D'autant qu'elle perd son atout maître, Morgase, qui parvient à s'évader. Je prévois des complications au Cairhien !
P. 85: une coquille, il est écrit "Richard" au lieu de "Rand". Une révérence involotaire au héros de Terry Goodkin ? Une autre p. 248 où "Elayne" est écrit au lieu de "Egwene".
Surprise que le retour de Lan qu'on avait un peu (beaucoup en ce qui me concerne) oublié. Egwene l'envoi en mission à Ebou Dar où le malheureux se trouvera lié à Nynaeve. Il est appréciable que Siuan n'apprécie pas que Lan ait été lié à Myrelle sans son accord mais depuis quand Moiraine se souciait-elle des autres ? Voilà un homme privé du plus élémentaire libre-arbitre. L'amour a bon dos et n'excuse pas tout ! Personnellement, j'ai toujours autant de mal à croire à cette idylle Lan-Nynaeve que j'ai toujours vu comme sortie de nulle part. Je ne suis pas le seul : Mat lui aussi à un peu de mal à considérer le Champion comme l'époux de l'ancienne Sage-Dame. Il pense même que tout homme serait fou d'épouser celle-ci !
Plus les romans avancent et moins j'accroche à Nynaeve. Alors qu'au départ, elle maudissait les Aes Sedai, voici qu'elle est devenue une jusqu'au bout des ongles, manipulant et dissimulant. Sa mauvaise foi et son caractère ombrageux sont, eux, plutôt réjouissants. Le paradoxe est que cela amène à rehausser mon opinion sur Mat qui a bien du mérite avec ces "chipies". Le passage où Nynaeve et Elayne se font malmener par l'aubergiste est un de mes préférés. Mais quel bonheur de les voir se faire remettre à leur place ! On a tout de même un peu peur pour elles quand, dans le Rahab, elles rencontrent l'Ajah Noir et un gholam, une créature de l'Age des Légendes créée pour tuer des Aes Sedai (quelle bonne idée ! Il en faudrait plus de ces bestioles !). Au moins, Mat s'attire (brièvement ?) la reconnaissance d'Elayne en la sauvant.
Je trouve que Perrin est sous-utilisé (encore) et je regrette qu'il quitte Cairhien, banni par Rand parce qu'il a osé s'opposer à lui. Au moins s'est-il réconcilié avec son épouse.
Une remarque en passant : Robert Jordan est un père-la-pudeur vu la constance de ses remarques sur les tenues "indécentes" et sur l'absence de la moindre scène de sexe. Est-ce qu'il y a même un baiser ? De toute façon, l'amour n'a pas sa place dans son univers pourrissant, en attente de sa fin.
Autre remarque dans un autre ordre, Egwene exige de certaines sœur un serment à sa personne ; ce qui est inédit ; ce que je n'aurais pas cru de cette femme que je voyais plus conservatrice. Par contre, pas besoin d'être grand clerc pour flairer le problème car ce serment, c'est exactement ce que Rand a fait de son côté ! Il ne peut qu'y avoir clash et le risque de faire exposer l'ordre des Aes Sedai, déjà fracturé, est réel. Puisse la Lumière me faire plaisir !
Les Rejetés essayent de faire leur beurre dans cette marmite mais le mot "solidarité" n'a pas été inventé pour eux. C'est quand même extraordinaire que les antagonistes du héros soient présentés comme autant de sales gosses certes puissants mais pourris jusqu'à la moelle. On se demande s'ils ne préfèrent pas se savonner la planche réciproquement que lutter contre Rand. Moghedien est parvenue à s'évader grâce une aide inattendue mais elle échoue à tuer Nynaeve. Pas sûr que ce soit apprécié d'autant qu'elle n'en avait pas ordre. Sammael manipule les Shaido sans que j'ai vraiment saisi pourquoi. Rand l'affronte directement dans le final et la bataille, commencée en Illian, se poursuit à Shadar Logoth ! Voilà qui tend l'action et lui donne beaucoup de densité et de suspense. Amusant que Rand réagisse comme bon nombre de "méchants" dans des films quand il refuse que Sammael soit vaincu par le démon Mashadar plutôt que par lui ! Par contre, la bataille se termine un rien abruptement et voilà le Dragon Réincarné proclamé roi de l'Illian ! J'imagine sans mal les réflexions d'Edgwene sur "l'arrogance" de son ancien ami (pour une Aes Sedai, est arrogant celui qui pense par lui-même sans approuver une Aes Sedai).
Comme si tout n'allait pas déjà assez mal, voilà que reviennent les Seanchaniens et que débarque Cadsuane, une Aes Sedai âgée, très expérimentée, qui irrite Rand et veut le manipuler (pardon, le "guider"). L'ancien berger, qui consomme sa passion pour Min (après Aviendha et en attendant Elayne ? La chronique matrimoniale de Rand ne risque pas de se simplifier à l'avenir), essaye bien de se tenir loin de cette femme mais elle paraît plus tenace que les autres.
La Roue du Temps tourne comme elle l'entend ! (***)
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Bien d'accord pour le gholam, une nouvelle arme dans l'arsenal déjà fourni de Jordan, et qui promet beaucoup. Après 7 volumes, son imagination continue d'être au sommet, même si côté histoire et tempo, ça commence déjà à décliner un peu (je trouve que le volume 8 fait illusion mais le volume 9 a été le premier de la saga que j'ai trouvé moyen).
Pour la pudeur, il est vrai que Jordan était épiscopalien, de là lui vient peut-être une certaine retenue sur le sujet. Après, il ne me semble pas que la sexualité soit si importante dans la saga, ce n'est pas non plus Martin où le sexe dirige beaucoup les personnages. Donc, honnêtement, cette pudeur ne me gêne pas. Je ne pense pas que ça changera avec Sanderson, étant donné son mormonisme. Même s'il reste évasif, il est de toute façon explicite comparé à Tolkien ! Mais comme Tolkien, il semble attaché au Mal se détruisant lui-même : voir les Rejetés se taper sur la gueule plutôt que d'attaquer Rand (qui aurait à mon sens déjà péri depuis longtemps si les Serviteurs du Ténébreux s'étaient unis pour une fois) me semble raccord. Je regrette tout de même qu'ils semblent attendre tranquillement dans leur coin, ça minore fortement une opposition censée être la principale de la saga.
Bien résumé, l'arrogance selon les Aes Sedai, c'est exactement ça et c'est d'ailleurs une définition classique des mouvements militants quand ils se perdent dans leur idéologie ! Cadsuane va en effet prendre de l'importance, il me semble qu'elle prend la place de Moiraine, mais elle se révèlera encore plus dure et intransigeante, oui oui c'est possible.
Pour Perrin, je n'en dis pas plus mais tu n'as pas encore toutes les cartes en main
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
C'est une relecture mais, à l'époque, j'ignorais qu'il s'agissait du tome 2 donc il fallait repartir en arrière pour enclencher la marche avant (comme au rugby mais en moins violent).
Je me suis tout autant amusé que la première fois !
Dès les premiers mots, j'ai éclaté de rire : "Le soleil se leva lentement, comme s'il doutait de l'utilité de cet effort". Mais quel génie d'avoir trouvé cette phrase ! Et il y en a des tonnes ! Merci à Patrick Couton pour sa traduction. Il a dû s'amuser lui aussi ! Et s'arracher les cheveux sans doute un peu aussi.
J'ai trouvé que le scénario était moins foutraque que dans le premier avec cet arc de Trymon, l'apprenti-sorcier/maître du monde/génie du Mal qui apporte une pointe de noirceur, légère mais intéressante. L'arc principal avec Rincevent et l'insupportable Deuxfleurs est, lui, toujours aussi dynamique mais d'une dynamisme qui masque un manque de fond. On avance, on avance vers l'infini et l'au-delà (sans doute moins puisqu'une étoile géante semble s'approcher du Disque-monde) mais, pour moi qui suis habitué à l'écriture d'Edgar Rice Burrough, qui file tout droit sans s'encombrer de psychologie, ça passe. Les personnages sont cependant bien mieux soigné chez Pratchett, même si les femmes sont en retrait (Bethan est charmante mais guère plus). Moins foutraque mais pas encore tout à fait stabilisé. On sent que l'auteur se cherche.
Côté personnage, Cohen le Barbare est une trouvaille génialissime ! C'et vrai que les héros sont toujours jeunes, fringants, plein de sex-appeal mais que devient un héros vieillissant ou même comme ici carrément vieux ? C'est avec beaucoup de tendresse et d'humour que Pratchett nous le présente et le fait évoluer sans misérabilisme. J'ai bien aimé aussi qu'en vieillissant, il soit passé des blondes aux brunes ! Il a bon goût ! La discussion entre lui et Rincevent sur les femmes est drolatique à souhait !
Le final avec la Grande A'Thuin est une trouvaille magnifique. Dommage que la partie à l'Université Invisible (qui deviendra "de l'Invisible" dans les volumes suivants si je ne commets pas d'erreur) soit un peu abrupte à mon goût.
Trop engagé et déjà perdu, je vais continuer à m'enfoncer dans l'exploration du Disque-Monde.
Camarade Totoff- Prince(sse)
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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Re: Romans de Fantasy
En cas d'adaptation ciné, recruter Arnold pour jouer Cohen ce serait l'apothéose de l'histoire du casting.
Estuaire44- Empereur
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Re: Romans de Fantasy
Dearesttara- Roi (Reine)
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